Je viens de regarder A fool there was sur archive.org (merci Conufs !) Au-delà du plaisir de découvrir un film rare, j'ai senti très vite qu'il me fallait faire un effort d'adaptation pour tenter de me mettre dans la peau d'un spectateur de l'époque parce que, sinon, je risquais de passer à côté. Ca fait une paye que je n'ai plus vu de films muets et ils dataient des années 20; celui-ci est beaucoup plus ancien : 1915 et j'ai essayé de le voir avec les yeux innocents du public de l'époque. On peut mieux saisir alors la fascination qu'a pu exercer Theda Bara, personnage et rôle; les "audaces" de l'époque (lorsqu'elle découvre sa cheville à bord du paquebot, la bretelle de sa robe dévoilant son épaule à chaque mouvement dans la scène où elle fait sa valise) et tout ce que sa conduite peut avoir d'immoral et de sulfureux pour ces années-là. Aujourd'hui, on parlerait de manipulatrice perverse, dans le style de Glenn Close (Liaison fatale). Le but du jeu étant de relier le rôle au mythe du vampire, on voit, par exemple, dans une vision très tropicale de l'Italie, Theda Bara, allongée sur une chaise longue qui ressemble plus à un catafalque, commencer à s'étirer et le geste de ses bras décrit une courbe très vampiresque au-dessus de sa victime, allongée à ses pieds. La dernière scène, par contre, montre Mr Schuyler, la victime, parvenu au dernier degré de destruction et dont l'apparence présente beaucoup d'analogies avec celle du Nosferatu de 1922. Visionner un film de 1915 c'est aussi voir un passionnant document d'époque : les costumes féminins, l'ameublement, l'embarquement sur le paquebot (inévitablement, on pense au Titanic), la scène de trafic routier sur la grande avenue, etc ... Un document historique, un petit bijou et un vrai plaisir
_________________ "Le cinéma, c'est le sang, les larmes, la violence, la haine, la mort et l'amour" Douglas Sirk
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