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Allez, pour faire plaisir à Gontrand :
Il y a près d'une décennie au Cameroun. Je passais une bonne partie de l'été à Douala, dans la maison de famille d'une collègue qui y séjournait pour les vacances avec ses enfants. J'ai vite été pris en main par les cousins et cousines de famille étendue, de 4 ou 5 ans mes cadets (j'approchais alors la trentaine), d'une part pour des raisons pécunières évidentes (qui d'autre que moi allait payer les taxis, les tournées, les repas etc.), mais aussi pour me servir de garde rapprochée afin de m'éviter de tomber dans les panneaux habituels et l'appât de la chair (et ils ont fait un excellent boulot, j'ai notamment échappé à une demande de mariage portée par la mère d'une jeune femme du quartier). Là-bas ils appellent "snack" des établissements à mi-chemin entre la petite boîte de nuit de quartier et le bar, et on avait pris l'habitude d'y passer une partie de la soirée et de la nuit tous ensemble. Un de ces snacks avait attiré notre attention car il disposait d'un étage spacieux, donc on s'y rendait plus régulièrement que les autres. Un soir on arrive et deux types ont installé une table à l'entrée, un énorme sac de jute entre eux deux. Ils réclament 10000 Francs CFA par personne juste pour pouvoir entrer. C'est un peu raide (on était cinq ou six) mais je paye quand même. Une fois à l'intérieur, on se rend compte que l'endroit est bondé : pas de places assises sur les banquettes, ni de places au bar. On piétine quelques minutes pour voir s'il y a du mouvement, mais que dalle. On décide de partir. Je me rends auprès des deux types et leur demande de me rendre l'argent. Bien entendu, ils refusent. J'ai alors improvisé tout un numéro comme quoi j'étais journaliste, que je faisais la tournée des établissements de la ville pour évaluer l'attractivité de Douala sur le plan touristique, la qualité de l'accueil et des services, je les sermonne avec théâtralité sur le fait qu'ils étaient là à encaisser comme des ânes alors qu'ils pourraient tout aussi bien réguler l'entrée en fonction des places disponibles à l'intérieur, et que s'ils ne voulaient que je me déchaîne sur l'établissement dans mon futur article, ils avaient tout intérêt à me rembourser, ce qu'ils ont fait avec force grimaces de désapprobation. Aucun remords encore à ce jour d'avoir exploité mon privilège blanc face à des abrutis pareils, d'autant plus que la somme en question représentait pas loin de 100 euros qui ont vite servi par la suite à payer une partie des frais à avancer pour l'hospitalisation d'une gamine en pleine crise de palu.
Dernièrement j'ai fait un court séjour à New York. Je n'avais pas mis les pieds aux US depuis le début des années 2010, donc je n'ai suivi les radicalisations politico-sociétales sur place que par écrans et actualités interposées, et en échangeant avec mes proches là-bas qui, même pour les plus à gauche, confirment (et ça leur fait mal, la vache) qu'ils prennent de moins en moins le métro et évitent de plus en plus certains quartiers (j'y étais genre 10 jours avant qu'un fou qui menaçait tout le monde dans une rame ne meure d'une strangulation, devenant de fait le nouveau George Floyd). Ce monitoring de la situation là-bas, notamment au niveau des tensions raciales post-Black Lives Matter, m'a familiarisé notamment avec ces vidéos de femmes noires en surpoids qui font des scandales hyper-violents dans des restaurants, des gares, des avions, bref, tous les lieux publics possibles et imaginables, avec des coups, des cris, des insultes et du personnel souvent paralysé de consternation. Je me disais que c'était un épiphénomène amplifié par les réseaux sociaux, que je n'étais pas immunisé contre la propagande, que c'était sans doute éxagéré... Et là, bam : une semaine de séjour, et à l'embarquement pour le vol retour à Paris, une femme noire en surpoids complètement ivre, au comportement odieux, s'est faite débarquer par l'équipage, ça a pris des plombes car elle ne voulait pas bouger, elle a été extrêmement menaçante physiquement et verbalement, y compris avec les passagers sur son chemin vers la sortie. Exactement comme dans les vidéos. C'était comme rencontrer une star de cinéma, la même sidération à se dire "putain elle existe vraiment, elle est là !" mais à l'échelle d'un comportement qui, à en croire les passagers tous têtes et yeux baissés, ne surprend plus personne tant il semble être acquis. Grand moment.
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Looks like meat's back on the menu, boys!
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