The Scythe-Meister a écrit:
Je ne répondrai pas à ce topic car je ne veux pas qu'Ilouchechka sache ce qu'il lira en 2018.
Faudrait déjà que tu fasses ton top découvertes 2014 pour que je puisse préparer ma liste 2017
Puck a écrit:
(Pour chaque bouquin, je vais prendre en photo la cover et la première page que je mettrai en "hide")
Chouette présentation ! et les carnets, ça va faire mal !
Sinon perso, ce qui m'émoustille en ce moment:
* Les pensées de Pascal. C'est un peu mon livre de chevet, j'en lit toujours un bout ici et là, et je
médite.
Citation:
La plus grande bassesse de l'homme est la recherche de la gloire. mais c'est cela même qui est la plus grande marque de son excellence; car, quelque possession qu'il ait sur terre quelques santé et commodité essentielle qu'il ait, il n'est pas satisfait s'il n'est pas dans l'estime des hommes. Il estime si grande la raison de l'homme que, quelque avantage qu'il ait sur la terre, s'il n'est placé avantageusement aussi dans la raison de l'homme, il n'est pas content. C'est la plus belle place du monde, rien ne peut le détourner de ce désir, et c'est la qualité la plus ineffaçable du coeur de l'homme.
Et ceux qui méprisent les hommes et les égalent aux bêtes, encore veulent-ils en être admirés et crus, et se contredisent à eux-même par leur propre sentiment, leur nature, qui est plus forte que tout, les convainquant de la grandeur de l'homme plus fortement que la raison ne les convainc de leur bassesse.
* Réelles présences de George Steiner.
Essai passionnant qui développe le propos de Steiner sur la modernité aujourd'hui, le temps de l'épi-logue (après-logos) où il examine la question du sens: y'a t'il quelque chose qui reste du sens dans le mot, quelque chose d'autre que le jeu de la déconstruction, la possibilité, le pari d'une transcendance ?
Citation:
Nous devons nous demander, à nous et notre culture, si un modèle séculier, positiviste, immanent par essence, de la compréhension et de l'expérience d'une forme pleine de sens (l'esthétique) peut être défendu à la lumière, ou, si vous voulez, dans les ténèbres du nihilisme. Je tiens à demander si une herméneutique et un réflexe d'évaluation - la rencontre avec le sens dans le signe verbal, le tableu, la composition musicale - ou la déterminaiton de la qualité d'un tel sens par rapport à la forme peuvent être rendus intelligibles, peuvent être rendus responsables par rapport aux faits existentiels, s'ils n'impliquent pas, s'ils ne contiennent pas, un postulat à la transcendance.
Comme je l'ai indiqué brièvement, un tel postulat est souvent caché, il n'est pas déclaré ni exploité métaphoriquement, il reste sans conséquence, dans la plus grande partie de la pratique critique et interprétative. Qu'adviendrait t'il si nous devions payer nos dettes à la théologie et à la métaphysique de la présence ? si le prêt que constitue la croyance en la transcendance, qui nous a été consenti depuis Platon et Saint Augustin en ce qui concerne la forme signifiante, devait être remboursé ? Si nous devions rendre explicite et concret le présupposé que tout art et que toute littérature de valeur, et pas seulement la musique, à laquelle Nietzsche applique ce terme sont opus metaphysicum ?
Il existe une forte possibilité pour que ces question n'admettent plus de réponse adulte, voire réconfortante. Il se peut qu'elles ne soient plus que fioritures empreintes de nostalgie et de pathos. Le paradoxe le plus cruel de la déconstruction est qu'il n'y eut jamais de "point de départ", mais qu'il existe, pour ce qui est de notre confort innocent, factice et opportuniste au sein du sens, un point où tout se termine. Ce qui semble clair, c'est qu'il est impossible de faire l'impasse sur ce défi. Le lecteur - bon ou mauvais - qui regarde par dessus notre épaule peut être soit un Roland Barthes, soit un karl Barth, le plus puissant des lecteurs du sens révélé. Pour les maîtres contemporains du vide, les enjeux sont d'ordres ludique.
C'est là que nos chemins se séparent.
* Du côté de Guermantes - Proust.
Faut bien continuer sur cette belle lancée:
Citation:
A un point de vue plus accessoire, la façon spéciale, un peu trop minutieuse et intense, qu'il avait de prononcer certains mots, certains adjectifs qui revenaient souvent dans sa conversation et qu'il ne disait pas sans une certaine emphase, faisant ressortir toutes leurs syllabes et chanter la dernière (comme pour le mot «visage» qu'il substituait toujours au mot «figure» et à qui il ajoutait un grand nombre de v, d's, de g, qui semblaient tous exploser de sa main ouverte à ces moments) correspondait exactement à la belle place où dans sa prose il mettait ces mots aimés en lumière, précédés d'une sorte de marge et composés de telle façon dans le nombre total de la phrase, qu'on était obligé, sous peine de faire une faute de mesure, d'y faire compter toute leur «quantité». Pourtant, on ne retrouvait pas dans le langage de Bergotte certain éclairage qui dans ses livres comme dans ceux de quelques autres auteurs, modifie souvent dans la phrase écrite l'apparence des mots. C'est sans doute qu'il vient de grandes profondeurs et n'amène pas ses rayons jusqu'à nos paroles dans les heures où, ouverts aux autres par la conversation, nous sommes dans une certaine mesure fermés à nous-même. A cet égard il y avait plus d'intonations, plus d'accent, dans ses livres que dans ses propos; accent indépendant de la beauté du style, que l'auteur lui-même n'a pas perçu sans doute, car il n'est pas séparable de sa personnalité la plus intime. C'est cet accent qui aux moments où, dans ses livres, Bergotte était entièrement naturel, rythmait les mots souvent alors fort insignifiants qu'il écrivait. Cet accent n'est pas noté dans le texte, rien ne l'y indique et pourtant il s'ajoute de lui-même aux phrases, on ne peut pas les dire autrement, il est ce qu'il y avait de plus éphémère et pourtant de plus profond chez l'écrivain et c'est cela qui portera témoignage sur sa nature, qui dira si malgré toutes les duretés qu'il a exprimées il était doux, malgré toutes les sensualités, sentimental.
Quant aux livres à venir, j'attends la liste de Scythe
mais j'ai chestov, le maître à penser de Fondane, qui est en haut de la liste de lecture, la génération perdue (Hemingway and cie), qu'il va bien falloir se taper après Crane, et puis Richard Brautigan, trout fishin in America qui traine aussi dans le coin ~.~