Après les avoir enfin tous revu, je vais tromper mon ennui au taf en établissant un petit top/filmo des adaptations de Tom Clancy au cinéma. Il s'agira de discuter non de la qualité intrinsèque du film (sans l'ignorer hein) mais de la manière dont ils exploitent leur protagoniste principal et l'univers.
A la poursuite d'Octobre Rouge (John McTiernan, 1990)
Pour ma part, j'ai découvert ce film sur le tard et il est inévitable de constater à quel point le film paraît daté, non pas tant sur la technique et le rythme (même si un peu quand même) mais sur l'indéniable aspect "Guerre Froide" du film, avec tout ce que ça comprend de général russe qui veut rejoindre l'autre camp. Au demeurant, ça reste en comparaison aux autres, une des qualités du film dans la mesure où il exploite son univers géo-politique (intérêt principal de la franchise par rapport à un Bond ou un Bourne ou un Hunt, autres sagas d'espionnage). Cependant, si le décor géo-politique est bien là, il semble se limiter à n'influer que sur la création d'une atmosphère de huis-clos et de mystère dans ce(s) sous-marin(s) où ni les américains ni les russes ne savent réellement quelles sont les intentions de Ramius (Connery). Par ailleurs, si Ryan est ici le jeune premier (qui sait d'ailleurs, comme tout bon rat de bibliothèque, mieux que tout le monde ce que pense Ramius), il doit partager l'affiche avec Connery (d'ailleurs, littéralement, il ne la partage pas, Connery est seul sur l'affiche, c'est dire à quel point ce film n'est pas un film de "Ryan" comme le sont les Bond, Bourne et Hunt). Ce qui est un peu dommage. Tout comme le casting de Baldwin...il est bon, mais j'ai du mal à l'imaginer en simple analyste (rat de bibli donc) et plus en homme d'action...
Jeux de guerre (Philip Noyce, 1992)
Quelle ne fut pas ma surprise de constater à quel point ce Jack Ryan-ci est quasi-intégralement dénué de tout aspect géo-politique. La situation en Irlande et l'IRA ne sont que de vulgaires backgrounds sur lesquels le scénario tisse une banale histoire de vengeance de la part d'un terroriste (ouais Sean Bean ouais) contre Ryan et sa famille. Et ce n'est pas une surprise par contre de constater que la séquence la plus inspirée du film est l'observation de Ryan, depuis un centre de commande de la CIA, d'une opération visant à éliminer les terroristes irlandais cachés dans le désert, par le biais d'un écran renvoyant les images d'un satellite. Pas de surenchère d'action, un choix de mise en scène très moderne, sobre, couillu. Comme l'est le plan final, énormissime tant il va à l'encontre de ce qu'on mettrait en plan final dans un blockbuster hollywoodien. Outre ces quelques rares idées de mise en scène (comme d'autres dans le film), le principal apport de cet épisode est de présenter le Ryan qui justement n'est PAS un homme d'action. Il a quitté la CIA, il s'est fait une famille, etc...et le faire incarner par Ford, pourtant réputé pour ses rôles d'action dans deux franchises cultes (Star Wars et Indiana Jones), c'est savoir exploiter le personnage qu'il s'est crée justement dans les années 90 (avec ce film) de l'ex-héros vieillissant et/ou de l'individu lambda projetté dans une siatuation extraordinaire (cf. Le Fugitif, 1993). Du coup, on y croit beaucoup plus en rat de bibli pas forcément dégourdi qu'à Baldwin pour qui on a pas réellement peur en situation de guerre.
Danger Immédiat (Philip Noyce, 1994)
Ici, on essaye de faire plus mondial, plus politisé, en impliquant réellement le gouvernement américain (avec tout ce que ça comprend de membres pourris de la Maison Blanche), mais l'exposition est laborieusement longue et le film ne démarre réellement qu'à 45 minutes de la fin, une fois que Ryan se retrouve A NOUVEAU projetté sur le terrain, et cette fois-ci, contre le système. Par ailleurs, le voir s'allier à son contrepoint, l'agent John Clark (Willem Dafoe), c'est là aussi bien exploiter leur antagonisme si complémentaire (comme pour Batman et Superman par exemple) et avec des héros vieillissants, tous deux trahis par leurs supérieurs, ce n'est pas inintéressant (tandis que l'âge élevé du protagoniste principal est, je trouve, généralement moins pertinent pour ce genre de films quand c'est aussi peu exploité qu'ici). Il y a encore quelques idées supplémentaires mais on y est pas encore à mon avis...
La Somme de toutes les peurs (Phil Alden Robinson, 2002)
Film qui ne paye pas de mine et qui ne m'avait pas marqué davantage lros de sa vision en salles mais je me suis surpris à retourner le voir au cinéma, puis en DVD, plusieurs fois, jusqu'à l'acheter et encore le revoir. Il y a déjà, dans le film en tant que tel, une classe indéniable et une certaine personnalité. Robinson n'est peut-être pas un auteur (bien que son précédent, dix ans auparavant, Les Experts, flirte déjà avec l'univers) mais il témoigne de choix qui ne s'inscrivent pas forcément dans une approche américaine conventionnelle. Classique, certes. Mais pas académique. D'ailleurs, la structure du film s'impose elle aussi comme inattendue, avec un simili-climax à mi-film qui ne retombe jamais jusqu'à sa fin et l'heure qui précède tout ça est un habile crescendo vers l'inévitable face-à-face final des deux blocs. Pour la première fois, le contexte géo-politique est abordé de plein fouet, adopté, embrassé. Ryan ici d'ailleurs ne sert qu'à ça : c'est un analyste appellé pour donner son avis et COMME il sait mieux que tout le monde, il va aider à résoudre la situation. La bonne idée ici, c'est de prendre ce postulat (déjà présent dans le McTiernan donc) et d'en faire la ligne directrice du film. Plus d'intrigues parasites, de vengeance, de traficants de drogue, de corrompus au sein du gouvernement. Ici, tout paraît à la fois plus terre-à-terre et néanmoins international. Enormissime et incroyable mais néanmoins réaliste. Les membres de l'administration du Président lui sont dévoués et chacun, qu'il s'agisse de Ryan ou du Président ou encore des Russes en face, pense agir au mieux. L'intrigue devient également un moyen de véhiculer cette fois un réel propos. Ce n'est plus justement le syndrome Guerre Froide mais ici presque un constat adressé à l'Amérique d'aujourd'hui, un avertissement pour ne pas en arriver là où se termine presque le film. Il est agréable également de constater que tout n'est pas clean non plus. Si Affleck incarne très bien le boy-scout américain Ryan (probablement sa meilleure performance ailleurs que chez Smith) malgré son look de héros, Schreiber livre un John Clark encore plus convaincant que Dafoe. Physique loin d'être celui d'un Bond ou d'un homme d'action et pourtant méthode irréprochable et une fois de plus, la rencontre des deux, Ryan et Clark, est révélatrice, comme symbolique de l'union du thriller géo-politique et du film d'action.
Donc en top ça donnerait :
1. The Sum of All Fears 2. The Hunt for Red October 3. Clear and Present Danger 4. Patriot Games
Dommage qu'Affleck souffre d'un backlash, parce que le film a marché et aurait pu être l'excellent premier épisode d'un reboot de la franchise. Par ailleurs, des projets annexes, axés autour du personnage de John Clark (Sans aucun remords par John Singleton et Rainbow Six par Zack Snyder) et toujours basés sur des romans de Clancy, ont été mis de côté en vue de relancer une fois de plus la saga Jack Ryan. Avec quel acteur? Et qui à la barre?
Je rêve d'un Ryan réalisé par Oliver Stone, exploitant à 200% le potentiel géo-politique offert par le matériau de base dans un thriller épique et sombre avec un jeune Ryan contre tous, en bon héros stonien. Un blockbuster qui permettrait (plus que WTC) à Stone de se refaire un succès et qui donnerait une idée de ce à quoi aurait pu ressembler Mission : Impossible - 2 s'il avait été réalisé par Stone, un temps attaché. Pour le rôle, il faut quelqu'un dans la veine de Baldwin, Affleck et Ford, notamment les deux derniers. Un Américain à la machoîre carrée, au look de boy scout, auquel on puisse croire à la fois en ex-soldat mais également en mec plus habitué au bureau qu'à la jungle ou au désert. Un mec qui aurait tout juste trente ans...idéalement, j'aimerai bien qu'Affleck revienne mais vu comme il est mal-aimé, faut pas trop y compter... Pas Hugh Jackman, non, non...il est trop anguleux...mais quelqu'un de carré néanmoins. Y avait des rumeurs sur Hayden Christensen à une époque. C'est mal. Je verrai bien un Ryan Gosling, s'il avait été plus grand et un peu plus âgé...
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