Toy Story (John Lasseter, 1995)4/6 - C'est marrant parce que bien qu'en ayant alors eu seulement 10 ans, et bien avant de m'intéresser au cinéma, je me souvient m'être dit sur le coup "Putain la lumière déchire...". Ca m'avait frappé combien la lumière était spéciale, pensée, narrative, et je crois qu'aujourd'hui c'est encore une des qualités de Pixar que j'apprécie le plus. Pas transcendé par le film, sinon : souvenir d'un truc bien rodé mais sans plus. Avec un petit plus pour la chambre de Sid, qui fonctionnait bien.
A Bug's Life (John Lasster & Andrew Stanton, 1998)3/6 - Pour moi un gros rendez-vous raté. Il y a un truc, cette espèce d'atmosphère de fin d'été tout doré, et un film qui ne suit pas cette pente douce, qui se concentre sur une série de péripéties plan-plan accumulées à la chaîne. Je retiens de belles idées de mise en scène un peu diluées.
Toy Story 2 (John Lasseter & Lee Unkrich & Ash Brannon, 1999)5/6 - Le premier grand film, qui trouve vraiment une couleur bien à lui : ici un ton hystérique qui utilise un spectre très large (de la parodie totalement débile qui part vite en vrille à la phobie de la dégradation omniprésente), construit tout entier sur un motif de course . C'est très bien foutu, très bien pensé, très précis. C'est aussi le premier film qui parvient vraiment à cette idée de "divertissement total" dont Lasseter parle en évoquant
Star Wars. Ca reste un brin impersonnel dans la mise en scène, ce qui n'empêche pas à une virtuosité assez permanente de fleurir, avec ci et là quelques scènes majestueuses (la restauration de Woody, l'ascenceur...)
Monsters, Inc. (Pete Docter & Lee Unkrich & David Silverman, 2001)5.5/6 - Gros bof à la sortie, aujourd'hui c'est pas loin d'être mon préféré. Je continue d'y voir des gros défauts, La structure du scénario qui montre un peu trop ses gros rouages, des trous et rafistolages de partout (la secrétaire en big boss, le passage en montagne) - et puis je trouvais la plupart des monstres designés très mollement. Mais mine de rien on commence à viser vraiment très très haut. Déjà dans l'approche très émue, très pudique, d'une franchise désarmante : le dernier plan est la preuve que le mec derrière ce projet y tient violent, et le fait que le film tienne finalement pour beaucoup a de simples scènes d'échanges et de jeux entre le monstre et la gamine est quand même assez fort. Mais c'est surtout le côté doucement mental du film, explosant dans ce final où l'on rentre dans le hangar de l'inconscient de milliers d'enfants, qui m'achève à la vision : un truc aussi fort et aussi discret, "invisible", fait partie des choses qui me donnent l'impression que Pixar est l'héritier évident du cinéma classique US.
Finding Nemo (Andrew Stanton & Lee Unkrich, 2003)6/6 - Le sommet. Là encore, on peut pinailler en allant décortiquer la structure un peu maladroite, l'explicite du message énoncé tout le film... Mais le tout invite tellement à une vision dans la fluidité, dans une guirlande de textures et de sensations, d'émotions primales et de légèreté dansante, comme un livre d'images émues, que c'est vraiment aller le chercher par le mauvais bout. Quelle mise en scène bordel... Némo dans sa cathédrale de crasse qui regarde confiant vers la mer, le poisson flottant ridicule balloté sur les vagues de l'océan, le zen étrange aux reflets chauds de la scènes aux tortues, les mélanges de ton constants que permet Dory... Un panard constant. Et puis LA scène de la transmission de l'histoire du père, un retournement de génie qui te prend par défaut, qui retourne la narration comme une crêpe en faisant du couillon un héros, des embûches et maladresses un parcours du combattant, d'une honte une fierté, d'un bordel une légende : la plus belle scène de toute leur filmographie.
The Incredibles (Brad Bird, 2004)4.5/6 - Du mal avec Bird (pas vu
Le géant de Fer) : j'apprécie énormément la première partie, la suite c'est plus chaud. J'ai l'impression qu'on a le temps d'apprécier aucune situation, comme s'il y avait une peur panique d'ennuyer. Vaguement la sensation d'un énorme zapping du coup, des proto-scènes formidables dont on profite qu'à moitié. C'est délicieux, comme une friandise (le nombre de scènes fonctionnant comme ça en fait, comme le passage Elastic Girl avec les portes...), mais ca m'a peu marqué. Le film serait parfait pour une suite.
Cars (John Lasseter & Joe Ranft, 2006)4/6 - Bon c'est bizarre, parce qu'autant je "n'aime" pas particulièrement le film, autant je trouve qu'il trace énormément de choses étranges et passionantes formellement, sous une carapace a priori très académique. Lasseter m'a toujours marqué pour ça de toute façon, le côté conceptuel de sa mise en scène. J'aime pas énormément ses films, mais je suis toujours intrigué. J'avais essayé d'écrire une analyse du film pour tenter de pointer ce que j'y trouvais riche, mais c'est un peu bordelique (si ca tente quelqu'un :
http://www-8etdemi.univ-paris8.fr/TEXT_cars.html)
Ratatouille (Brad Bird & Jan Pinkava, 2007)3/6 - Bird encore, et là c'est plus possible : obsession maladive de tirer tout et n'importe quoi de n'importe quelle scène, et que je t'en extraie jusqu'à la dernière goutte de jus, genre "plus y en aura et forcément mieux ce sera". C'est usant tant tout ici devient "utilitaire", et le surdécoupage épileptique de
The incredibles a beau se transformer en virtuoses plan-séquence, ça passe plus : à force de vouloir tout prendre, Bird ne fait rien porter, n'a rien à dire, produit un truc anodin - encore une fois très élégant certes, un film jazzy quoi, mais ça me suffit pas. En plus j'adorais le potentiel de ce projet, qu'est-ce qui s'est passé avec Pinkava ? Apparement, le tout était parti pour être une grosse fresque avec dix persos principaux... J'aurais au moins voulu le voir essayer, quitte à se planter.
Wall-E (Andrew Stanton, 2008)4.5/6 - Stanton revient et ca fait du bien, même si la manie du sur-découpage l'a gagné pour pas grand chose. Le pitch, les personnages, le muet, tout déjà pose un terreau de film passionant. Après, je trouve ça un peu inabouti en un sens : pourquoi pas la confrontation de deux segments (un conceptuel / un narratif), mais il faudrait en faire surgir quelque chose de plus. Là, je vois pas grand chose à part la séquence "Define Dancing", très belle mais un peu courte (et un peu facilement amenée dans la structure du film : j'aurais bien aimé vraiment voir, moi, les répercussions et le bordel que provoquent le simple passage de Wall-e à travers la station, façon théorie du chaos, là c'est très peu construit). Le générique de fin, idée vraiment miraculeuse, remonte le film de manière assez phénoménale dans mon estime.
Up (Pete Docter & Bob Peterson, 2009)5/6 - Là encore un excellent réal aux commandes et ça fait du bien ; et toujours cette structure en deux blocs qui pour moi fonctionne cette fois mieux, notamment parce qu'il y a une cohérence dans la seconde (ce côté burlesque qui se déverse tout à coup sans s'arrêter), les deux se complètent plus logiquement. Mais le dernier quart final Pixar institutionnalisé tue un peu le film dans l'oeuf : on dirait encore une fois une fin accolée à un truc qui avait tout pour lui (quand on a un ciel infini à portée de main, une maison qui sombre, un veuf, un gouffre de vide sous les pieds, on fait autre chose qu'une course-poursuite kro rigolote). C'est d'autant plus frustrant que le film atteint un niveau d'achèvement formel incroyable de justesse peu avant (le traînage de la maison sur la falaise vide au soleil levant, le ciel bleu pur et la maison enfin installée...).
Toy Story 3 (Lee Unkrich, 2010)5/6 - Un bel aboutissement, des scènes vraiment très très fortes, mais toujours un univers qui me parle moyen. Je le reverrai probablement peu, il reste qu'il n'y avait pas mieux pour prouver leur excellente santé.
Voilà, je retiens grosso-modo de Pixar une logique de studio qui marche du tonnerre, deux réals géniaux (Docter et Stanton), le digne héritier du cinéma classique, et des chef-ops hallucinants. C'est déjà beaucoup.