En 1930, dans un village du Jutland, des discordes religieuses surviennent entre deux familles lorsqu'il est question d'unir par le mariage deux de leurs enfants.Me voilà bien embêté. Moi qui étais persuadé qu’un topic était déjà crée, je me retrouve à devoir ouvrir sur ce petit monument pas si simple à aborder.
La Passion de Jeanne d’Arc avait déjà été un des films les plus impressionnants que j’avais vus, et pourtant je ne m’étais pas précipité à lancer d’autres Dreyer, la peur de me lancer dans un truc trop imposant et surtout la fainéantise de démarrer un « film danois de plus de 2h des années 50 en noir et blanc », faut bien l’admettre. Mais comme en ce moment j’ai décidé de me prendre un peu en main, j’ai donc découvert Ordet hier soir.
/SOILERS INSIDE\
Pour faire simple, ce qui m’a surtout frappé c’est la multitude d’enjeux qui s’imbriquent, et ce à des niveaux différents. Au premier plan, purement fictionnel, on suit l’amour d’Anders pour Anne, la demande en mariage, l’accouchement d’Inger, sa maladie, le conflit avec la famille Petersen, la folie de Johaness… Rien que comme ça le film est déjà incroyablement riche, et il prend une dimension encore plus grande en abordant frontalement les questions de la foie, de la mort, de la vie éternelle, de l’amour, de la filiation. Et c’est surtout un immense film sur deuil, représenté par Mikkel, le mari d’Inger. Ce que je trouve impressionnant c’est la façon de rendre toute cette complexité totalement cohérente, de lier tous ces enjeux de façon extrêmement fluide, tout en donnant au film une ampleur incroyable, grace notamment à des personnages fabuleux (dans tous les sens du terme, le côté métaphysique de Johaness, et surtout ce personnage magnifique du grand père que j’ai absolument adoré).
Bon malgré tout, on sent un peu le côté théâtrale sans que ça me gêne particulièrement, et on voit l’intrigue avancer d’assez loin : l’acceptation de la famille Petersen, la mort d’Inger et sa résurrection, les pouvoir de Johaness, etc. Mais Dreyer réussit malgré tout le tour de force de rendre ces évènements terriblement forts et émouvants.
Après je vais pas m’étendre sur l’aspect esthétique, j’ai trouvé que chaque scène était plus belle les unes que les autres, Dreyer a une faculté assez prodigieuse à filmer des visages. C’est pas aussi ostensible que sur Jeanne d’Arc mais rien que la scène chez le patriarche avec le travelling pendant sa messe, le regard porté sur Johaness, les larmes d’Inger à la fin ou n’importe quel plan sur le grand père, je trouve ça toujours aussi fort.
Je regarde quoi maintenant ? Jour de colère ?