J'ai beaucoup apprécié "Interregnum" vu au Wiels ce week-end. Il s'agît d'une courte adaptation d'environ 45 minutes, de l'Agent Secret de Joseph Conrad, transposée deux fois:
-l'intrigue est déplacée une première fois de façon "interne" dans le cadre de la Révolution des Oeillets au Portugal et de la fin des guerre de libération en Angola et au Mozambique.
-elle l'est une seconde fois, de façon "externe", à partie de ce premier décalage dans les années 1974. Meêm si la Révolution des Oeillets et ce qui l'a suivie (apparement: deux terrorismes d'extrême-gauche et d'extrême-drotie dirigés tous les deux à la fois contre la bourgeoisie et le PC, comme en Italie) est mal connue chez nous, l'esthétique et la culture des années 1970 nous sont à la fois familière et lointaine, et cela du fait d'un processus social et culturel implicite et collectif. Elles imprègnent encore notre quotidien, mais n'influencent plus nos choix et positions esthétiques et politiques de faaàkn ditecte. "Ces années-là" deviennent en même temps de plus en plus lointaines et de plus en plus objectives. Cmme la mémoire est en avance sur la compréhension des idéologies, elles se prêtent aussi à une récupération esthétique, et à un jeu de distinction sociale (entre producteurs et consomamteursd de culture et d'image) qui se formule en terme de connaissance et de distanciation, dans lequel "extrême-gauche" peut être un code et un motif esthétique au même titre que "disco".
Stan Douglas sait cela, et met en place un court-circuit, qui suppose d'abord un travail de recréation littérale et fidèle, une sort de foi critique envers ce que l'on sait inactuel et mort mais aussi signifiant. Dans cette mis en abyme, les mots de Conrad énoncés dans les années 1900 semblent mieux caractériser le problème terroriste actuel que ceux, pourtant plsu présents dans ntre imgnaire, de la perspective de lutte des classes des années 1970 presque disparue, sans que cette mort soit le signe d'une fausseté. On entend
"being a thief or a criminal is difficult, it needs commitment, it can take years to become one. But any idiot can blow himself for a political reason": mais ces mots étaient d'abord ceux d'un policier-espion de la fiction de Conrad avant d'être potentiellement les notres, et Douglas montre cette filiation cachée (mê si elel n'est pas le centre de son travail, elle en est und es effets). D'un certain côté Stan Douglas fait une oeuvre antisymbolique, dans le sens où elle est plutôt un commentaire interprétatif de ce que le réel avait déjà de symbolique à l'époque, mais qui ne l'est plus aujourd'hui: la culture se maintient en transformant pogressesivement le signe esthétique en jugement politique, mais ce jugement est divisé par l'oeuvre: il à la fois exercé envers une responsabilité (représenté par un discours) et un intérêt (qui est représenté par l'image), sur deux supports difféents.
Le film est projeté dans une salle de 6 écrans: deux paires de trois écrans sur deux murs se faisant face. A certain moment fois un seul écran est allumé et dépeint un filme classique, à d'autre occsions ce sont deux (champs/contrechamp sur les murs opposés), quatre (un écran pour le révolutionnaire, un autre pour la cible de 'lattentat, deux pour la police), parfois les six en même temps. Autre exemple: dans le roman de Conrad, l'espion pourri vend des livres intellecutels la nuit, et des romans pornographique la nuit. Pendant que la police fouille la librairie (qui ressemble à un night-club), l'écran oppsoé montre une étagère avec des livres de Blanchot, Breton, et Bataille, des références ultérieures, mais qui combinent de manière réelle les deux références que la finction antérieure de Conrad séparaient, tout en expliquant quelque chose du contexte politique des années 1970 (où ces livres incarnaient à la fois la radicaltié poltiique, et uen forme immédiate de cosmpolitisme).
Il y a un sens du timing et du cadrage remarquable. Du fait de ce parallélisme, la durée narrative est pour Stan Douglas déjà une explication, un commentaire réflexif. Cela crée des situations très riches:en filmant une arrestation d'un révolutionnaire, il montre en même temps sur le premeir écran la police sécrète qui met l'homme dans un fourgon, et le discours qu'un flic et un indicateur tiennent ensuite sur leur acte; tandis qu'un second écran accompagne le trajet silencieux du prisonnier dans l'intérieur du fourgon, immobile, sans doute voué à la torture, mais surveillé par un militaire calme et perdu. Ce passage rappelle "l'Armée des ombre" de Melville. Des champs-contrechmaps dans un dialogue filmés de façon classique, dans la même pellicules, sont brusquement éclatés et séparés sur les deux écrans opposés. C'est souvent une réplique où un personnage laisse exposer son ppint de vue politique, excédant l'intrigue du roman, qui déclenche cettes éparation), annulant à la fois la rpésence de l'autre dans la même image, et confirmant l'autonomie de son regard (ce qui est secret pour l'opinon d'un sujet). C'est assez ambigu: c'est un disposit d'art co,ntemporain, coupé du public du cinéma, mais esthétiquement accessible, qui peut représenter tout aussi bien l'avenir du cinéma qu'être déjà périmé par le flots d'images en streaming par YouTube, où l'image n'investit pas l'espace de la représentation, mais au contraire l'absorbe.
Je ne connaissais pas Stan Douglas qui est un vidéaste et photographe reconnu depuis longtemps (exposition au Centre Pompidou et au Reine Sofia en 1994) . Son esthétique n'a pas le hiératisme que l'on trouve par exemple chez Matthew Barney, elle est très cinématographique, très travaillée par une réflexion sur le cinéma comme média de la culture de masse qui est sans doute très influencée par Walter Benjamin ou Adorno.
En voyant les spots qu'il a fait pour la télé canadienne à la fin des années 80 ou "Microdrames", je me suis rendu compte qu'il a sans doute eu par ailleurs énorme influence sur des cinéaste comme Quentin Dupieux, Todd Haynes, et sans doute aussi David Lynch ("Twin Peaks" est très proche de Microdrames").
Dans ses photographies, il recrée des situations sociales crédible (une arrestation nocturne d'étudiantsen patte d'éléphant pendants les anénes 1968 dans un centre-ville nord amériain, une partie de base-ball joéues par des noirs pendant ce qui est sans doute une des deux gurrres mondiales, une soirée disco décadente dans un palace -sans doute dans un hôtel de luxe d'une ville comme Luandi ou Maputo dans les années 1970), mais sans référence à un évènement précis. Il pointe ainsi une opposition entre la culture historique et l'évènement historique lui-même: la première est un discours herméneutique que la société se tient à elle-même, qui finalement tend à transforme les faits en valeurs, et place ensuite ces valeurs dans la mémoire collective. ces valeurs exposée au vieillisement par le seul fait d'être soumise à une logique du sens (qui est aussi sa vérité). Le fait réel apparaît alors dans la part de l'image qui résiste à l'appréhension de la mémoire. Mais son travail reste malgré tout à la fois très formaliste et sentimental: le sens que nous enseigne l'histoire est exposé au vieillissement mais l'image non: elle est un pathos que la mort saisit brusquement, sans que cela soit le fait d'une intention humaine: et c'est uniquement ce pathos que l'on peut sauver ou de recréer de manière fétichiste, il s'oppose à la compréhension (Douglas entreprend un effort calme et mélancolique pour faire correspondre exactement la différence entre la culture et l'image au hiatus entre la vérité et la réalité).