Tsui Hark semble se faire vieux et bizarrement investi. Mais il s'en sort bien le bougre. La première scène d'action, qui envoie, rassure sur la générosité connue du réal. Tout en constatant qu'il est au courant qu'il tourne en 3D, ce qui n'a pas l'air évident pour beaucoup. J'apprécie de voir un gars qui n'hésite pas à utiliser certaines techniques qui rappellent Matrix mais suffisamment détachées pour que ça n'est finalement rien à voir. J'en veux un peu à Matrix, mais c'est la force du truc, d'empêcher d'autres, en quelque sorte, à réutiliser des effets que ce film s'est approprié avec tant de talent. Devant la Bataille de la Montagne du Tigre, on y pense forcément mais c'est fait avec assez de détachement et mêlé au style harkien pour que ça fonctionne en soi. Le seul vrai problème reste le CGI à la chinoise qui reste désespérément cheap pour 2015. Mais dès qu'on doit entrer dans le coeur du film, le début du film est assez confus et j'ai eu du mal à l'envisager dans son genre historique. Les scènes contemporaines semblent nous amener vers l'évocation d'une opération militaire d'importance dans l'Histoire chinoise mais sans que ce ne soit justifié par la suite. On se retrouve à suivre une escouade durant une opération relevant d'une pacification d'un territoire sans grand enjeu stratégique. On sait que les Japonais sont out. Se débarrasser d'un seigneur de la guerre moderne n'a pas la même envergure après ça. Bon, pour les Chinois, ça semble constitutif cette obsession de l'union, alors admettons. Faisons aussi avec les pauvres villageois à protéger des rackets des méchants. Mais dès qu'on s'intéresse aux personnages, c'est limite catastrophique. Les caractérisations outrés, des plans, montages, dialogues limites écoeurant de niaiserie du côté des gentils. Même chose du côté des méchants mais où peut respirer un peu de fun. Et puis Yang prend le film. Alors que son introduction est totalement ratée, peu à peu, il provoque l'épigénie d'un film qui semble enfin savoir où il va et devient jouissif à partir de la scène avec le tigre pour ne plus cesser de l'être. L'aventure commence vraiment, à l'ancienne, évoquant les enjeux stratégiques qui ont l'air particulièrement importante dans la fiction chinoise et n'importe quelle histoire de mission et d'infiltration. Le poids de l'Histoire semble enfin évacué et permet d'enfin s'attacher aux personnages quand arrive l'attaque du village, excellente, avec quelques touches d'émotions bienvenues, car sobrement traitées. La scène de l'assaut de la montagne fait bien le taff dans le délire exploitation avec d'énormes clichés mais offert si généreusement que ça ne se refuse pas. Le summum étant cette réillustration immédiate de l'histoire. La scène de l'avion, en plus d'être certainement la scène d'action la plus impressionnante de tout le film, et dans le haut du panier de gros films bourrins, pour peu qu'on adhère au nawak jusquauboutiste, se permet de mettre pas mal de choses en perspectives (malgré le nawak jusquaboutiste parce putain, ça l'est, l'impression de tomber sur la parodie d'une BD des années 50). Elle interroge sur la mise en image d'une histoire vue et revue (enfin en Chine apparemment, et en Occident, on a aussi notre dose de films de guerres avec mission de prise d'un poste fortifié stratégique). Le film le montre en tout cas frontalement au début et nous le rappelle au générique. C'est plaisant un hommage franc à un prédécesseur sans se limiter aux clins d'oeils plus courants (même s'il y en a peut-être bien) et souvent plus petits malins qu'humbles. Pour, en plus, carrément interroger sur la mise en image de l'Histoire et son illustration, ancrant définitivement le film dans le patriotisme émouvant (plus dans l'intention, la gestion avec le présent reste bancale) plutôt que le nationalisme béat qu'il pouvait faire craindre ça et là. Du début où je me dis que Hark s'est complètement raté, la fin me fait croire qu'il a quand même réussi à rendre l'état d'esprit qu'on peut imaginer l'animer gamin, en regardant un de ces vieux films sur la Montagne du Tigre. Ah, et c'est drôle aussi ! En tout cas, la scène de la pause caca m'a fait marrer comme pas permis.
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