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MessagePosté: 19 Fév 2015, 15:32 
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A.K.A Double Indemnity

Walter Neff est sérieusement blessé et se confie au dictaphone. Employé d'une compagnie d'assurance il est tombé amoureux d'une de ses clientes, Phyllis Dietrichson. Elle a fait signer une assurance-vie à son mari dont la prime double en cas de mort accidentelle

(Tranquille le synopsis wikipedia qui raconte tout le film...)

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Bon alors déjà il ne faut pas être allergique au Film Noir car là on y retrouve tous les archétypes imaginables, et le film a notamment été l'occasion pour moi de découvrir Barbara Stanwyck en Femme Fatale, dont le physique m'a totalement hypnotisé pendant toute la durée du film. Je trouve qu'elle a un visage super particulier, je voyais que ça à chaque fois qu'elle était à l'écran, j'aurais pu la regarder pendant des heure je crois. Je trouve qu'elle a pas du tout une tête d'actrice classique:

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Mais perso j'aime bien, en plus elle a un peu la même expression qu'une fille que je connais, ça m'a complétement hypnotisé. Bref

On parle souvent de la narration de Sunset Boulevard et son récit en flash back dicté par un fantôme, mais finalement il y'a déjà tout ça dans Double Indemnity, qui commence par l'aveu au dictaphone d'un meurtre, par un homme blessé à l'épaule et qui semble avoir tout perdu.

Il finira d'ailleurs en disant:
Citation:
Suddenly it came over me that everything would go wrong. It sounds crazy, Keyes, but it's true, so help me. I couldn't hear my own footsteps. It was the walk of a dead man.


Et si le film est brillant, c'est d'ailleurs en grande partie parce qu'il est remarquablement bien écrit. Il y'a pleins de scènes comme ça qui m'ont fait rire, justement parce que les répliques sont géniales, et là je pense en particulier à la scène de drague lors de la première rencontre entre Walter et (si)Phyllis et leur échange tout en métaphore sur la conduite (en matière de voiture mais aussi de séduction). J'ai adoré.

Là où le film prend peut-être à contre-pied d'autres films du genre, c'est dans son refus de s'appuyer sur la relation sentimentale entre Walter et Phyllis et d'au contraire traiter ça comme quelque chose de très distancé, froid et factice plutôt que d'en faire un moteur du récit. Au final, la personne avec qui Walter aura été le plus proche c'est son collègue Keyes qu'il aura cherché à fuir à tout prix, et qui lui allumera sa dernière cigarette dans un final plus émouvant que toute cette fausse histoire d'amour qu'il aura vécu avec Phyllis.


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MessagePosté: 02 Sep 2019, 16:23 
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Oui c'est très bon, étonnamment moderne pour tout ce qui concerne les annotations psychologiques, plus moderne que les films noirs qui ont suivi, d'où peut-être une forme d'aridité. La manière de parler dans la compagnie d'assuranceassurance, c'est déjà celle de l'entreprise moderne, à la fois cool, solidaire et policière (frappant : le dictaphone, qui est à l'origine un outil juridique, et qui structure le film, est entre-temps devenu commun). Je trouve McMurray très bon : une gueule de héros américain et en même temps une blessure et une colère intime ( et inexpliquée) qui le fait basculer dans le néant. Edward G. Robinson est plus que très bon : énorme, dans un numéro limite Walt Disney et en même temps complètement crédible en expert d'assurance, en collègue mégalo et humain. C'est un jeu à la fois vériste et qui parie sur la surenchère comique, très Nouvel Hollywood en fait. Il y a des trucs assez geniaux, comme la manière dont Edward G. Robinson s'asperge de flotte en arrachant le verre d'eau de son patron. Même les seconds rôles (comme la fille) et les figurants (dans le supermarché, dont Wilder distingue la modernité destinée à perdurer) sont bons.


C'est un proto film noir, mais il transfère sur le monde de l'entreprise les attributs "krakauerien" du policier (son célibat, son idéalisme, mélange de sévérité et de candeur).
On retrouve aussi certains traits d'observation sociaux qui se retrouvent dans les comédie de Wilder ( l'open space de la Garçonnière est déjà là, dans les deux films il y a d'ailleurs le même type de monologue sur le suicide, fantasmé et critiqué en même temps). J'aime bien aussi des petits trucs où le gardien un peu collant et apparemment demeuré du début, pas dupe ( il appelle Keyes) dit nerveusement à Neff qu'il est trop vieux pour être assuré, alors qu'il travaille lui-même pour une grosse assurance. Il y a aussi peut-être une critique discrète des rapports raciaux (le personnel du train entièrement noir). Le dialogue est extrême brillant, drôle et âpre.

La voix off passe, car c'est clairement le surmoi intelligent mais déchu d'un gars quand-même assez stupide (à supposer qu'il eût pu dissimuler son crime, on voit mal comment il aurait pu vivre avec Stanwyck sans se griller aussitôt vu son métier. Cette connerie devient même lyrique : c'est quand il est déjà mort qu'il comprend qu'il aurait pu passer au Mexique pour disparaître, la seule partie manquante du plan). Il y a là à vrai dire une forme de malaise et de gêne un peu poisseuse pour le spectateur (cette bêtise n'est guère dépaysante, même pas tragique), mais Wilder a précisément voulu créer un film où plus on s'identifie aux personnage, plus on est déçu par le réel et laissé seul. cette bêtise estnune consequence du fait que les structures sociales visibles sont plus solitaires que les infrastructures (l'homme qui lave sa voiture au garage ou les employés du train sont d'autant plus transformés en spectateur à séduire et à duper qu'ils ne sont identifiés que par leur travail, subalternes, et vides de désirs comme de souffrance avouables. Ce qui est imité et objet d'un simulacre et d'une exhibition est alors la possibilité de juger le réel, qui dans le crime s'interrompt en même temps que l'appartenance à une classe sociale définie).

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
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MessagePosté: 04 Fév 2020, 13:30 
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Bien aimé le film vu il y a quelques mois mais c'est quand même formellement faible.


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MessagePosté: 04 Fév 2020, 18:27 
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Par rapport à quoi ? Je trouve le film très direct par rapport au genre codé du film noir, ce qu'il fait qu'il vieillit mieux que d'autres piliers du genre (la Griffe du Passé de Tourneur par exemple). Le jeu sur le flashback que le film dissout lui-même dans le présent témoigne quand-même d'une construction particulièrement soignée.
On dirait que tu reproches systématiquement aux réalisateurs de ne pas être des surhommes au-dessus de leur époque (quand la refléter est déjà un problème complexe, comme dirait un autre Autrichien : Hermann Broch - les Somnambules ont d'ailleurs quelque-chose à voir avec la vision du monde de Wilder). Ce qui mène à une valorisation assez cynique du mineur et de l'anecdotique qui fonctionne comme une compensation, et permet de rétablir une continuité historique.

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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 04 Fév 2020, 18:37, édité 5 fois.

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MessagePosté: 04 Fév 2020, 18:31 
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Wilder formellement faible, faut quand même la sortir, celle-là...

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MessagePosté: 04 Fév 2020, 18:54 
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MessagePosté: 04 Fév 2020, 19:25 
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Castorp a écrit:
Wilder formellement faible, faut quand même la sortir, celle-là...


ça crève juste les yeux, il est dans l'illustration. Wilder n'a jamais été un grand formaliste - ce qui n'est pas une tare - et j'imagine que les mac-mahoniens de l'époque tenaient ce genre de discours. Assurance sur la mort est un grand film, avec son scénario de Chandler, des images iconiques (Barbara Stanwyck avec les lunettes noires, les scènes dans le supermarché), mais ça n'empêche pas que c'est très faible formellement comparé aux films de Preminger, de Lang, ou même de Daves et de Montgomery de la même époque (je rajoute De Toth). Le film est vachement empesé et illustratif, juste mon avis.

Je lis le message de Gontrand.
Je ne valorise pas le mineur, je valorise ce qui est inventif formellement, et considéré comme tel depuis belle lurette. Je n'ai pas réhabilité de films mauvais du passé, ou de noirs passables (je n'aime pas d'ailleurs pas particulièrement Out of the past). Dans Assurance sur la mort, ce qui relève de la réalisation est assez secondaire - à part peut-être une parlotte pas propre à Wilder et qui heureusement n'est présente que dans les premières minutes.


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MessagePosté: 04 Fév 2020, 19:31 
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bmntmp a écrit:
Castorp a écrit:
Wilder formellement faible, faut quand même la sortir, celle-là...


ça crève juste les yeux, il est dans l'illustration. Wilder n'a jamais été un grand formaliste - ce qui n'est pas une tare - et j'imagine que les mac-mahoniens de l'époque tenaient ce genre de discours. Assurance sur la mort est un grand film, avec son scénario de Chandler, des images iconiques (Barbara Stanwyck avec les lunettes noires, les scènes dans le supermarché), mais ça n'empêche pas que c'est très faible formellement comparé aux films de Preminger, de Lang, ou même de Daves et de Montgomery de la même époque (je rajoute De Toth). Le film est vachement empesé et illustratif, juste mon avis.

Il y a pourtant certains de ses films qui vont bien au-delà de la simple illustration, Sabrina, La Garçonnière, Boulevard du crépuscule, c'est formellement irréprochable. Sinon comparer Lang aux autres réalisateurs que tu cites ils ne boxent pas du tout dans la même catégorie, Preminger est très en odeur de sainteté actuellement mais je le trouve très surestimé.


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MessagePosté: 04 Fév 2020, 19:33 
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Oui il y a peu abstraction chez lui (alors qu'elle est tres présente chez Lubitsch ou Tourneur) toutes les séquences appuient l'intrigue ou explique les personnages, sans contre champ ou suggestion d'un ailleurs (les personnages se racontent beaucoup dans ses films)
Mais cela ne veut pas dire qu'il soit formellement faible.

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MessagePosté: 04 Fév 2020, 19:39 
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Il y a une réhabilitation de Preminger ? Ça m'intéresse. Evidemment, j'ai découvert ses films via le dictionnaire de Jacques Lourcelles.
Mes souvenirs de La Garçonnière sont excellents, moins empesé formellement, et même Embrasse-moi Idiot, qui est un peu frénétique dans mes souvenirs et inventif visuellement. Preminger était en odeur de sainteté à l'époque où il sortait des films. J'ai pas entendu parler de revival.
Faut regarder Laura, Fallen Angel, Where the Sidewalk Ends... Les Hawkes. Et surtout si comme moi vous n'avez pas vu Et tournent les chevaux de bois avant. Tout ça est plus brillant au point de vue de la forme.


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MessagePosté: 04 Fév 2020, 19:42 
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Vous avez le droit de le défendre mais c'est très faible formellement, c'est tout et je parlais d'Assurance sur la mort.


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MessagePosté: 04 Fév 2020, 19:44 
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bmntmp a écrit:
Faut regarder Laura, Fallen Angel, Where the Sidewalk Ends

Laura ça fait trop longtemps que je l'ai vu, mais Mark Dixon c'est typiquement le film où je ne comprends pas en quoi on doit s'enthousiasmer.


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MessagePosté: 04 Fév 2020, 19:45 
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Il faudrait que je le revoie. Peut-être que j'avais l'impression qu'il inventait le procedural.

Lohmann a écrit:
Il y a pourtant certains de ses films qui vont bien au-delà de la simple illustration, Sabrina, La Garçonnière, Boulevard du crépuscule, c'est formellement irréprochable. Sinon comparer Lang aux autres réalisateurs que tu cites ils ne boxent pas du tout dans la même catégorie, Preminger est très en odeur de sainteté actuellement mais je le trouve très surestimé.

C'est pas un concours de bites. Lang est probablement le meilleur réalisateur du monde mais bon... Il ne boxe pas dans la catégorie de Wilder justement. Encore une fois juste un avis qui n'a pas de prétention à être universel. Jamais compris l'attrait de Lubitsch auprès des cinéphiles sinon mais je ne connais pas assez ses films sans doute.


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MessagePosté: 21 Oct 2020, 11:26 
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Je ne suis pas très film noir mais j'ai apprécié la perfection avec lesquels tous les ingrédients du genre sont ici maniés. Les dialogues sont ciselés sans gouaille excessive, le scénario déroulé sans effets de manche, les personnages dépeints avec une certaine finesse qui les font échapper aux canons: l'assureur en chef est bien plus un enquêteur à la recherche de la vérité que du profit (quand il démonte un argumentaire basé sur le suicide, par exemple), la femme fatale découvre l'amour in extremis, le protagoniste dur à cuire finit par endosser sa responsabilité pour épargner le jeunot qui se jetait dans la gueule du loup.


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MessagePosté: 23 Avr 2023, 19:46 
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C'était sans doute bête de ma part étant donné que j'avais justement admiré l'utilisation du Scope pour une comédie dans La Garçonnière mais j'attendais davantage Wilder sur le terrain de l'écriture en lançant ce Double Indemnity dont je savais qu'il était en quelque sorte le ur-film noir et c'est peut-être pourquoi j'ai été à la fois surpris (par la forme, n'en déplaise à bmntp) et quelque peu déçu (par le scénario).

En fait, je crois que je m'attendais à un récit plus retors, comme s'il s'agissait d'un post-noir ou néo-noir façon La Soif du mal ou Vertigo ou même Chinatown. Pour le dire vulgairement, je crois que je m'attendais à un twist, surtout que le film commence par l'aveu de Walter, et déroule son intrigue en flashback, mais garde délibérément le flou sur qui lui a tiré dessus. En un sens, c'est tout l'enjeu du film : bien qu'on nous donne d'emblée l'identité du criminel et ses motivations, on attend encore de savoir comment ça s'est passé exactement.

J'ai été également désarçonné par le contraste entre l'écriture des dialogues, qui attestent une fois de plus de la verve comique de Wilder et surtout de leur rapidité (c'est pas de la screwball comedy mais les joutes verbales ping-ponguent bien), et le développement de l'intrigue, plus monotone dans le rythme. En y réfléchissant, j'apprécie assez comme cela condamne le protagoniste, pris dans une mécanique inéluctable, jusque dans sa fin, sans surprise donc, bien moraliste, bien code Hays.

J'ai également été peu séduit par le couple dont la liaison un peu rapide illustre bien comme ils se limitent grandement à des archétypes du genre, avant de trouver un minimum de relief sur la fin. C'est effectivement Keyes, campé par un excellent Edward G. Robinson et sa tronche inénarrable, vers lequel je gravite davantage, sa caractérisation d'enquêteur intègre et sa relation subtilement tissée tout le long avec Walter qui est ce qu'il y a de plus humain in fine.

A l'inverse, si ce qui en fait un film séminal (cadeau Castorp) du genre dans l'écriture me laisse un peu sur ma faim, ce qui en fait le film séminal du genre dans l'esthétique me parle à 100%. Ce Los Angeles transformé en décors naturels urbains obscurs, cette atmosphère de smog constant même pour les intérieurs expressionnistes avec leurs stores vénitiens à gogo, cette bureaucratie abrutissante qui préfigure celle de La Garçonnière, ces échanges qui transpirent le sexe...

Très envie de tester Witness for the Prosecution, Ace in the Hole et Sunset Boulevard.

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