Forum de FilmDeCulte

#07 - Qu'est-ce qui cloche dans les blockbusters chinois ?

Une question pour quelques happy few (Chow, Karloff, je compte sur vous), d'autant plus foireuse que je n'ai pas vu les films en question. Mais à force d'entendre sans cesse le blockbuster chinois pris comme exemple du pire de ce que la production mainstream peut créer au monde, on devient curieux... Sont-ils ni plus ni moins réussis que leurs collègues américains, ou est-ce une catastrophe généralisée ? Les cas lamentables ont-ils les défauts attendus d'un blockbuster, ou y a-t-il quelque chose, dans leur projet et leur manière, qui les rend irregardables ?

De loin, il y a une certaine curiosité à voir la cinquième génération, auparavant si célébrée, donner naissance à de tels monstres. La cérémonie d'ouverture totalitaire des JO est-elle déjà en germe dans le goût pour l'imagerie des grands films festivaliers des années 90 ? Y avait-il, dans le rapport au pouvoir qui s'installait alors, une bombe à retardement ? Et qui condamnerait les réals actuellement célébrés par la presse (la très vague "sixième génération") à jouer à cache-cache avec la censure, de petites caméras numériques à la main ? Ou est-ce le sort de tout blockbuster non-américain de se boursoufler dans le trop pauvre objectif d'un concours de bite avec le modèle US ? Bref, beaucoup d'interrogations.


+ Si besoin : Box office chinois annuel récent et un article (un peu pioché au hasard) résumant la situation
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C'est très simple: la littérature d'épopée chinoise est illisible ou presque pour un Occidental: trop de personnages, de sentiments survoltés, d'intrigues et de sous-intrigues. Ajoutons à cela des effets spéciaux souvent horribles, et vous avez la lie du cinéma mondial d'un point de vue européen.

Mais après, de quels films parlons nous ? Trois royaumes de John Woo, Seven Swords de Tsui Hark et City of Life and Death de Lu Chuan, je trouve ça très bien (malgré les caractéristiques sus-citées).

Tu veux dire que c'est qu'un point de vue relatif, et qu'un critique chinois sérieux les trouverait bons ? (mis à part pour les SFX, donc ?)

Je pense que c'est surtout la critique européenne (Française?) qui n'aime pas, on est quand même bien contaminée par cette affaire de travelling et de morale et je peux te garantir que c'est le cadet des soucis du réal d'Aftershock, par exemple.

tu mets les films nouveaux et anciens d'Hong Kong comme chinois?


Parce que sinon je ne vois pas grand chose qui cloche

Ils ont tous la même tronche.

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Mais n'importe quoi !

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Ah bon? Genre ceux qui arrivent jusqu'ici? Les DTV? Ceux qu'on voit pas?

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On est pas obligé de réduire non plus la Chine au récit type "impérialiste" même s'il est dominant et revitalisé à fond par le pouvoir en place: formellement et du point de vue narratif, le fait de brasser énormément d'élément y a souvent pour seul but principal d'unifier et de conformer... Il y a des ambiguités là dedans bien évidemment, mais même avec ses qualités, un film comme "Les trois royaumes" a pour vocation finale de prêter serment à l'empereur dupé par un méchant ministre, de montrer une diversité canalisée (c'est mieux que Hero déjà, mais bon...).

Dans Detective Dee (le premier), l'impératrice est détestée mais tout le monde doit se soumettre : le méchant est un ancien rebelle qui n'est pas rentré dans le rang, et Dee en lui même se met au service finalement de son ancienne ennemie et va ensuite s'enterrer avec sa liberté de conscience, même si on peut de temps à autre aller le rechercher pour telle ou telle mission commandée... Dans Dragon Gate Inn le remake, j'avais trouvé quand même dans les dernières scènes que c'était assez gonflé vis à vis de l'image du pouvoir et l'intérêt porté aux "mercenaires" divers et variés, mais bon... Voilà quoi, Hark est réduit au mieux à ça, commenter plus ou moins crument son statut de mercenaire.

Là plupart de ces films (heureusement?) on ne les voit pas beaucoup cependant, on a ceux de cinéastes reconnus mais sinon c'est DTV ou même pas (les fresques qui célèbrent Mao et la Révolution avec défilé de pleins de stars chinoises).

Je ne suis pas sur que se parer derrière un "on ne peut pas comprendre, ni critiquer, nous occidentaux" soit par ailleurs une très bonne posture. Le sinologue Jean-François Billeter parle très bien de ça quand il s'est attaqué à François Jullien, le mythe de l'"altérité de la Chine". On ferait un "City of life and Death" avec le sujet d'Oradour, ça serait assez terrible sur le plan politique, au-delà de l'esthétique du film...

Tiens une interview de la prod de de Black Coal (Frodon inside):
http://www.slate.fr/story/90833/trap-st ... -interview

Le roi de l'argumentation a encore frappé. Je doute que tu ais vu Aftershock, méga-succès du cinéma chinois (et mondial), même pas sortie en salles en France. Pour l'avoir vu, je peux te garantir que le film fait dans la pornographie émotive, avec violons et ralentis qui pourraient tuer Jacques Rivette. D'ailleurs ce n'est pas surprenant de voir le succès de Michael Bay en Chine, Pearl Harbor ressemble aux blockbusters chinois d'action tire-larmes et patriotiques.

Mais ça n'a rien à voir avec le travelling de Kapo, dis pas n'importe quoi.

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Sur City of Life and Death, j'avais interviewé un historien
http://www.parismatch.com/Culture/Cinem ... see-154405

Je ne vois pas bien ce qui est terrible sur le plan politique dans le film par rapport aux films de guerre des années 50-60.

Tu as vu Aftershock ?

https://www.youtube.com/watch?v=Bl31p34laTQ

c'est génial

Tu as un propos qui est clairement "la Chine est souillée mais ne mourra jamais" qui passe par dessus toutes les monstruosités sur le plan individuel, avec notamment la focalisation symbolique sur une course à la femme enceinte après toute la série de viols : il y a clairement un élément nationaliste et revanchard fort, en dépit de la convention du personnage du soldat japonais qui doute, qui fait vraiment artificiel et prétexte... Massacres et viols sont en permanence destinés à la métaphore, et c'est un propos nationaliste violent et contemporain, au-delà du crime de guerre décrit. La parade japonaise dans les ruines montre aussi clairement un "géant de papier" pour l'avenir