C'est toujours passionnant lorsque Moati traite du sujet Le Pen. Ca avait déjà donné l'exceptionnel Le Pen, vous et moi, autour du 21 avril. Ca a donné, hier, un Ripostes consacré au leader frontiste.
Comme d'habitude, Moati a fait preuve d'une grande intelligence et d'un grand professionnalisme en interviewant Le Pen en face à face calmement, le plus neutre possible, sans jamais sortir l'ombre d'un croc, toujours courtois, maîtrisant parfaitement son sujet et son discours. Cette première partie est la plus intéressante, je trouve, celle où Le Pen se sent en confiance, se dévoile sincèrement, et la façon dont Moati l'amène à raconter son enfance, par exemple, est assez surprenante: il semble dire qu'il était bien forcé, sorti de 14-18, de se fasciner pour la patrie. On sent le poids de l'héritage culturel, on a cette histoire de l' "adoption" par la nation. Comme si les choses s'étaient imposées à lui. C'est assez surprenant, je trouve d'entendre Le Pen avouer qu'il n'a pas vraiment eu prise sur les choses. On croirait presque qu'il s'excuse d'être devenu ce qu'il est... C'est troublant... Moati est très fort pour amener ce genre de choses, dévoiler clairement qui il a en face de lui...
La deuxième partie, de débat, est plus convenue. La faute aux contradicteurs de Le Pen, qui ne lui arrivent franchement pas à la cheville, rayon joute oratoire. Il faut dire qu'ils sont un peu tous là pour vendre leur saucisson: Eric Raoult semble dire tout le long "oui, votre discours monsieur le pen est intéressant, mais vous êtes trop vieux pour l'appliquer, monsieur sarkozy le fera à votre place" (remarquez, au moins, ça a le mérite d'être clair -- c'est pas Sim qui voulait voter Sarko? c'est encore temps de changer, hein, mon gars...) ; Leroy répète en boucle "la vraie rupture c'est Bayrou", sans même se rendre compte à quel point il est ridicule...
Quant à Taubira, qui est p-ê celle qui s'en tire le moins mal, elle est un peu cantonné à son rôle de Noire qui s'offusque (elle a raison de s'offusquer, évidemment, mais c'est dommage qu'elle soit un peu la seule à le faire à la table, et qu'elle ne s'axe que sur ce plan...) et qui cite des auteurs (overdose, là...). Mais au moins, elle révèle des petits trucs: Le Pen ne peut pas se retenir de balancer des trucs équivoques (provoc, bien sûr, il sait ce qu'il fait et il sait vers où pousser les gens pour les désarçonner).
Espérandieu est nul, je comprends pas quelle expertise il apportait...
Enfin bref, c'est à voir, je trouve. Le discours de Le Pen a rarement été si solidement tenu. Il a réponse tonitruante à tout, pète une forme insolente... C'est dingue de voir à quel point il est fort, à cinq mois des élections. On n'a pas fini de le sentir passer, j'en ai peur...
La vidéo est visible sur le site de france 5, mais je vais essayer de mettre un lien google video dans la journée.
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