Hongo Takeshi se réveille et découvre qu'il a été transformé en un cyborg hybride de sauterelle. Devenu le Masked Rider, il doit combattre la mystérieuse organisation maléfique SHOCKER pour protéger l'humanité tout entière.
Well fuck me, j'ai trouvé ça beau.
Oui, une histoire de "cyborg hybride de sauterelle" donc qui va se taper contre d'autres hommes (et femmes)-insectes.
Alors évidemment, quand je dis que j'ai trouvé ça beau, je ne parle pas de ces costumes qui, bien qu'ils utilisent des matériaux de meilleure qualité et cherchent un minimum la modernité, assument l'imagerie et le dessin "biomanesque" originels - Anno, de retour seul cette fois à l'écriture, à la réalisation et au montage, a choisi de revenir au design de 1971 alors qu'il y a eu, si j'ai bien compté, TRENTE-QUATRE séries et QUATRE-VINGT ONZE films proposant différentes interprétations - tout comme certaines scènes reproduisent l'esthétique de l'époque, avec ses zooms et sa photographie "naturaliste" en extérieur un peu plate, d'autant plus que l'action se situe souvent dans des endroits un peu déserts.
Pour un total néophyte comme moi en la matière, cette découverte tardive des tonkusatsu exige encore un peu un saut de foi pour passer outre les flashbacks de la parodie des Inconnus (le côté étonnamment sanglant aide), mais c'est tout le reste qui m'a séduit.
À l'inverse de Shin Ultraman, je trouve cette fois l'exploration de la figure superhéroïque plus intéressante et surtout plus incarnée. En lieu et place d'un extra-terrestre monolithique à l'abnégation innée et inaltérable, on a ce mec qui se découvre (dans l'action! j'adore l'intro in medias res au possible, c'est limite Memento) ce nouveau corps (le film flirte par moments avec le body horror) et surtout une violence qu'il ne se connaissait pas (mais est-elle due à ses nouveaux pouvoirs ou à quelque chose de plus intime?).
J'étais venu pour voir un film d'action, attiré par des gifs vus sur Twitter, et j'ai été touché par un film de superhéros désenchanté, qui baigne dans la mélancolie, où le protagoniste agit d'abord pour une promesse et non pour le Bien Commun et s'interroge tout le long sur la façon d'utiliser ses pouvoirs, miné par la lutte entre violence et empathie dans la vocation d'aider les gens tout comme l'antagoniste justifie les moyens par sa fin visant à remplacer la souffrance par le bonheur, dont les kanji sont les mêmes à une barre près nous dit-on.
Ce fond inattendu (encore une fois, je n'ai jamais rien vu d'Evangelion) permet d'outrepasser certains des défauts des deux précédents opus qui persistent ici, à savoir un rythme parfois encore un peu lâche et de l'exposition de backstory et de lore en mode info dump par moments.
Et surtout, Anno l'illustre et lui donne corps visuellement. Soudain, ces décors tantôt industriels tantôt déserts revêtent un autre sens, d'un monde sur la fin, déshumanisé (on voit d'ailleurs très peu la population).
Même les décors de studios conservent cette approche dénudée où la direction artistique n'enlève rien à l'atmosphère délétère et désabusée et continuent de jouer sur cette notion de vide. En contraste avec les scènes de jour en extérieur, ces visions sombres et fantomatiques me hantent encore.
C'est généralement le genre de vibe et de traitement du propos qui tendent à me laisser froid dans la japanime et bizarrement, ça m'a parlé ici.
D'ailleurs, pour ce qui est des scènes d'action, on est également dans de l'anime live avec des combats qui m'ont rappelé Dragon Ball Z et pas mal d'idées qui transcendent les effets spéciaux approximatifs.
C'est imparfait, c'est spécial, an acquired taste, mais ça m'a agréablement surpris et marqué.
