pendant le film, mon esprit a divagué pendant un moment. je me suis dit que je ne voyais pas d'autres perspective qu'un gros echec public - je ne vois pas à qui s'adresse le film à part à des garçons cinéphiles ou des spectateurs égarés aux halles, karim leklou est une usine à flop, l'interdiction aux moins de 16 ans n'est pas improbable... - et je me suis interrogé sur ce qu'est aujourd'hui "un film rare". avant, c'était des films qui n'étaient pas disponibles, point. aujourd'hui, tout est disponible en VOD. mais quand plus personne n'a de DVD, donc une présence physique du film qui créé un lien, quand les services de streaming n'acheteront pas les droits d'un flop d'il y a 10 ans, quand les sites de piratages sont quasi morts... qui ira louer vincent doit mourir pour 3,99e dans 10 ans, quand le film aura totalement disparu de la mémoire collective ?
puis est venu le générique de fin, avec sa litanie impressionnante de financements, un déluge de subventions et de résidences - qui remontent jusqu'à 2017 chez sofilm - donc le projet est en gestation depuis au moins 7 ans...
je me suis dit que c'est vraiment un métier de chien, le cinéma.
parce que le projet est forcément sympathique. le pitch est excellent. on sent un scénario en mode spec, un mec qui écrit dans sa chambre avec une vraie volonté de proposer un projet différent, original - et de fait, ça ne ressemble pas à grand chose qu'on produit en France (ou ailleurs d'ailleurs, et puis il y a beaucoup d'argent belge).
et puis le film, outre son aspect petit, son aspect proposition qui l'empêche de marquer comme étant une oeuvre totalement aboutie, a autant de qualités que de défauts - qui sont d'ailleurs souvent liés.
par exemple, l'idée est excellente, mais la volonté de la "rationaliser" à travers un phénomène "fantastique" l'aseptise. la promesse fondamentale c'est celle d'un délitement définitif du lien social, une fois qu'on rentre dans un simple postulat fantastique on retrouve un développement assez classique de film de pandémie, etc.
le film mélange plusieurs phases, blocs narratifs - le mélange des genres et la liberté narrative c'est toujours bien, mais il y a un gros problème de rythme entre les 20 premières minutes hyper écrites, efficaces, cut et les 40 dernières minutes où on fait largement du surplace pour un segment sans grande surprise.
le film est tourné vers lyon puis en région pays de la loire et c'est des lieux qu'on voit peu et potentiellement rempli d'une atmosphère intéressante - sauf que les lieux sont assez moches et mal filmés.
le film sait être drôle au début, semble brièvement tenté par un esprit trash, puis finalement semble se prendre assez au sérieux, avant d'aller dans les refs aux films de zombie ou a des séries B... il y a plus un empilement de tons (qui chacun individuellement sont plutôt convaincants) que la création d'un univers singulier et propre.
la laideur visuelle est d'ailleurs un problème que j'ai eu du mal à surmonter. les couleurs sont répugnantes, karim leklou en très gros plan tout du long vraiment c'est compliqué... il y a indéniablement une confiance en soi dans la mise en scène, mais visuellement c'est soit plat soit laid, on n'est pas loin de la catastrophe.
après je ne veux pas non plus trash, le fait est que c'est un film ambitieux, plein de bonnes choses, avec des scènes puissantes, de belles idées, un scénario créatif et consciencieux, tout. mais il y avait un tel potentiel à cette histoire - qui a visiblement eu le temps et l'argent pour être développée correctement... - que c'est assez frustrant que ce soit au final si petit et si lardé de défauts.
à voir quand on est un garçon cinéphile intéressé par les propositions de films de genre français.