Dès la première scène, où la très belle photographie d'Adam Arkapaw, qui avait déjà envoûté le Macbeth de Justin Kurzel, instaure une atmosphère délétère, Michôd (et Joel Edgerton qui co-écrit) présentent toute la mesquinerie qui gangrène les puissants en temps de guerre. Dans un tel contexte, comment un homme prônant la paix pourrait-il s'en sortir?
D'entrée de jeu, j'ai été séduit par cette réinterprétation moderne (i.e. sans le texte et remodelée) des pièces du Barde consacrées à Henry IV et V, par la véracité empesée de gravitas, à la Ridley Scott, avec laquelle Michôd aborde le sujet. Malgré le parti-pris d'une arythmie qui ne marche pas toujours, ce goût du cinéaste pour une certaine lenteur, le film opte pour un calme presque constant qui garde néanmoins toute la force du récit shakespearien, incarné par cette figure de jeune roi malgré lui.
Le parcours tragique d'un homme à peine adulte - Michôd choisit l'excellent Timothée Chalamet, plus jeune que ne l'était réellement Henry V à cette époque - en rébellion contre son père dont il ne veut tout d'abord pas suivre les pas lorsqu'il accède au trône mais qui, son arrogance le rendant propice à la manipulation politique, se verra gagner par les mêmes tares qui incombent semblablement à tous les rois.
A ce titre, je trouve la dernière scène très belle notamment dans sa façon de formuler un propos : la désillusion amène le roi à formuler une requête a priori de l'ordre de l'intime mais qui résonne comme une condition sine qua non d'une bonne gouvernance.