Julien Gahyde, incarcéré et interrogé dans le cadre de l'enquête judiciaire sur la mort suspecte de son épouse Delphine, évoque sa courte relation adultère avec Esther Despierre, une amie d'enfance que la vie a remise sur son chemin, et à laquelle, dans une réponse trop empreinte de légèreté, il a déclaré un « amour » et sa possibilité de « vivre avec elle ».
C'est immédiatement sublime, et ça se prolonge jusqu'à la fin... putain ce que c'est bon. La narration est osée, non parce qu'elle est doublement structurée (interrogatoires et souvenirs passionnels), mais parce qu'elle est réussie. Ici pas de moment présent, ni de flashback... mais un assortiment de douceurs, de moiteur, de froideur, de couleurs, et même d'odeurs. C'est une sorte de Garde à vue revisitée, mais avec une grâce incommensurable, et un duel de monstres sacrés remplacé par un tête à tête sans esbroufe entre un Mathieu Amalric ultrasensible, et un Laurent Poitrenaux de juge absolument fabuleux. C'est vraiment puissant à différents moments, ça vient cueillir des choses intimes dans une histoire d'adultère mille fois vue, et la mise en scène, le 4/3, la photo, le montage et le son achèvent de donner du plaisir à chaque nouveau plan. C'en était parfois presque trop de beauté. En sus de la passion sexuelle, tenue par une bouleversante Stéphanie Cléau, s'ajoute un discours assez secondaire, mais lucide et essentiel : "l'impossibilité pour un prévenu d’établir son innocence, en face d’un système judiciaire qui fonde la prévention de culpabilité sur un ensemble d’apparences et de coïncidences". C'est vraiment fort de bout en bout, et la froideur implacable de la démonstration judiciaire de seconde partie m'a parfois fait penser aux Sentiers de la Gloire de Kubrick.
Un grand et beau film.
6/6