J'aime bien ce réalisateur qui semble travailler tout seul dans son coin avec la même équipe, les mêmes acteurs loin du microcosme cinéma parisien et qui réalise des films vraiment singuliers (Bled Number One, Dernier Maquis) avec à chaque fois de vraies propositions, un vrai regard social, politique et surtout cinématographique.
Et ce dernier film ne fait que renforcer cette idée. Narrant l'histoire des Mandrins, les contrebandiers ayant survécu à Mandrin, ses disciples en quelque sorte et leur volonté de faire découvrir sa pensée révolutionnaire à travers ses chants qu'il aurait écrit avant d'être exécuté.
Ce n'est pas un sujet facile parce que le film n'est absolument pas contextualisé (à part un bref encart au début nous apprenant l’exécution de Mandrin) et qu'il traite d'un sujet loin d'être connu de tous. Mandrin est, je crois relativement oublié aujourd'hui. Je le connais un peu parce qu'il est né à 5 minutes de chez mes parents mais même, à part son statut (assez faux par ailleurs) de Robin des Bois français, je n'en connaissais pas plus. Et dans le film on parle de lui comme d'un grand homme, comme d'un leader d'opinion sans trop savoir pourquoi en fait.
Mais à la limite c'est assez secondaire. Car ce qui prime dans le film c'est la description de cette bande de contrebandier qui vit dans les bois et l'esprit qui les régit. Esprit d'indépendance totale ou règne une anarchie qui s'organise naturellement.
Les acteurs sont d'ailleurs très bon, on retrouve les mêmes visages que dans ses précédents films avec l'ajout dans celui-ci de Jacques Nolot, excellent en Comte soutenant tout à fait la cause des Mandrins.
Et puis j'aime beaucoup ce cinéma historique sans moyen qui s'en accommode très bien. Contrairement à Jeanne Captive qui souffrait un peu du même problème mais qui ne savait pas comment le contourner, Ameur-Zaïmeche arrive véritablement à créer une époque, à investir des lieux sans beaucoup de décors, à donner chair et vie à du pas grand chose. En ce sens plusieurs scènes m'ont évoqués Albert Serra, où dans les personnages sont soudain contenus l’entièreté d'une période.
Et il y a une certaine poésie qui se dégage dans l'environnement, dans la forêt, dans les villages en pierre, dans les costumes, c'est quelque chose d'assez évanescent mais pourtant bien là, une vraie beauté, une vraie atmosphère.
Bref très bon film, cinéaste vraiment intéressant qui surprend et n'est pas là où on pouvait l'attendre. Dommage j'ai un peu l'impression qu'il passe totalement inaperçu (on avait plus parlé de ses précédents il me semble).
4/6