j'aime yorgos, un des mecs les plus puissants du moment pour moi. il a les défauts de son époque mais l'époque est tellement médiocre que ses qualités le font être bien au dessus quand même. et j'entends et je comprends les arguments des detracteurs, mais il y a une flamme une energie et un regard dans son travail que je trouve précieux, même dans lorsque le film lui-même ne me convainc pas totalement.
et j'aimais bien l'idée de ce projet, il a vraiment pris de galon et j'aimais bien ce petit, secret film qui sortait tout de suite après son plus gros truc.
au final ce n'est pas mauvais, mais c'est clairement un tout petit truc et son plus anecdotique.
il y a plein de choses intéressantes. il y a son truc habituel de parler de vraies choses profondes de la vraie vie à travers une histoire qui n'est pas du tout dans la vraie vie. ce degré de décalage avec la réalité est passionnant, cohérent pendant tout le film, un angle très précis, difficile à formuler clairement, qui n'existe que dans son cerveau. la narration étant par ailleurs concue pour jouer avec ce décalage, dévoilant les intrigues par couches, s'appuyant sur les bizarreries pour créer l'incompréhension passagère, c'est vraiment stimulant. ce regard articulier se traduit aussi visuellement, le fait est qu'il ne filme pas comme tout le monde, il transmet sa vision avec sa caméra, place le spectateur dans son cerveau grace à elle. c'est un cinéaste fort et passionnant.
mais.
le fait est que c'est un film à sketch. qu'ils sont inégaux, le meilleur étant le premier, d'où une impression désagréable, d'autant que le charme de la particularité de l'univers s'émousse mécaniquement. que tout ça est très long - concrètement cela pourrait être des nouvelles - son oeil et l'exercice avec les acteurs justifie que ce soit un film, mais 3 fois quasiment une heure c'est pas raisonnable. ça reste un petit film, un exercice quasiment, et 3 fois une demi heure aurait rendu justice à la chose. parce qu'il y a quand même un aspect extrêmement présomptueux à donner ce statut à ces trois petites histoires, qui explorent intelligemment la thématique de "some of them want to use you / some of them want to get used by you" mais bon 3 heures à cannes c'est trop. comme son cinéma est par ailleurs un peu pompier, un peu tac tac, et que ce n'est pas si profond que ça, il y a un aspect un peu toc dans la chose, comme s'il voulait en mettre plein la vue à un petit milieu artistico-chic-friqué au service de pas grand chose.
et puis il y a cette musique qui se la pète, il y a cette mise en valeur des acteurs mais on ne vit pas une époque avec de très grands acteurs américains et ils ne sont pas mauvais du tout (quoi qu'emma stone...) mais ils ne sont juste pas assez bons alors que l'exercice du film devrait les rendre incroyables.
du coup c'était une experience bizarre, je ne vois pas très bien qui verra ça plus d'une fois, je ne vois pas très bien quelle seconde vie il pourrait avoir en streaming, ça ne va évidemment pas marcher, du coup c'est un film intéressant mais raté, un exercice riche mais vain, fort mais petit, qui met à nu autant des qualités que des défauts de son réalisateur. avec une impression que ça aurait été plus efficace sous d'autres formes, en courts sur netflix comme les wes anderson x roald dahl ou en 3 fois 30 ou postés sur le site de saint laurent...