Oz - création originale de Tom Fontana (1997-2003)

Synopsis (imdb) :
Une série relatant les activités quotidiennes d'un établissement pénitentiaire inhabituel et de ses habitants criminels.Inhabituel, le mot est bien choisi. J'ai sélectionné ce cours syno car il reprend bien cet aspect disons singulier de la série. Après avoir vu ses quatre premières saisons, je vais donner mon avis qui je pense sera peu fluctuant une fois les deux dernières vues.
Je vais commencer par le négatif. (Plein de spoilers à venir)
Côté, réal', je suis pas très enthousiaste. Certains choix visuels me semblent déplaisants. Par exemple, certains passages sont d'un coup hyper fluides (différentes caméras ? Formats vidéo ? Problème d'encodage lors de la conception du DVD ? Si vous avez la réponse) et m'ont souvent fait sortir de l'histoire. Même si ça s'harmonise à partir de la saison 3 je crois, mais comme je sais pas à quoi c'est dû, ça reste énigmatique pour moi.
Aussi, les choix de photographie/étalonnage des scènes illustrant les crimes des protagonistes à Oz me laissent perplexe. À la fois, on comprend en un clin d'œil la mécanique des flash-back, et en ça c'est judicieux, mais je trouve ça d'une laideur... Ça a mal vieilli je pense, car ça devait plutôt faire le job à l'époque.
Ensuite, dans la 1ère saison, j'ai souffert pour Harold Perrineau Jr lors de ses monologues filmés dans un cube rotatif (la souffrance que ça a du être de tourner ses scènes). WTF ? Idée heureusement avortée dès la seconde saison, même si ça revient furtivement en saison 4. Et ces monologues sont assez répétitifs à la longue, sur le fond comme la forme. Néanmoins, ça permet à son personnage, Augustus Hill, d'exister à l'écran, bien qu'ici on joue beaucoup avec la frontière personnage/acteur justement.
Enfin, côté scénario, des incohérences/invraisemblances en pagaille ! En speed sinon je vais pondre 3 pages :
- S02 : Le maton du gang des néo-nazis, tué par Tobias Beecher (
Lee Tergesen), sans que ça n'ait de réelles répercussions et à peine évoqué dans l'épisode suivant. Les gardes continuent pépère à bosser à Oz. Et Beecher qui passe entre les mailles du filet, alors que TLM le déteste à ce moment là
- S01/02/03/04 : Aggie Busmalis (
Tom Mardirosian) creuse TROIS putain de fois un tunnel au sein de sa cellule. La 1ère fois ok, la seconde mouuuui il a trompé la vigilance des gardes ok, mais la troisième : y a t'il des gardes et un directeur de prison avec un cerveau fonctionnel pour gérer Emerald City ?
- S03 : ce filou de Ryan O'Reilly empoisonne les gourdes des adversaires de son frère Cyril O'Reilly (
Scott William Winters) pour le faire gagner lors du tournoi de boxe. Et ça n'alerte aucun des prisonniers cette répétition du favori baraqué qui en plein match et toujours après avoir bu se fait rétamer la tronche par un Cyril jusqu'ici parti pour une défaite cuisante ? Way too big. Puis c'est Ryan quoi, ils le connaissent depuis avec ses méthodes de gangster...
- S03 : Le Dr Gloria Nathan (
Lauren Vélez) et son mari buté par Cyril sous les ordres de Ryan. Dr Nathan qui se fait violer, et Ryan qui bute le coupable qui bien sûr se retrouve à Oz. Et la meuf revient y bosser après un congé qu'il me semblait judicieux de rendre définitif pour.. finalement tomber amoureuse de Ryan ? C'est sensé être une médecin, je crois que dans son parcours théorique, elle a abordé en formation et en pratique le transfert amoureux et ses variantes, et qu'elle a moyen de se trouver de meilleurs mecs en dehors d'Emerald City (ouais, ça vaut aussi pour sa romance à deux balles avec Tim McManus (
Terry Kinney))
- Ça rejoint les tunnels de Busmalis : les inspections surprises des cellules. Si dans la S01, on voit justement ce type d'évènements plusieurs fois, après, pouf : c'est rarissime. C'est ainsi que magiquement, armes blanches, arme de poing, téléphone, came et ainsi de suite parviennent à rester bien au chaud dans ces foyers de substitution. Et le trafic de drogues de proliférer. Une prison Haute Sécurité, vraiment ?
- Etc.
Et le casting (souvent de la bombe de ce côté là), parfois sous-exploité car beaucoup trop de personnages introduits tout du long avec leurs histoires par moment vite expédiées/qui arrivent comme un cheveux sur la soupe.
Ce qui m'a plu :
Comme évoqué ci-dessus : le casting. Pour celles et ceux qui en sont encore à faire la distinction entre acteurs de cinéma et de série, je pense qu'Oz posait les bases d'une fluidité entre les deux univers. Presque tous sont excellents mais je vais essayer d'écrémer :
- La raison principale pour laquelle je voulais voir Oz : Augustus, incarné par Harold Perrineau Jr. Souvent théâtral (surtout dans les phases de dialogues destinés au 3ème mur), mais aussi plus subtil quand il rentre dans la peau d'Augustus. Le dosage est excellent, et son personnage est le seul à être vraiment attachant, dans le sens où sa rédemption est crédible et son attitude est souvent droite. On a plutôt envie d'être dans sa peau que celle de n'importe quel autre prisonnier. Et c'est un acteur que j'aimais déjà beaucoup donc pas déçue ici
- J. K. Simmons, dans un registre assez différent, bien moins théâtral, dans la peau d'un suprémaciste blanc qu'on a envie d'envoyer sur la chaise environs tout le temps. Il donne énormément de puissance à la série en incarnant un antagoniste viscéralement détestable en étant d'un naturel saisissant et en devenant une figure (physique et morale) parfaite du leader du gang des néo-nazis : pas très fin mais loin d'être con. Il est immense ici, un rôle assez peu évident je pense à porter d'ailleurs
- dans le registre théâtral, j'invoque aussi Dean Winters dans le rôle de Ryan O'Reilly. Sorte de stéréotype du voyou qui tire les ficelles dans l'ombre. Le personnage fait partie des rares qu'on suit assez longtemps pour apprecier ses développements. L'introduction de l'arc Cyril avec sa venue à Oz vient cimenter ce pacte avec le téléspectateur : Ryan est aussi charismatique que versatile, et on attend à chaque fois ses manœuvres de gros pourri. Cyril a lui un jeu plus primaire en tant que personne atteinte d'un handicap mental, mais je le trouve plutôt crédible dans sa partie. Il rejoint le clan restreint des personnages (un peu) attachants, surtout quand on constate combien son frère l'exploite, malgré un amour fraternel puissant. Gros atout d'ailleurs d'avoir deux frères acteurs avec autant de ressemblance et en même temps bien distincts
- Simon Abedisi incarné par Adewale Akinnuoye-Agbaje. Une vraie enflure, un caïd dont le potentiel maléfique est assez tôt posé, et perpétuel, sauf si on regarde le bref épisode gouroutage le faisant brièvement bifurquer sur le chemin de la rédemption, mais c'est pour mieux sauter dans le banditisme gras qui le caractérisait.
- enfin, du côté du personnel de la prison, je retiens surtout sœur Peter-Marie incarnée par Rita Moreno. Très bon élément du casting, elle offre à son personnage de psy/bonne-soeur énormément de crédibilité. Je pense par exemple à la manière dont Chris Keller (
Christopher Meloni), fait vaciller sa foi en la séduisant et qu'elle joue ses tourments en distillant ça et là des micro-expressions et soupirs discrets, ou encore quand elle s'oppose au directeur Leo Glynn (
Ernie Hudson) et part manifester contre l'exécution d'un détenu, risquant de perdre son job à cette occasion. Un personnage là encore assez cohérent tout du long et surtout bien campé
Concernant le scénario, malgré un paquet d'invraisemblances, la violence de cette prison Haute Sécurité est filmée avec un certain réalisme, au sens où ces effusions ne sont pas altérées par une pudeur morale (très en vogue aux USA avant Oz) et au contraire témoignent de la dureté des conditions de vie au sein de ce genre de pénitencier. D'ailleurs, la série est principalement connue pour avoir été le passage obligé permettant à celles qui l'ont suivi d'exister sous cette forme et donc ouvert la voie à une esthétique crue et sanguinolente, et parfois à la limite du porno (ici ce ne sont presque que des corps masculins que la caméra captent, je crois n'avoir vu aucune série atteindre ce niveau d'obscénité).
Malgré un manichéisme exacerbé souvent, et la lourdeur des monologues, ceux-ci offrent aussi un espace de réflexion sur la société américaine mais aussi diverses de nos sociétés à travers tous les âges. Oz interroge notre façon d'appréhender le crime et de sanctionner ses auteurs, et en même temps elle ne se fait jamais juge, en laissant au spectateur le choix de définir sa propre morale (même si on est bien sûr largement influencés par la mise en scène)
Et même si leurs histoires sont souvent peu crédibles, j'ai aimé suivre l'évolution des relations (amoureuses, amicales, fraternelles, haineuses...) entre Tobias Beecher/Chris Keller, Tobias Beecher/Vernon Schillinger, Ryan O'Reilly/Gloria Nathan, Ryan O'Reilly/Cyril O'Reilly, Kareem Saïd (
Eamonn Walker) et un peu TLM, etc.
Pour conclure, je découvre la série après celles qu'elle a vu naître, forte de son aspect précurseur et d'un succès d'estime et d'audience. De
Soprano à
GoT, on doit beaucoup à Oz. Étonnée d'ailleurs que seul Eddie Falco n'ai atterri dans le sérail Soprano vu les ponts entre les deux. Et joli clin d'oeil en saison 4 avec l'apparition de Tony Jr Soprano en tant que candidat d'un jeu TV.
Mais je trouve le show vraiment trop daté, la série n'a pas bien survécu au temps. Intéressante à découvrir de nos jours si on aime le format série mais certainement moins percutante qu'à l'époque de sa sortie.