
alain delon x bertrand blier.
j’aimerais dire no women were harmed during the making of this film mais bon, y a quand même un bon quota de baffes gratuites et toujours sans conséquences. il y a le folklore blier, mais ça me fait toujours m’interroger sur l’ampleur de la banalité des baffes domestiques dans les foyers. bref.
c’est vraiment un film né au fouquets. delon, toujours immense star mais ça commence à ralentir et ses derniers films sont pas géniaux et marchent moins bien, il s’enferme dans son système et ça sent le renfermé. il va chercher l’auteur vedette du moment et lui fait une offre artistique et financière que ce dernier ne peut pas refuser. le deuxième producteur, alain sarde, impose la star féminine du moment - nathalie baye - et on se retrouve donc avec une affiche en or, une volonté collective d’aller vite, une certitude de financement, beaucoup d’argent, et une promesse d’accueil événementiel.
il manque à tout ça, vous l’aurez remarqué, une idée.
pas grave, blier est connu pour écrire au fur et à mesure, poser une situation et se laisser porter par l’histoire.
la situation est un peu laborieuse. il y a l’idée du contre emploi total pour delon. il est garagiste, déprimé, pas flamboyant, alcoolique. il faut une histoire d’amour puisque le lead féminin a été embauché. et il assume son manque d’inspiration - littéralement la première réplique du film c’est delon qui parle tout seul en disant « un type seul dans un wagon de train. qu’est ce qui pourrait lui arriver ? bah j’en sais rien, moi. ».
cette idée des personnages qui commentent en direct leur histoire et les péripéties reste l’idée la plus forte du film, et ça fonctionne dans à peu près chaque situation. c’est du pur blier, c’est riche et troublant, c’est assez génial.
pour le reste, donc, il invente au fur et à mesure, sans trop savoir quoi faire et où aller, et ça se voit. il tire massivement à la ligne. comme les artistes à leur peak, il semble persuadé que tout ce qui sort de son cerveau est génial et mérité d’être sorti, du coup y a des trucs franchement poussifs qu’il laisse tel quel, l’idée pas géniale d’un mardi matin qui se transforme en scène et reste jusqu’au bout mais qui n’en méritait pas tant. du fan service pur et dur avec des répliques « à la blier » franchement ostentatoires et plantées là.
mais le coeur du poulet c’est donc qu’il n’a rien de très fort à raconter ou à dire. alors il se sert du surréalisme comme bonne excuse pour avoir des morceaux de n’importe quoi qui occupent 15 minutes. il tire sans fin des situations pas géniales. c’est l’ironie du milieu - ce mauvais scénario pas inspiré qui s’est fait avec argent et honneur alors que, 15 ans plus tard, il n’arrivait plus à monter des trucs sur lesquels il bossait des mois et adorait vraiment. mais en l’état, ça a eu le césar du meilleur scénario, et lui-même reconnaissait que ce dernier était mauvais et pas inspiré.
la mise en scène est à l'avenant, assez dégueu comme dans les années 80 - sans l'élégance et la beauté dont il était capable. là encore, il revendiquait de n'avoir aucune idée de comment filmer avant d'arriver sur place - et là encore, ça donnait des trucs sublimes quand il était inspiré mais il ne l'était pas ça donne rien, quoi.
reste son identité de cinéma, forte et unique. il y a clairement des moments de grâce, des idées stimulantes, des dialogues puissants. la chute est très bien. la directrice de casting a également tout donné : dans les petits rôles on a des bébés vincent lindon, jean réno, bernard farcy, darroussin, gerard darmon…
et delon, donc. césar du meilleur acteur. je trouve la greffe poussive. d’un côté, il commence à vieillir, il est d’une puissance folle mais ça sent la performance quand même, la volonté un peu chiante du contre-emploi, et le surjeu des sourcils est un problème. ça reste un rôle marquant, une belle création de cinéma, et même si rien de tout ça n’est très naturel, l’intégration dans le cinéma de blier reste marquante.
mais bon, déjà dans ma grande période blier je n’aimais pas trop et c’était dans mon bottom 3, impression vraiment confirmée, c’est un ratage - mais un ratage intéressant parce que tellement représentatif des dynamiques commerciales et de hype au cinéma.