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MessagePosté: 09 Fév 2024, 10:57 
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Chaque année quand je suis au Festival de Clermont-Ferrand, je vais voir un long métrage qui passe dans un ciné local. Cette année c'est tombé sur Green Border. J'ai failli ne pas y aller tant ça ne me disait rien, réalisatrice dont je crois n'avoir vu aucun film et qui pour moi est vraiment sans intérêt avec sa carrière de faiseuse de daubes à Hollywood et un film de quasiment 2h40 je craignais l'indigestion de ma truffade.

Et bien j'aurais mieux fait d'écouter mon instinct. Ca faisait longtemps que je n'avais pas détesté un film comme ça. Pour résumer le film se concentre sur le parcours d'une famille de migrants à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne. Il s'y passe une espèce d'affrontement entre les deux pays dont les armes sont les migrants. Les biélorusses (en bons toutous de Poutine) encouragent l'accueil des migrants pour mieux les refiler à la Pologne (et donc à l'Union Européenne) comme des cadeaux empoisonnés. La Pologne en retour n'est pas en reste puisqu'elle passe son temps à renvoyer lesdits migrants en Biélorussie. Tout ça est absolument immonde et évidemment totalement scandaleux, bafouant les droits humains les plus simples.

La première heure se déploie presque comme un survival, une famille syrienne accompagnée d'une femme afghane qui arrive toute innocente, telle des touristes, en pensant pouvoir rejoindre un proche en Suède se retrouve brutalement arrêtée et envoyée en Pologne par dessous des barbelés. Perdus au milieu d'une forêt glaciale avec des enfants en bas âge sans savoir où ils sont, leur calvaire commence. C'est vraiment le prototype du film où tout est à sa place. Tout est très très grossièrement à sa place avec un côté presque torture porn indécent. Les militaires sont tous plus immondes les uns que les autres dans une caricature parfois risible (le mec qui vide la bouteille d'eau devant la famille assoiffée...).

Puis après une heure de film on bascule, parce que la réalisatrice veut nous raconter le conflit avec une certaine distance, donc on va aller du côté des militaires, puis un peu plus loin du côté des associations humanitaires qui aident les migrants, puis un peu plus loin on va changer de migrants et en suivre d'autres (dont une scène de malaise absolue entre des jeunes africains sénégalais et des jeunes polonais qui chantent du Youssoupha dnas une grande maison bourgeoise). J'ai l'impression que le film part dans tous les sens et en voulant faire quelque chose d'humaniste universel se perd totalement dans une construction qui a bien du mal à garder le cap.

Mais peu à peu un personnage principal va se dessiner et c'est sans doute là que le film est le plus maladroit. Une psychologue, récemment veuve, qui assiste à une tragédie (scène d'ailleurs affreuse de pathos et surtout totalement superflue) décide de s'impliquer dans une association et va se transformer en héroïne des causes perdues. On oublie alors totalement la famille du début (que l'on retrouvera brièvement à la fin histoire de boucler la boucle) au profit de l'arc de cette femme seule qui retrouve une nouvelle famille avec cette association (affreux personnages secondaires d'ailleurs où le film croit une bonne idée d'insérer de l'humour) et retrouve presque un sens à sa vie... En parallèle un des gardes frontières, traumatisé par son travail décide mollement de s'y rebeller.

Il faut quand même oser se planter à ce point, mépriser à ce point ceux que l'on prétendait vouloir défendre. Elle ne s'intéresse pas vraiment à ses personnages de migrants, sympathiques et émouvants mais dont on ne saura quasiment rien, qui ne sont que des figures un peu archétypales. Les deux personnages les plus écrits du film sont bien les personnages blancs. C'est vraiment édifiant. Si on rajoute à ça des moments un peu de tension où l'on joue avec un suspens un peu dégueu (tiens qui se cache sous cette couverture ?), ou des purs moments de caricature juste gratos (la famille à un moment est assise sur un trottoir, un groupe de jeunes passe et les insulte copieusement, pourquoi ?) on est vraiment face à un cinéma terriblement bien-pensant, bien confortable, bien lénifiant. Tout ce que je déteste.

Il y a une belle image (le mari qui fait passer sa femme par dessus un ruisseau, la serre brièvement dans ses bras) et une idée intéressante juste éffleurée à la fin (la différence de traitement entre les migrants ukrainiens acceuillis en grande pompe et les migrants africains ou du Moyen-Orient, traité comme des animaux) mais on est face à un très mauvais film (Grand Prix du Jury à Venise, rien que ça).

1/6

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MessagePosté: 09 Fév 2024, 11:03 
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tape dans ses mains sur La Compagnie créole
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Ben merde.. :|
J'avais justement entendu que celui-ci réussissait tout ce que Io Capitano ratait..

Pff pas sur d'y aller du coup.

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"


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MessagePosté: 09 Fév 2024, 11:07 
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Il a ses fans mais la réception est quand même assez mitigé j'ai l'impression. Presque curieux de voir le Garrone pour comparer d'ailleurs (je doute franchement qu'il soit plus mauvais).

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MessagePosté: 09 Fév 2024, 14:09 
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Vaut mieux l'avoir en journal
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J’ai l’impression que Holland vit depuis 40 ans sur son statut de résistante au pouvoir. J’en ai vu trois ou quatre et c’était à chaque fois assez faible (jamais raté mais sans aucune personnalité).

Par contre, dans le cadre de mes recherches sur Palach, elle a gentiment répondu à mes mails et m’a filé le contact du scénariste de sa série TV sur le sujet.

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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MessagePosté: 09 Fév 2024, 17:38 
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Oui, pas terrible du tout ce que j'ai vu d'elle, des énormes gros sabots

mais bon, c'est une femme réalisatrice...


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MessagePosté: 09 Fév 2024, 17:58 
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MessagePosté: 09 Fév 2024, 20:17 
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on lui doit les seuls nudes de di caprio donc gloire à elle, hein.


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MessagePosté: 09 Fév 2024, 21:47 
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Gloire à Jacquot dans ce cas-là.


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MessagePosté: 09 Fév 2024, 22:26 
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ça a escaladé rapidement !

(no pun intended)


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MessagePosté: 09 Fév 2024, 22:45 
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C'est le nouveau point Godwin. Non mais au-delà de la blague, c'est quand même assez dingue à quel point les corps de jeunes femmes et hommes étaient exposés par le cinéma mainstream dans les années 90/2000. J'ai l'impression que c'est bcp le moins le cas aujourd'hui.


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MessagePosté: 09 Fév 2024, 23:10 
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Y a-t-il une actrice française en activité que tu n'as pas vu à poil?

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MessagePosté: 10 Fév 2024, 00:00 
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Bonne question. Leila Bekhti ?


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MessagePosté: 10 Fév 2024, 00:18 
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Là y a ptet un facteur culturel/religieux. Pas sûr que tu l'aurais vu à poil si elle était de la génération d'avant.

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MessagePosté: 28 Fév 2024, 21:46 
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une heure avant de voir la séance, je lisais ce tweet :



et j'y ai repensé pendant le film, et ce ne fut pas à l'avantage de l'oeuvre.
parce qu'on est vraiment dans le tract pur et dur. elle ne s'en cache pas : l'épilogue ukrainien est l'illustration sans valeur ajoutée d'un élément de langage whataboutiste militants. mais enfin, il y a manière de faire, et l'angle ici est celui - sans surprise - de l'humanisme émotionnel, qui se nourrit en caricaturant absolument chaque être humain qui passe devant sa caméra jusqu'au grotesque, afin de pouvoir classer tout le monde dans sa petite case 'bien' ou 'mal'. et devant ce sujet d'une complexité infinie qui met sens dessus dessous absolument tous les pays qui y sont confrontés, un refus revendiqué de reflechir parce que reflechir, c'est déjà sûrement excuser.

j'en suis revenu à la question que je me posais devant batiment 5 : à quoi ça sert ? et puis finalement, ça sert à la même chose que cnews, dont c'est le strict équivalent de gauche. c'est à dire qu'on prend des phénomènes radicaux illustrant votre propos, qu'on décontextualise totalement, on se regroupe entre gens qui pensent la même chose, pour s'adresser exclusivement aux gens qui sont d'accord, on ne donne la parole aux autres que brièvement et pour illustrer à quel point ils sont maléfiques, et voilà.

mais il se trouve que de mon point de vue, la problématique principale posée par l'immigration c'est celle de la cohésion sociale. entre immigrés et autochtones, naturellement, à travers la cohabitation de cultures parfois très différentes. mais aussi au sein des populations locales, avec ce sujet hyper clivant, qui polarise les opinions publiques, fait monter les extrêmes dans des pays autrefois très modérés (la suède, justement...), avec la facilité inhérente de diaboliser les uns et les autres. ça me fait triste, et j'imagine qu'elle se perçoit comme une lanceuse d'alerte ou une objectrice de conscience, mais je trouve que ce genre d'approche fait plus de mal que de bien. c'est formidable d'expliquer qu'il n'y a aucune différence entre les afghans et les suédois car nous sommes tous humains, mais si c'est dans la même scène expliquer que les soldats de ton propre pays, tes voisins, sont des monstres inhumains assoiffés de souffrance et de cruauté - ça n'aide pas.

sinon je suis d'accord avec tout ce que dit art core, et cet aspect m'a également marqué :

Art Core a écrit:
Mais peu à peu un personnage principal va se dessiner et c'est sans doute là que le film est le plus maladroit. Une psychologue, récemment veuve, qui assiste à une tragédie (scène d'ailleurs affreuse de pathos et surtout totalement superflue) décide de s'impliquer dans une association et va se transformer en héroïne des causes perdues. On oublie alors totalement la famille du début (que l'on retrouvera brièvement à la fin histoire de boucler la boucle) au profit de l'arc de cette femme seule qui retrouve une nouvelle famille avec cette association (affreux personnages secondaires d'ailleurs où le film croit une bonne idée d'insérer de l'humour) et retrouve presque un sens à sa vie... En parallèle un des gardes frontières, traumatisé par son travail décide mollement de s'y rebeller.



parce que c'est concrètement la même histoire que les films francais sur les migrants qui débarquent au rythme de 1 par mois depuis 2 ans. outre le manque d'imaginaton et de pluralisme que cet angle unique suppose, ça révèle quand même quelque chose sur la psychologie collective. j'imaginais agnieszka filmer ce personnage féminin, qu'elle trouve manifestement formidable, et je ne pouvais m'empêcher de penser que du coup elle se trouvait elle-même formidable de filmer tout ça. et tout à coup, l'empathie tout à fait louable avec les migrants se transforme en celebration de sa propre supériorité morale. impression effectivement renforcée par l'absence concrète de personnalité des migrants, vraiment réduits à des stéréotypes. bref, du white savorisme pur jus.

et je n'ose imaginer que ce noir et blanc est censé évoquer les heures les plus sombres de notre histoire mais si c'est le cas, beurk.

moi, capitaine est bien plus intelligent et meilleur que ça.


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MessagePosté: 03 Sep 2024, 12:53 
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Gros sabots, le film. S'il faut reconnaitre à Agnieszka Holland un vrai courage politique et une certaine efficacité dans la mise en scène et la direction d'acteurs, l'écriture est tellement appuyée que certaines scènes sont embarrassantes - je doute qu'on chante du rap dans les maisons bourgeoises polonaises qui accueillent des migrants. Dommage qu'elle ne soit pas limitée à l'arc sur le garde-frontière, vrai personnage complexe.

2-3/6

Bordel j'aime ce forum, je ne lis que des critiques dithyrambiques.


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