Tout raté de la première partie de leur filmo...
> Le top : The Big Lebowski / No Country for Old Men (5,5/6) La preuve avec Lebowski, finalement, que le versant purement bouffon de leur filmo donne pas fatalement naissance à leurs films les plus pauvres et paresseux. C'est les deux facettes opposées d'une filmo dans ce qu'elle a de plus abouti : dans la solidité extrême de la mise en scène déjà (la douceur folle toujours entretenue de l'un, les combats muets horrifiques implacables de l'autre), mais aussi dans la profondeur de projets qui vont au-delà de l'exposé impeccable des habituels talents de cadre, de lumière, de rythme, d'enchaînements et de montage. Dans la décontraction mélancolique de Lebowski, dans la fascination pour le mal qui habite No Country (où j'apprécie aussi des choses plus touchantes : j'adore la fin, moi, par exemple), le programme habituel est dépassé par une tonalité plus intime. Le reste (le pack cadre-montage-rythme), je ne vois aucun film où les Coen ne les maîtrisent pas à fond de toute façon, à quelques vulgarités près (certaines scènes de rêves un peu forcées). Le seul horizon véritable de leur cinéma tient donc à la possibilité de voir les films travaillés par autre chose que leur écrasant savoir-faire, dont l'efficacité extrême vérouille tout.
> Les très bien : A Serious Man / Fargo / The Man Who Wasn't There (4,5/6) A Serious Man, qui continue à bien m'habiter, irait squatter le groupe du dessus s'il n'était pas empesé de vrais défauts (un manque d'ampleur, une voisine mal exploitée, etc). Ca reste à ce jour le film le plus précis que j'ai vu d'eux, ainsi que l'un de leur plus fort émotionnellement (même si ca tient à deux trois scènes tout au plus). Les deux autres (souvenirs vagues de Fargo) sont impeccables, mais me laissent tout de même très froids. L'exercice appliqué est évité de justesse par une réelle grâce (scénaristique, esthétique), une envie un peu gratuite mais sincère de faire un film virtuose. Billy bob thornton me semble être le seul à avoir évité l'écueil du film-coen-à-star-qui-fait-son-show.
> Les bien bofs : O'Brother, Where Art Thou ? / Intolérable Cruauté / The Ladykillers (autour de 2-3/6) Les films à acteurs donc... Me souviens de l'enthousiasme à la sortie du premier, qui était quelque chose comme ma première séance "cinéphile". Le recul ne l'aide pas... C'est même pas réellement agréable, tant le cabotinage rend le trio assez insupportable : seule la musique, et une très rare Holly Hunter, désenctroûtent le tout. L'ensemble reste un agglomérat de vignettes appliquées collées ensemble sans grande motivation. Les deux autres me semble carrément catastrophiques : ennuyeux, ennuyés, complètement vides et démotivés, c'est des films qui puent la mort. Ladykillers est par ailleurs le seul film des Coen, parmi ceux que j'ai vu, qui montre des carences sur la maîtrise visuelle qui ne leur a jamais fait défaut ailleurs... Des maladresses, une approche endormie et mortifère, j'ai vraiment cru leur filmo morte à ce moment-là. Le plus triste, dans cela, est que les acteurs de tous ces films ont vraiment un rôle qui leur permet de (re)faire leurs preuves, d'exploiter un registre réellement large, mais le cadre soigné dans lequel on les laisse évoluer en roue libre s'assimile à un tombeau.
Voilà, je trouve que c'est sans doute les "meilleurs professionnels" du cinéma actuel, la maîtrise formelle, et surtout rythmique donc, est évidente et indiscutable. Mais on sent une filmo qui a jamais, ou rarement, été capable de risquer de se brûler une aile - de percer ce parfait carcan formel aussi. Je dis pas que c'est ce qu'il faudrait forcément faire (ce plaisir de la maîtrise constante fait aussi partie de ce qui fait leur "patte", de ce qui fait qu'on les apprécie), mais il faut clairement qu'il trouvent un moyen de vivifier un tel savoir-faire d'une façon ou d'une autre, de le transcender, pour amener les films ailleurs que tournés vers eux-mêmes. La pureté noire que semblait évoquer la BA de True Grit, un lyrisme un peu sec, apparaissait comme une piste, mais visiblement faut que je m'attende à être déçu !
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