Longtemps cet album fut une véritable arlésienne pour les amateurs de Neil Young nés trop tard pour connaître la sortie du disque vinyle. En effet durant de nombreuses années, le chanteur s'est opposé pour d'obscurs raisons connues de lui seul à la sortie de cet album sur le support cd. Ce disque s'étant peu vendu à l'époque, il était très difficile à trouver en bon état en vinyle et seules des mauvaises copies pirates étaient disponibles sur le net. Puis miraculeusement durant les années 2000, Neil Young en parcourant ses archives décide de publier plusieurs albums inédits en cd dont ce On the Beach. Bien lui en a pris car il s'agit à mes yeux d'un des meilleurs albums du Loner.
Revenons quelques instants sur l'historique de cet enregistrement studio. Nous sommes 2 ans après le succès du génial Harvest. Neil Young devient une vedette internationale. Pourtant rien ne va. Neil vient de terminer sur les rotules une tournée qui débouche sur un live Time fade away (toujours inédit en cd) qui est un flop. Neil Young est fatigué, usé par l'alcool et les drogues. Son ami Danny Whitten est mort d'une overdose. Neil Young connaissait sa dépendance à l’héroïne c'est même pour cela qu'il l'avait renvoyé du groupe. Cependant, il continue à lui prêter de l'argent qui sert à Whitten pour se fournir en drogues. Neil se sent responsable de cette mort. Quelques mois plus tard un autre proche Bruce Berry décède à son tour, renforçant Young dans ses idées noires. De plus, il se sépare de sa compagne Carry et son fils est autiste. Neil tombe dans une dépression profonde dont il ne ressortira que 3 ans plus tard.
Ces années de déprime ont cependant débouché sur l'enregistrement de 2 albums majeurs du Loner : Tonight's the night et On the Beach. Ce dernier est publié avant Tonight's mais pourtant enregistré après. Tout cela parce que la maison d'édition de Neil ne sait que faire de ces albums. Ils ont peur que Young s’aliène son public de baba cool avec ces disques dépressifs. Ils n'ont pas tort. Les fans ne suivront pas Neil dans ces projets. Trop noirs. Trop étranges. Pour ma part, j'ai une nette préférence pour On the Beach beaucoup plus abouti, cohérent et maitrisé que Tonight's.
Alors qu'en est il de l'album? On the Beach c'est 8 chansons pour une durée totale de 40 minutes. Il n'y a aucun temps morts, aucune chanson plus faible qu'une autre dans le disque. Les 8 titres s'enchainent à la perfection. Il faut cependant être prévenu. Aucun album précédent et à venir du Loner est aussi dépressif. Le spleen déborde du disque et à vrai dire un jour de moins bien pluvieux si une corde est à proximité il y a des chances que vous l'utilisez. Attention ce disque est spendide mais d'une beauté mortifère.
L'album commence par Walk on qui est la chanson la plus enlevé du disque. Neil Young clôt avec cette chanson le mécontentement qu'avait crée chez Lynyrd Skynyrd la chanson Southern Man. Avec cette chanson presque joyeuse, l'auditeur n'est pas préparé du tout au traumatisme de ce qui va suivre.
See the Sky about to Rain est une ballade déchirante accentuée par l’utilisation de l'orgue Hammond et la pedal steel guitar.
Puis vient Révolution blues inspiré par Charles Manson le gourou assassin. Young y est accompagné de la rythmique du Band et de Crosby.
Arrive ensuite le banjo de Young et For The Turnstiles qui est la respiration du disque. Vampire blues est comme l'indique son tire un blues ou Neil s'attaque au lobby pétrolier.
Vient enfin la pièce maitresse de l'album avec la chanson éponyme. On the beach est un long cri dépressif. Le rythme est lent, lancinant. Les riffs de guitare brillants accentuent tout cela. Peut être le meilleur morceau du Loner.
Motion Pictures est une catharsis pour Young. Il y pense les plaies de sa séparation avec Carry.
Enfin l'album se termine avec Ambulance Blues qui est ballade folk mélancolique de 9 minutes. Neil y parle kidnapping et de son passé. Son solo de guitare est un hommage inspiré au brillant guitariste Bert Jansch.
Enfin la pochette de l'album est certainement la plus belle des disques de Young qui il est vrai est rarement brillant de ce point de vue là.
Bref un must qui se range dans le top 3 des disques de Neil Young. 6/6