Mon cher Jerzy,
Ce que j'écris ci-dessous va te donner des furieuses envies de déconstruction, t'empêcher de dormir la nuit, te faire me voir encore plus minable que tu ne me vois déjà, ou peut-être ne rien provoquer du tout, mais sache qu'il n'y aucune méchanceté, frustration, colère, à ce moment chez moi, et que je fais un constat, qui m'est propre, et qui importe sans doute plus pour moi, de ce qu'il peut m'apprendre sur le monde, que pour toi.
Tu uses, presque tout le temps, et de manière flagrante ici, d'une rhétorique où tout est fait pour boucher tous les trous, pour interdire à l'autre d'avoir un espace, en multipliant raccourcis, présupposés, mensonges, jeux rhétoriques, perches immédiatement dérobées, falsifications pour ramener la pensée de l'autre dans l'ordre de ce qu'on croit qu'elle est afin de mieux la mépriser (exemple : "musique industrielle à quatre accords" qui est réduit à "à quatre accords" au fil du texte), tout au final concourant à empêcher l'autre d'exister (tu écris ça, mais en fait tu penses cela, parce que tu es si ou ça).
Evidemment, avec toute l'audace des manipulateurs, tu me dis sophiste. C'est sans surprise : il ne s'agit pas de penser, ni même de montrer que l'autre a tort, mais à terme de détruire l'autre, ce qu'il est, par une procédure détournée, qui consiste à prétendre que l'on sait ce qui se cache derrière les mots (mais que l'autre, lui, ne sait pas), que l'on sait quelle est la pensée réelle de l'autre, et que l'on va spectaculairement la déplier pour montrer que l'autre ne pense pas ce qu'il croit penser, qu'il pense mal, qu'il pense faux.
Quand tu crois plus haut m'avoir cerné en disant que j'aurais soi-disant abandonné "une certaine forme de philosophie "universitaire"", tu te trompes complètement : ce avec quoi j'ai fini, ce qui m'a rendu physiquement malade, c'est ce type de rhétorique-là (et d'autres formes plus ou moins proches) et rien d'autre. Et aujourd'hui confirme ce fait, parce que le temps a passé, et que ce qui me décevait à l'époque, puis me rendait malade, me laisse aujourd'hui interdit (c'est peut-être la sagesse qui vient ?).
Je sais pertinemment que tu vas déplier mes énoncés et montrer que j'ai tout faux, en particulier sur la destruction sous-jacente de l'autre que tu vas réfuter très habillement, et pire encore, je sais que tu vas parvenir à me faire porter toute la responsabilité de l'état actuel des choses (quel qu'il soit par ailleurs) : je le sais parce que les manipulateurs savent toujours s'en sortir, et à la fin ils gagnent toujours.
Note néanmoins que je ne dis pas que tu es une personnalité manipulatrice : je parle uniquement dans l'ordre du discours. De plus, je peux comprendre : c'est un forum, on peut y déverser des comportements que l'on n'aurait pas ailleurs, et on peut bien se permettre de ne pas être ici des gens biens, voire d'être d'odieux connards.
Par ailleurs, ce que je comprends aujourd'hui, et j'ai bien été bête de ne pas l'avoir vu plus tôt, c'est que tu ne m'as jamais lu, ou en tout cas jamais compris, ou en tout cas jamais eu l'intention de comprendre par-delà ce que tu pouvais déconstruire, et que tu as projeté, comme tu le fais en fait régulièrement sur des choses et d'autres, parce fondamentalement tu ne fais que mettre en permanence les autres et leurs discours à ton service, tout un tas de présupposés qui n'ont aucun rapport avec la réalité, et encore moins avec la réalité de ma pensée, qui n'a de toute façon qu'un intérêt très secondaire pour toi, et que je peux par ailleurs très mal exprimer, en particulier ici. Je suis prêt sur ce point à porter ma croix.
Et oui, je fais état de ma redoutable intuition sur toi mais comme tu passes ton temps à le faire avec moi, je ne vais pas m'en empêcher, pour une fois.
Quant au passage sur Star Wars, il m'a fait rire, mais j'ai été un brin pervers sur le coup : dans la première partie, je t'ai volontairement donné du grain à moudre, en me disant "on parie combien qu'il me reprend sur les conventions et la différence avec le poncif, et sur la nécessité ?", et puis aussi "j'écris vraiment n'importe quoi là". Je pensais que t'étais dans une discussion cool et pas agressivité, et qu'il n'y avait pas une telle méchanceté derrière (il n'y en avait aucune chez moi, j'ai projeté). Je suis désolé de m'être trompé, et je m'excuse de mon intention maligne.
La toute dernière phrase est révélatrice : tu tires, et son caractère lapidaire était un boulevard pour quelqu'un qui fonctionne comme toi, tout un fatras de conclusions sur ma sophistique, ma pensée et ma connerie congénitale, alors que tu ne sais pas ce qu'est une partition, et cette petite chose toute pragmatique fait que ta position, qui te permet d'enchaîner sur cet habile démontage en règle ("là, il se relèvera jamais"), ne repose sur rien du tout et l'invalide.
En croyant démonter un discours, tu as montré que tu savais en créer un. C'est de la pure sophistique, qui n'impressionnera que ceux qu'impressionnent la manipulation du discours.
Le jour où tu sortiras du discours, tu me feras signe. Le fait que tu ne notes même pas ma remarque sur mon expérience me fait penser que tu n'en as aucune envie, que tu es malgré tes dires parfaitement à l'aise dans ton rôle de deconstructeur, et cela conforte tout le reste.
Je vais finir par répondre sur une dernière chose, de manière plus sentimentale parce que je suis un gentil en vrai :
Jerzy Pericolosospore a écrit:
Enfin bon, c'est une interpellation forumique comme il y a de temps à autre. Faut pas en abuser... C'est pas grave. Euh... ça fait "vivre" le forum, je vais dire ça... Selon un autre point de vue, ça le "tue" plutôt... Je suis le premier (peut-être le seul?), après avoir posté mes tartines, à choper des regrets, des angoisses, à me dire: mon dieu mon dieu, quelle horreur je viens d'écrire là, pourquoi j'ai tartiné tout ça? Quel intérêt? N'est-ce pas une somme ahurissante de conneries? Pourquoi cette méchanceté atrabilaire? J'étais pourtant peinard, et tout, et voilà que ça sort comme un prurit... ça va me poursuivre jusque dans mes rêves, comme un sceau d’infamie intime. Et pour sûr, je vais me relever la nuit (cad le jour). C'est terrible.
Je vais prendre pour argent comptant cette déclaration et penser que tu es sincère, et ne pas croire que c'est une autre forme de manipulation.
Hier soir, ta réponse m'a saoulé, j'ai répondu vite fait en oubliant volontairement les 3/4 de ce qui me saoulait - des choses que je pense sont fausses, mais auxquels je n'avais pas envie de répondre parce que :
- je considère que les gens ont le droit de penser autre chose que moi surtout sur des questions aussi complexes, et aussi de se tromper sans que je ressente le besoin urgent de les corriger
- je peux me tromper aussi, et n'ayant pas le temps de vérifier tout ce qu'il me faudrait pour fournir une réponse correcte (et le ratio utilité/temps passé ne me paraît pas le justifier ici), je préfère ne pas faire de réponse. En cela, quand tu dis qu'il s'agissait pour moi hier de "montrer" quoi que se soit, tu te trompes complètement : quand je désire montrer quelque chose, je prends le temps et l'espace de le faire. En deça, c'est tout autre chose, qui ne s'y apparente pas du tout
- je savais que je risquais un énième démontage rhétorique de chaque mot employé, et ca me fatiguait d'avance
Résultat : je me paye le démontage d'un discours qui s'apparente pour moi à "tu peux me passer le sel, s'il-te-plait" (je t'accorde que c'est une proposition qui peut être déconstruite et révéler une tonne d'idéologie, mais tu peux aussi juste me passer le sel).
Mais quand bien même, ce matin j'avais oublié que tu m'avais saoulé, et je ne crois pas en avoir rêvé. A vrai dire, avant de m'endormir, j'ai réfléchi sous la couette à comment résoudre un problème de forme dans un truc que j'écris actuellement (petit plaisir tout à fait personnel, qui n'a pas pour intention secrète de dominer le monde, ni même de renverser l'industrie culturelle).
Tu ne peux vraiment pas faire pareil ?
Et on me rétorquera que je dis régulièrement que les autres ont des goûts de chiottes et autres joyeusetés, mais est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut prendre au sérieux ce genre de déclarations, et sentir qu'on s'attaque par là à sa pensée ou à quoi que se soit qui le fait vivre ? J'ose penser que pour le monde, je suis au moins dans ces cas-là juste un con sur un forum qui dit de la merde.
Sur ce, bisous.