Qui-Gon Jinn a écrit:
22h11
Bon allez qui c'est qui est chou et qui me fait un résumé de la journée sur le Forum ?
"Elle ressemble à un petit gâteau." Marie-Antoinette n’est pas une reine, encore moins une leçon d’histoire, c’est un sucre d’orge, une papillote dorée, une vestale aux boucles relevées en pièce montée. Une cerise négligemment posée sur une prison en chocolat. Un portrait comestible, vivant, sans patine ni plâtre. La table onéreuse confine à l'absurde, le champagne coule à flots, le jasmin éclot dans une tasse, les macarons roses et pistache jalonnent les appartements du roi. Les jeunes filles masquent leur solitude et diluent leur ennui en aiguisant leurs sens. Versailles a des allures de maison en pain d'épices. Attentive au goût, à la couleur, au grain, Sofia Coppola croque un château surprise, Marie-Antoinette enrubannée se laisse dévorer et engloutir par les fines bouches et les regards cupides. Les correspondances amusent et fascinent, l'étiquette et la chronologie sont constamment subverties par la musique et la langue, les cartes sont inversées, les légendes altérées. Bow Wow Wow, The Cure, New Order rivalisent avec Jean-Philippe Rameau, les accents indécis, américains, anglais, français, invitent à une cour dissonante. Marie-Antoinette n’est pas une biographie, encore moins une fresque politique, Sofia Coppola évince la nation, ébauche une révolution en sourdine, sabote l'arrestation, le procès, la guillotine, émiette les après-midi de farniente pour n’en retenir que la lumière déclinante et diffuse. Têtes blondes enlacées dans le Michigan (Virgin Suicides), flâneurs insomniaques à Tokyo (Lost in Translation): où qu’elles soient, les héroïnes captives de Coppola restent d'éternelles étrangères. La détresse de Marie-Antoinette l'Autrichienne, "l’Etrangère" par excellence, a trouvé une parfaite chambre d’écho.
Ce qui est horrible, c'est qu'en écrivant ma question, je savais que je laissais la porte ouverte à ce genre de trucs.