Dans les Inrocks de cette semaine, Sagan le nouveau Diane Kurys se fait violemment démonter
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De Sagan, nous aurions au moins aimé voir transposé à l’écran, faute de mieux (les vies d’écrivains sont rarement romanesques…), le mythe et l’imagerie qui l’accompagne : l’adolescente douée, la vitesse, l’alcool, la drogue, le jeu et tutti quanti… Une bourgeoise, certes, mais libre. Nous eussions rêvé de voir un biopic brillant, léger, enlevé ; retrouver des images fantasmées d’années 1950 et 1960 un peu folles. On espérait un décor et des personnages d’opérette ; du Max Ophuls, peut-être.
Mais dans cette saga Sagan réalisée par Diane Kurys, tout n’est qu’ennui, grisaille et désolation. On se retrouve face à une pauvre production SFP délavée, ras du plancher, où l’image ressemble à une serpillière. Vous croyiez que la vie de Sagan était un rêve ? Que nenni. Que Paris est une fête ? Point du tout. Où est passée la légende dorée ou boueuse ? Vous croyiez que Sagan et sa bande (Bernard Frank et Jacques Chazot) étaient des personnages intelligents, drôles, au désespoir élégant ? Vous vous trompiez. Regardez Lionel Abelanski et Pierre Palmade, qui les incarnent : plats, sans charme, épais, sans esprit, des types qui font (mal) semblant de se biturer aux frais de la princesse Françoise. Même pas drôles. Quant à Sylvie Testud, que nous aimons beaucoup d’habitude, son interprétation de fofolle godiche est complètement à côté de la plaque. Ce dont manque fondamentalement ce Sagan, c’est d’esprit, cette chose pourtant si cinématographique qui fait la comédie depuis toujours, dans tous les cinémas du monde, et qui se trouvait sans doute au cœur de la vie de Sagan.
Car l’esprit, forme d’humour charmant et vachard, peut être une raison de vivre, une raison de s’aimer et de rester ensemble toute une vie.
D’autre part, Sagan était un écrivain. Mais Diane Kurys, comme beaucoup de gens, semble considérer que la littérature est l’art de la formule. D’où cette pénible voix off qui nous gratifie à l’occasion (sans qu’on sache pourquoi) de quelques citations mal choisies de Sagan, suites de consternantes idées reçues sur la vie, l’amour, la mort, la solitude, la littérature, la coiffure… Mais l’écrivain Sagan n’est pas là, pas dans ses bons mots justement, mais dans ses creux, ses moments faibles, dans le mouvement parfois maladroit de la langue, dans ses soi-disant fautes de français, dans ce repli des mots où se dit l’indicible. Sagan, sans charme, sans sexualité (on la voit vivre avec des femmes et épouser des hommes, mais jamais coucher avec qui que ce soit), sans intelligence, sans style, qu’est-ce, sinon une marionnette maquillée comme un carré d’as ?
Et que lit-on sur l'affiche placardée sur toutes les colonnes Morris de Paris?: "Le film de Kurys est une magistrale leçon de style... on a réellement la gorge serrée" Les Inrocks
Bravo la promo, bravo les distributeurs.