Toute la filmo ici :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Filmograph ... e_ArbuckleOn doit avoisiner les 150 courts, dont il est presque toujours le réalisateur sur la période 1914-1920.
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Trois courts vus à la Rochelle...
Fatty garçon boucher (
The Butcher Boy, 1917, 24 mn)
Fatty est boucher dans un magasin d’alimentation. Amoureux d’Amanda, caissière et fille du patron, il a pour rival Slim, le premier vendeur. Devant les querelles incessantes de ses deux employés et les dégâts provoqués dans son magasin, M. Grognon, le père d’Amanda, envoie cette dernière en pension…Fatty à la clinique (
Good Night, Nurse , 1918, 20mn)
Lassée d’avoir un mari alcoolique et suite à une annonce publicitaire dans un journal, la femme de Fatty traîne ce dernier dans une clinique pour s’y faire soigner afin qu’il soit définitivement débarrassé du démon de la boisson…Fatty rival de Picratt (
Love, 1919, 23 mn)
Fatty et Al Clove se rendent chez leur voisin fermier. Fatty est follement amoureux de Winnie, sa fille, et Al est porteur d’un message de son père qui propose au fermier de le marier à sa fille en échange de la moitié de ses terres. Le fermier n’hésite pas une seconde…La filmo qui fait peur : un personnage grossier, vulgaire, spécialisé dans la tarte à la crème, tout cela sentait le comique paresseux et pas drôle.
Plutôt bonne surprise, donc, de découvrir un burlesque certes outrancier, mais étonnamment fin dans le détail. La grossièreté contient toujours, dans ses replis, milles petites brodures. Un exemple (du troisième court) : cette fille qui, promise à un mariage dont elle ne veut pas, rentre dans sa chambre et fond en pleurs lyriques, s’appuyant sur son bureau. Mais son coude rate la table, et elle doit s'y reprendre à deux fois pour pouvoir commencer à pleurer : ça dure une mini-seconde, c'est subliminal, caché dans un bout du plan. Mais ça change tout, car ce qu’on nous montre alors ici, ce n’est pas seulement l'outrance ridicule de la réaction de la jeune femme, mais aussi quelqu’un qui vit sa situation de manière romanesque, qui joue à la fille en détresse, qui se complait dans ce rôle. En un mini-geste.
Tout le comique de Fatty fonctionne comme cela, notamment grâce à une bande d’acteurs épatants (dont le tout jeune Keaton, qu’on découvre hors de ses rôles impassibles, et qui se révèle excellent comédien, le meilleur de tous). Ce millimétrage est d’autant plus frappant qu’il vient orner un rythme sauvage (grosses poussées soudaines de cascades-catastrophe, chaos soudain d’une pièce où tout part en vrille, saturation gloutonne de gags), et surtout un magma de base infiniment grossier : le cinéma de Fatty est violent, sale, pulsionnel, travesti - en un mot, régressif. L’acteur Fatty, dont l’idée même n’est pas très engageante (= vous allez voir un gros tas vulgaire) est étonnamment gracieux sur ce terrain là, balançant nonchalamment son couteau de boucher, poussant de son bide quelqu’un qui l’emmerde, dansant presque dans sa grossièreté.
Le plaisir de la découverte exagère peut-être la réelle qualité des films, à la structure assez désarçonnante (on change de situation, d’enjeu, de décor, ou de rythme plusieurs fois par film). Mais c’est en tout cas à découvrir, ne serait-ce que pour cette sensation de voir là une sorte d’origine utérine du burlesque, encore pris dans la mélasse de ses pulsions les plus basses et infantiles, mais déjà pleinement maître de son art.