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MessagePosté: 02 Mar 2010, 16:10 
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Claude Lelouch Président d’honneur de l’ARP (Société civile des auteurs, réalisateurs et producteurs), Radu Mihaileanu président et le conseil d’administration de l’ARP (1)

Lors du vote en première lecture par le Sénat de la loi sur la réforme des collectivités territoriales, un article s’y est glissé de manière quelque peu sournoise, qui fait planer une grande inquiétude sur le secteur culturel. Cet article (2) laisse entendre que dans l’année qui vient, une loi devra éclaircir les compétences exclusives des collectivités, leur marge de manœuvre et encadrer plus clairement leur financement. Il semblerait, à la lecture de ce texte, que cette future loi ne contraigne les collectivités territoriales à n’exercer que leurs compétences directes. Elles se verraient donc interdire leur intervention dans le domaine de la culture ou même dans celui du sport.

Nous employons sciemment le conditionnel car il faut bien admettre que nous sommes loin d’une loi normative, claire et intelligible telle que souhaitée par le Conseil constitutionnel et, qu’à la lecture des débats, les sénateurs eux-mêmes ne comprennent pas réellement les termes et la portée de ce texte. Nous ferons grâce au lecteur de l’intégralité de cet article et nous nous limiterons à l’inviter à lire les débats parlementaires qui ont eu lieu. Il comprendra que pour nous cinéastes, cette lecture pourrait être une source d’inspiration pour une comédie absurde.

Restons sérieux, car au-delà de cette boutade, une épée de Damoclès oscille dangereusement au-dessus des modes de financement du secteur culturel. Ce sentiment s’assortit d’une crainte d’un néojacobinisme néfaste aux arts et à la culture, laissant à la traîne l’ensemble des territoires de la République. Avec l’adoption d’une telle loi, la culture se voudra parisienne et le reste de la France devra suivre.

Ce texte démontre à n’en pas douter une certaine volonté de réduire la capacité d’agir des collectivités territoriales, de freiner leurs politiques volontaristes dans des domaines, certes non obligatoires, mais dont l’utilité ne devrait plus être à démontrer depuis que Malraux a initié la décentralisation culturelle il y a maintenant cinquante ans. Sans doute est-ce alors le moment pour nous cinéastes, auteurs, réalisateurs, producteurs, de rappeler l’importance et la légitimité des aides des collectivités pour la création de nos œuvres et pour le rayonnement culturel des régions. Elles se sont en effet imposées au fil des années comme un des piliers de la diversité culturelle, et ont démontré ainsi leur utilité.

L’alliance du cinéma et des régions a d’abord permis la valorisation de la beauté de ces territoires, de leur patrimoine, leur offrant ainsi une véritable exposition internationale. Il y a ensuite, et il ne faut pas s’en cacher, une nécessité économique. L’arrivée des aides régionales à la production cinématographique a notamment permis d’endiguer le fléau dramatique de la délocalisation des tournages qui mettait en péril les industries techniques de ce secteur, et avec elles, l’ensemble des emplois qui y sont associés. Trop peu connues du grand public, les aides des collectivités territoriales au cinéma ont permis à certains films d’exister, à d’autres de pouvoir se faire avec la qualité nécessaire et attendue par le public. Nous ne pourrions citer l’intégralité des œuvres aidées, mais elles ont été essentielles pour Séraphine, dont nous savons combien le coût des costumes, à titre d’exemple, constitue une charge très importante, elles ont certainement permis à Jacques Audiard de donner à sa prison tous les aspects de la réalité, participant ainsi à la force réaliste du film Un prophète, mais c’est encore Welcome de Philippe Lioret, la Journée de la jupe de Jean-Paul Lilienfeld, qui ont bénéficié de ces aides et ont participé à la création d’œuvres dont nous pouvons nous enorgueillir.

Les aides régionales sont également indispensables pour la diffusion des œuvres : en soutenant les festivals, en aidant les cinémas dans leur développement d’activité culturelle, elles permettent l’exposition d’œuvres plus fragiles comme les documentaires ou les courts métrages.

Du festival de Cannes au festival Premiers Plans d’Angers, du Fipa de Biarritz au festival de Luchon pour la création audiovisuelle, du festival de Clermont-Ferrand à Coté courts de Pantin, ce sont autant d’événements dont l’existence serait fragilisée si le soutien des collectivités qui les accueillent venait à leur manquer. Enfin, la réussite de leur action pédagogique dans les dispositifs d’éducation à l’image n’est plus à démontrer. Des dizaines de milliers de lycéens et de collégiens adhèrent chaque année à ces dispositifs qui allient de manière si singulière une jolie approche de la culture et une mission éducative. A l’heure ou règnent des inquiétudes sans doutes légitimes sur les violences en milieu scolaire, le cinéma ne reste-t-il pas le meilleur moyen pour offrir des débats sereins sur nos sociétés ?

La mesure envisagée porterait atteinte au mouvement de décentralisation des savoirs et des compétences en matière de création audiovisuelle et cinématographique qui a permis avec le soutien du CNC de créer des pôles régionaux d’éducation artistique et de formation au cinéma et à l’audiovisuel dans le cadre des conventions de développement cinématographique. Pour toutes ces raisons, nous demandons de manière urgente des éclaircissements sur la portée de ce texte lors des futurs débats devant l’Assemblée nationale. Nous demandons surtout d’avoir l’assurance de la pérennité de ces aides fondamentales pour le cinéma en particulier et la culture en général. Cette question dépasse largement toutes les lignes de clivages, car nous le savons : la culture n’est pas seulement un moyen d’épanouissement personnel, elle permet aussi de se forger un regard critique sur le monde et, au-delà, participe à l’émancipation citoyenne des individus.

Nous ne voulons pas croire que ces principes puissent être remis en cause dans une quelconque législation, nous ne laisserons pas, sous aucune manière, planer la moindre menace sur la culture.

(1) Membres du conseil d’administration de l’ARP : Christophe Barratier, Jean-Jacques Beineix, Djamel Bensalah, Patrick Braoudé, Christian Carion, Dominique Crèvecœur, Lionel Delplanque, Dante Desarthe, Evelyne Dress, Michel Ferry, Costa Gavras, Michel Hazanavicius, Pierre Jolivet, Gérard Krawczyk, Jeanne Labrune, Philippe Lioret, Philipe Muyl, Artus de Penguern, Jean-Paul Salomé, Coline Serreau, Abderrahmane Sissako et Cécile Télerman.

(2) Voir la pétition «La culture en danger», initiée par Claude Bartolone et Jack Ralite, qui a rassemblé 29 000 signatures en un mois.


la liste des signataires et les noms en haut d'article fonctionnent contre l'article et donnent envie de fermer les robinets à subventions, mais bon... c'est quand même la merde...

(pareil pour la liste des films brandis en étendard, hein, Séraphine, Welcome, La journée de la jupe.... ok...)

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MessagePosté: 02 Mar 2010, 16:52 
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Inscription: 04 Juil 2005, 16:48
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Localisation: in the forest of the Iroquois
Zad, ou comment l'absence de concession peut te tirer une balle dans le pied.

Ils prennent ces exemples pour parler au "grand public" ainsi qu'aux pouvoirs publics. Donc on prend ce qui a raflé du César, qui a fait des entrées, de l'audience etc.

Sinon, on en avait discuté avec le syndicat, et en effet c'est une possibilité à court terme. Les régions sont absolument fauchées et la culture n'est pas une dépense "obligatoire". Une clarification est clairement nécessaire. Sinon, c'est tout simplement la mort du court métrage français. Et encore plus de galère en long métrage.


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MessagePosté: 16 Mar 2010, 12:28 
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Inscription: 04 Juil 2005, 17:02
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Localisation: en cours...
http://www.elunet.org/spip.php?article13590

Citation:
Ce ne seront plus ni les régions ni les départements qui financeront les projets culturels, puisque l’article 35 du projet de loi de la réforme territoriale vise à supprimer la clause générale de compétence. Cet article "prévoit que "la région et le département exercent, en principe exclusivement, les compétences qui leur sont attribuées par la loi", donc pas la culture. Pour J. Ralite "l’article 35 pose une question simple, mais dramatique : qui va financer les projets culturels ?"

L’article 35 du projet de loi de réforme des collectivités territoriales nous oblige à poser cette question simple, mais dramatique : qui financera les projets culturels ?

En effet, même s’il n’y paraît peut-être pas, ce soir, en l’absence du ministre de la culture, si le vote intervient dans le sens souhaité par la commission et le Gouvernement, le budget de la culture de l’année prochaine dans sa structure et ses montants actuels n’existera plus !

L’État diminue ses financements. Les collectivités territoriales sont empêchées de se substituer à lui, et même contraintes de réduire leur propre engagement. Ce soir, mes chers collègues, nous discutons de la totalité du budget national de la culture ! Et ceux qui voteront l’article 35 se prononceront pour la diminution de ces crédits. C’est la première fois depuis 1959 ; je pourrais remonter plus haut, mais je me limiterai à la Ve République !

Il s’agit ce soir d’un vote capital, masqué par une discussion technocratique qui fragmente sans cesse les enjeux. Telle est d’ailleurs la technique habituelle du Gouvernement, qui occulte ainsi la limpidité de ses mauvais coups !

Ce ne seront plus ni les régions ni les départements qui financeront les projets culturels, puisque l’article 35 vise à supprimer la clause générale de compétence. Or, c’est cette dernière, et elle seule, qui permet aux collectivités territoriales de consacrer une partie de leur budget à l’action culturelle.

En effet – je ne vous apprends rien, mes chers collègues, mais il faut tout de même le signaler –, la culture ne fait partie des compétences obligatoires d’aucune collectivité territoriale !

Cet article précise également qu’une compétence attribuée à une collectivité ne peut être exercée par une autre. Or, compartimenter de façon trop précise les compétences en matière de culture pourrait conduire à un assèchement de la vie culturelle dans les territoires, alors que celle-ci s’est d’abord construite grâce au volontariat des collectivités et à un consensus entre celles-ci, État compris, qui ne reposait pas sur l’interdiction de faire, mais sur la liberté d’entreprendre, ensemble !

Je tiens ici le livre de 526 pages édité par le comité d’histoire du ministère de la culture à l’occasion des cinquante ans de cette institution (M. Jack Ralite brandit un ouvrage.), qui a été présenté ici même, au Sénat, en présence d’une foule nombreuse et d’opinions variées. C’est là une gloire, certes modeste, mais bien réelle, d’une histoire à laquelle vous portez un grand coup si l’article 35 est voté !

Je le répète, il ne s’agit pas ce soir d’un petit vote technique, mais d’un grand vote politique, contre la culture et la création !

Un délai de douze mois est fixé pour que soient réparties les compétences entre les collectivités. Je m’interroge : pourquoi attendre aussi longtemps ? Le présent projet de loi n’était-il pas finalement le plus à même de définir ces compétences ?

Enfin, comme si cela ne suffisait pas, les financements croisés entre les collectivités se trouvent limités. C’est ignorer, ou alors, ce qui est bien plus grave encore, négliger que les projets culturels sont en majorité financés à la fois par les départements, les régions et les communes, et que l’État y participe souvent !

Réduire le financement culturel à une seule collectivité constitue une véritable aberration, qui mènera à la disparition de projets culturels locaux d’importance et de qualité. Dans le domaine artistique et culturel, de très nombreuses structures, festivals et compagnies, dont l’économie générale demeure plutôt fragile, bénéficient de financements croisés.

Qui peut apprécier l’intérêt de leur démarche, sinon les collectivités qui les soutiennent ? Le champ culturel est par nature divers, en termes de domaines et de disciplines, mais aussi du point de vue de sa structuration économique et territoriale. Une partie de son économie repose sur les efforts constants et conjugués des collectivités et sur l’approfondissement de stratégies de mutualisation et de solidarité entre organismes artistiques et culturels.

Ainsi, face aux inquiétudes réelles et fondées du monde de la culture, le ministre en charge de ce domaine, qui est absent ce soir – c’est scandaleux, je n’hésite pas à le dire ! – se déclare « attentif » à cette question et affirme « ne pas souhaiter renoncer à la participation de tous les échelons locaux au financement de la culture ».

Et le Président de la République de nous rassurer, ou du moins de tenter de le faire, lors de ses vœux au monde de la culture, le 7 janvier 2010, en déclarant qu’il ne toucherait pas aux compétences culturelles des collectivités. Lors d’une réunion récente au Sénat, son directeur de cabinet a affirmé de même vouloir nous « rassurer » au motif qu’il serait « attentif » à ce problème. Toutefois, le vote de ce soir ne sera ni attentif ni rassurant : il sera meurtrier !

On nous laisse entendre que la culture pourrait faire partie de ces exceptions prévues par l’article 35 et demeurer une compétence partagée. Ces déclarations ne parviennent pourtant pas à dissiper nos inquiétudes. Le Gouvernement nous a trop souvent montré que ses promesses ne le liaient guère ; nous n’aurons donc de cesse de nous battre tant que celles-ci n’auront pas été suivies d’effet, car cet article du projet de loi fragilise la tenue et le développement de la culture française.

Je rappellerai tout de même quelques éléments, car ils sont importants : derrière ce projet de loi, y a la RGPP, dont on ne parle pas, ainsi que l’article 52 du projet de loi de finances pour 2010 relatif à la dévolution du patrimoine, un frère siamois du présent article 35. Avec ces deux dispositions, hypocritement, sans en avoir l’air, on casse les projets culturels ! (Marques de lassitude sur les travées de l’UMP.)

Tout à l’heure, j’ai entendu le Gouvernement et la commission affirmer qu’il était tout à fait normal que les préfets exercent un pouvoir de nomination. (M. le président de la commission des lois se récrie.) Après tout, le Président de la République désigne bien le président de France Télévisions ! (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG.) Ma parole, ils veulent nommer tous les responsables !

C’est que je parle du Président de la République sur ce ton qui vous gêne, monsieur le président ?

Je regrette que nous consacrions si peu de temps à la culture lors de l’examen d’un projet de loi où, certes, elle ne devrait pas figurer, et à propos duquel on nous empêche d’en discuter !

Pour conclure, je n’évoquerai ni Jean Vilar ni les autres hommes de gauche qui ont tant fait pour la culture, et pour la nation tout entière, mais Jacques Duhamel. Celui-ci, lors d’une intervention à l’Assemblée nationale, le 28 mai 1971, affirmait : « Il s’agit maintenant pour l’État et les collectivités locales d’agir de manière harmonieuse et complémentaire, sans esprit de concurrence ou de méfiance. »

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