Afgrunden en VO,
The Abyss à l'international.
Une jeune fille des villes va passer l'été chez les parents de son fiancé. Un jour, un cirque ambulant croise le chemin de la maison familiale : elle tombe folle amoureuse de l'un des artistes, et abandonne tout pour le suivre.Le muet danois, c'est quand même l'alliance d'une forme classe, précise, mesurée, presque aristocrate, et des sujets les plus improbables du monde. J'anachronise peut-être, mais on dirait vraiment le fantasme d'une grande bourgeoise, avec le saltimbanque ténébreux qui vient l'enlever dans sa chambre en montant par une échelle, elle qui change de vie en 5 secondes chrono... L'indéniable élégance de l'ensemble (l'épure raffinée, la sobriété de jeu, le sérieux) rend vraisemblables des situations absurdes.
Asta Nielsen, puisque ce film est surtout son évènement à elle, a effectivement un truc, une capacité à jouer lyrique et tragique sans rouler de grands yeux. A travers un scénar médiocre à 36 allers-retours, l'épuisement progressif du personnage et ses traits usés constituent encore la ligne narrative la plus efficace : l'actrice est clairement pas pour rien dans la réussite du film. Après, concernant la fameuse scène de danse à
l'érotisme insoutenable (hum), je l'ai trouvée assez foireuse. C'est la seule scène réellement maladroite, en fait, pas si bien préparée/chorégraphiée : le lasso, la façon de se frotter, l'expression que le mec essaie de tenir, tout ça est d'une gaucherie qui frise le ridicule, et ça fout à terre la bonne idée de départ. Après, sans rien montrer, c'est effectivement assez surprenant et "vulgaire", il y a un décalage soudain avec la façon dont on a filmé Nielsen le reste du film, et du coup le parfum de subversion subsiste (ne serait-ce que parce que, de manière assez absurde là-encore, on fait la danse pour le spectateur à qui l'on fait face, et pas pour le public du théâtre où les personnages jouent).
Concernant Gad, je ne saurais pas trop, il faudrait voir plus de choses. Je suis assez surpris de voir un film aussi "libre" dans ses choix de plans (variations d'angles ou d'échelles au sein d'une même scène, même si ça reste sobre) alors qu'on est qu'en 1910. En fait, c'est surtout la dédramatisation du truc qui est surprenante. Quand on regarde les courts de Griffith sur la période (1908-1913), on sent que passer d'un cinéma en tableaux à un cinéma classique est un processus qui lui en coûte, qu'il réfléchit, qui fait de chaque innovation un évènement, qui pose "problème". Ici ça ne semble pas tarauder le réal plus que ça, et du coup on en arrive à un film où l'accumulation de plans larges n'est absolument pas gênante ou perturbante : elle semble logique. Il y a un certain naturel là-dedans, qui achève de confirmer l'élégance de cette cinématographie.
Je ferai un petit bilan dans le topic concerné quand j'aurais vu les autres films, mais pour les intéressés : 37 minutes.