Forum de FilmDeCulte

le précédent film de jérôme commandeur, irréductible, n'était pas extraordinaire d'une quelconque manière que ce soit, mais faisait quand même poliment le job - histoire amusante, une poignée de bonnes blagues, une vibe pas déplaisante.
c'était aussi un remake scène par scène, réplique par réplique, plan par plan, coupe par coupe d'un film italien sorti 3 ans auparavant. c'est une mode récente, dont acte, mais l'intéret que ça peut représenter pour qui que ce soit de consacrer xx mois / années de sa vie à faire ça reste assez confondant.

assez rapidement devant celui-ci, je me suis alors dit "oui, je pense que c'est mieux qu'il se contente de faire des remakes plans par plan, en fait". c'est donc avec effroi et stupéfaction que j'ai réalisé que celui-ci aussi est un remake. d'un film danois, cette fois-ci.
alors les questions tombent en cascade. comment c'est possible de faire un remake qui soit aussi nul ? l'original était aussi mauvais ? what ? mais qui se construit une filmo intégralement constituée de remakes de films datant de 5 ans auparavant ? pourquoi ?

et puis c'est produit par dimitri rassam, ça a couté le chiffre absurde et insensé de 14 millions d'euros, c'est méga formaté dans tous les sens, donc voilà. vraiment le cinéma français qui n'a rien à envier au pire du cinéma us, un pur projet industriel, dénué de toute sorte d'ambition artistique ou d'âme, on fait des films comme on ferait des yahourts mais en se goinfrant de pognon dans le processus.

évidemment que ça se voit. ce casting pourtant largement constitué de gens chouettes (j'y suis allé pour vanessa, dont la filmo ne cessera pas, jamais, de me what the fucker. elle vient de sortir un album chic et élégant et elle sort simultanément ce machin sans aucun rapport. elle n'y est pas mauvaise mais enfin elle n'a évidemment aucun avenir dans la comédie tf1, et je doute qu'elle en veuille. c'est assez nul et plat pour que ce soit impossible qu'elle l'ait fait sincèrement attirée par le projet. elle est plutôt bien hein, mais enfin elle se réduit à un cliché de la comédie française qui aurait pu être joué par n'importe qui. absurde.) qui sont vraiment là pour se prendre un chèque absurde les mains dans les poches, sans même avoir l'air de s'amuser, sans aucune alchimie, créativité, folie, rien, vraiment se poser dans un cadre débiter ta réplique vaguement dans le ton pour lequel tu es devenu presque célebre et basta. il n'y a pas une scène avec de la vie, un heureux incident, une idée créative, on est dans la production industrielle de plans, le découpage et le scénario respectés à la lettre, à un moment je critiquais l'entre soi audiovisuel comique français en disant "bon, bah au moins ils ont du rigoler sur le tournage" mais là c'est même dur de penser que les gens ont ri sur le tournage. et tout ça sent les techniciens bien payés, bien nourris, qui font le job et n'en ont profondément rien à branler.

mais c'était intéressant, parce que ça m'a permis de bien formuler ça. j'ai chopé un livre sur les grandes comédies du cinéma français, par décennie. c'est intéressant, l'âge d'or des années 90 blindée de chefs d'oeuvre et que je connais par coeur. avant ça, les années 70 et 80 avec de sacrés sommets. (plein de choses là dedans et avant que je n'ai pas vu et que je vais doucement explorer, j'ai commencé). mais post années 2000, gros déclin et le bilan des années 2020 sera probablement catastrophique. et c'est vraiment la raison structurelle : trop de pognon, trop de vedettes qui viennent strictement prendre leur chèque, trop de soin à faire des films visuellement "propres" et qui figent la créativité sur le plateau en donnant le pouvoir au chef op quand une comédie a besoin de vie et de folie, trop de ce formatage industriel.
plus personne ne s'amuse en faisant des comédies, voilà la brutale réalité qui explique qu'elles ne soient plus amusantes ou vivantes.

même si ici, il y a par ailleurs un problème fondamental de dramaturgie, que je pourrais qualifier d'éclatée au sol. l'histoire est n'importe quoi (3 anciens bully-mais-qui-ne-s'en-rendaient-pas-compte qui se retrouvent 30 ans après et veulent vaguement organiser une réunion avec leurs anciens camarades qui les détestent mais ils ne savent pas qu'ils sont détestés), raconté n'importe comment avec une cascade de sous-intrigues balancées contre le mur, dont on entend plus parler pendant 50 minutes avant de revenir dessus pendant une scène et on repart sur encore autre chose, des personnages avec des arcs et des personnalités qui s'affirment pour une scène avant de devenir totalement génériques la suivante, des axes fondamentaux du film à peine traités, une volonté de feel good et de propre tout le temps qui fait que le film ne dit ou raconte plus rien, vraiment tout ça est fait n'importe comment et n'a aucun sens.

bref, tout ça est déprimant. vanessa paradis, françois damiens, laurent lafitte, jérôme commandeur ce sont loin d'être les pires. son pedigree familial et sa toute puissance précoce en font une obscène caricature français, mais dimitri rassam a du pouvoir et de l'ambition, manifestement. 14 millions d'euros, c'est beaucoup d'argent. il suffit de jeter une pierre pour toucher 39 scénaristes avec des idées et de l'ambition.
donc en france on a de l'argent, de l'ambition, des gens talentueux et on utilise tout ça pour faire de la grosse merde denuée de toute forme de souffle de créativité d'idées au profit d'un produit d'usine uniquement destiné à se goinfrer vite fait et à remplir des tuyaux.

déprimant.