Djian abandonne (depuis longtemps ?) ses tournures grammaticales puériles pour devenir un grand écrivain. Je n’avais rien lu de lui depuis quinze ans, depuis Maudit manège, aussi mauvais que Bleu comme l’enfer. A l’époque, 37°2 le matin et surtout Zone érogène (véritable profession de foi littéraire) surnageaient quelque peu. Déjà, on remarquait l’importance pour l’écrivain de la littérature américaine, et cela se confirme avec ce Impuretées, premier tome d’une trilogie à venir. Un style beaucoup plus clair, très inspiré par les auteurs américains plus ou moins trashs (au hasard Coupland ou Brett Easton Ellis), dans lequel l’auteur éclate littéralement le temps et l’espace, inscrivant systématiquement ses personnages dans un environnement naturel dont l'importance revient sans cesse. C’est très particulier à lire, pas toujours facile (son style, fait d'un enchainement de phrases - très - longues, nécessite parfois une bonne concentration, et alterne la narration à la première et troisième personne - un peu comme le faisait Flaubert dans la première page de Madame Bovary), et le but de perdre parfois le lecteur dans la construction de la phrase est clairement affiché : quel est le sujet ? Quel est le complément ? Finalement, ça a peu d’importance dans une société où les repères n’existent plus. Les personnages sont forts, existent sans difficulté, et se croisent sans jamais se comprendre (les dialogues sont magnifiques), quelques soient les générations. Le modèle se répète, sans que quiconque fasse l’effort d’en tirer une leçon. La dernière page, ainsi, est sublime de simplicité.
Pour faire simple, une très très grosse surprise.
_________________ Que lire cet hiver ? Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander) La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)
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