Billy Budd a écrit:
Je te conseille une lecture :
J'aime beaucoup Camus mais il n'arrive à assembler que la moitié du puzzle sur la question de la culture. Il mesure, de façon très pertinente, le déclin de la culture française à son incapacité à former de nouvelles élites, à cause de la massification de l'enseignement qui entraîne un nivellement par le milieu (davantage que par le bas) et la promotion d'un travail laborieux et intellectuellement médiocre. Le problème étant que si on veut le même enseignement pour tous, on est obligé pour être équitable de privilégier l'effort avant le talent, alors que n'importe quel processus de développement nécessite le chemin inverse. La déculturation telle qu'il la définit consiste davantage en une indifférenciation culturelle des différentes classes sociales, plutôt qu'une disparition substantielle de la culture.
Il ne mesure pas l'impact d'internet et la puissance d'un esprit curieux livré à lui-même (pour la simple raison qu'un tel phénomène est, dans un premier temps, invisible). L'avantage du délitement de l'enseignement républicain étant qu'aujourd'hui aucun esprit vif ne perdra son temps dans la méthodologie régressive de l'éducation nationale, et s'instruira presque malgré lui, en suivant le fil de sa curiosité. Certes, cela se traduit par une absence de structure et surtout de transmission (notion chère à Camus il me semble), mais également par une désertion progressive de la sphère de la culture par ceux qui n'ont rien à y foutre.
Concrètement, les gens ne sont pas moins cultivés qu'avant, ils sont toujours aussi massivement incultes, mais ils ne parviennent plus à dissimuler leur inculture et leur inintelligence patente derrière un socle de connaissances artificiellement accumulé sous les coups de règles de leur instituteur. Je ne sais pas s'il y a lieu de s'en plaindre.