aka Who Framed Roger Rabbit
C'est le premier film que je me rappelle avoir vu en salles, à 5 ans, et il fait partie du cercle très fermé des Premières VHS Que J'Avais Enfant, à l'époque où, quand tu étais pauvre, il fallait avoir deux magnétoscopes, emprunter le film au vidéo-club, et le copier sur une JVC vierge achetée dans le commerce (et attendre qu'un futur TéléK7 propose la jaquette à découper dans ses pages).
Ainsi ai-je pu voir et revoir à un rythme quasi-quotidien ce film dont je connais littéralement 90% des répliques par cœur. Toutefois, cela faisait un petit bout de temps que je ne l'avais pas revu et en le redécouvrant avec mon fils ce soir, je me suis laissé surprendre par le rythme INCROYABLE du film. Ce n'est pas hystérique comme beaucoup de films (pour enfants) actuels, mais tu sens que l'énergie cartoon infuse le montage même des scènes en prises de vues réelles, chaque séquence ne s'éternisant jamais et l'enquête - complexe pour un enfant de 7 ans (moi à 5 ans, je pense que j'avais rien entravé) - est menée tambour battant.
Revoir le film au travers des yeux d'un môme te fait réaliser aussi à quel point c'est un pur film noir (il n'avait de cesse de demander "mais c'est QUI le méchant?"), méta à plus d'un titre, jouant avec les codes (cette femme fatale "dessinée comme ça, c'est tout"), versant dans l'uchronie fantastique pour mieux servir son improbable propos politique inspiré de Chinatown et de faits réels (le rachat des transports en commun pour favoriser la construction d'autoroutes) qui s'agrémente ainsi d'une ode à l'innocence, incarnée par Toonville. Il y a un peu de Retour vers le futur extra-diégétique dans cette idée que, sans l'intervention des personnages du film, leur monde serait celui qui est le notre, sans cohabitation entre humain et Toons, et gangréné par le capitalisme génocidaire. Big mood pour un film pour enfants! Et je parle même pas des scènes traumatisantes...
En tout cas, le film n'a pas pris une ride. En 4K, certains détourages de personnages animés sont plus visibles mais ça reste tout de même exemplaire dans sa mise en scène des VFX comme un élément du réel, une signature de Zemeckis, que l'on retrouve également dans l'univers référentiel et hybridant les genres, dans l'humour parodique, mais surtout dans toute la thématique du double, avec ce protagoniste endeuillé qui va combler l'absence d'un être cher par une création de fiction (préfigurant la Ellie de Contact ou la Claire de What Lies Beneath) ainsi que dans l'alcoolisme à rejeter (comme Lorraine dans Retour vers le futur, Ernest dans La Mort vous va si bien, Whip dans Flight, Mark dans Welcome to Marwen...enfin, comme Zemeckis surtout).
Bref, chef-d’œuvre.
ouf