Une attaque nucléaire de grande ampleur surprend la famille Baldwin, en route pour un week-end à la campagne. Réalisant peu à peu l'ampleur de l'évènement, la famille s'organise pour se mettre à l'abri.
C'est la saison d'Oppenheimer, alors allons-y.
Remarquable série B non pas post-apocalyptique mais carrément apocalyptique réalisée par Ray Milland, acteur oublié ces jours-ci malgré une très belle carrière bien remplie (The Lost Weekend de Billy Wilder, pour citer son rôle le plus connu), sorte de James Stewart à la fois plus sévère et bouffi.
Le titre français aurait pu être L'Apocalypse à papa tant on a affaire au pur prototype du survival réactionnaire. Sec, direct, sans fioritures. Le père (incarné par Milland) passe tout de suite en mode chef d'escouade car il sait exactement ce qui les attend : chacun pour soi, tous contre tous, gros bordel saupoudré de lumpenprolétariat en roue libre. Il prend de suite le contrôle, canalise sa femme déboussolée et ses élans altruistes malvenus, redirige les ardeurs de son fils pour lui éviter une cowboyite aïgue, ne calcule pas plus sa fille que ça jusqu'au drame inévitable et porte sur ses épaules le fardeau de la protection des siens et de la préservation de la civilisation. C'est tendu et méchant. Le patriarcat est au maximum.
De très bons moments durant la phase road movie initiale en mode "on fait pas d'omelettes sans casser des oeufs" qui confèrent au film, ouvertement cheap, une grande modernité. Tout du genre est déjà là : délitement du civisme, effet de meute (via les véhicules, bien utilisés), prédation, escroqueries, méfiance, violence etc. Et sans que ça fasse brouillon, ou première tentative datée (sauf pour la BO qui swingue un peu trop). Même le rythme est bon, les péripéties s'enchaînent rapidement, sans contemplation moribonde, qu'elle soit psychologique ou métaphysique.
Le reste, plus sédentaire, fait la part belle à l'installation de la menace non plus nucléaire mais domestique, opérant clairement et sans chichis la distinction entre les niveaux macro et micro de La Guerre™, qui est une des marques de fabrique d'autres brûlots réactonnaires comme The Exterminator et autres films de vigilante coléreux : passé outre le bouleversement provoqué par une attaque étrangère (l'ennemi n'est jamais désigné), il faut faire face à cette partie de la population déjà en guerre froide permanente contre le reste, et qui peut maintenant s'en donner à coeur joie. Très romantique, mais pour ceux qui veulent du nucléaire réaliste qui ne laisse aucune place à genre de fantasmes à l'ancienne, il y a le téléfilm britannique Threads.
Un des bijoux d'American International Pictures, partenaires et financeurs des meilleurs Corman (ses adaptations de Poe et Lovecraft, notamment) auquel Milland a d'ailleurs emprunté pas mal de techniciens. Carré.