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L’Etrange Monsieur Victor (Jean Grémillon, 1938)
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Auteur:  bmntmp [ 05 Jan 2023, 17:22 ]
Sujet du message:  L’Etrange Monsieur Victor (Jean Grémillon, 1938)

Réalisateur en définitive toujours méconnu que Grémillon, dont l’oeuvre n’est pratiquement pas abordé en ces pages. On sait l’estime que lui portait Daney, et qui d’autres? Lourcelles (dont je viens d’apprendre qu’il avait sorti une version augmentée de son dictionnaire des films), Filmetnuc… mais même chez ses admirateurs, ce film datant juste de l’avant-guerre se passant à Toulon avec Raimu est rarement évoqué. Et bien à tort, ce qui ne fait qu’amplifier la surprise.
Je connais mal Raimu et Grémillon, et si l’on s’attend à une pagnolade, on est bien vite détrompé, tout en tombant sous le charme de la manière dont Grémillon et son acteur captent le génie du lieu et le folklore (alternant décors réels avec ses impressionnants bâtiments de marine militaire et décors de studios bien reconstitués). D’ailleurs dans le seul autre Grémillon que j’ai vu, sauf erreur de ma part, Lumière d’Eté, il arrivait très bien à donner vie, à incarner un coin un peu reculé de la province sudiste française, Cabrières, sans tomber dans le régionalisme ringard. La musique, discrète, avec ses choeurs d’enfants qui retentissent à deux reprises rappelle à la fois l’Ennio Morricone de Qui l’a vue mourir, les comptines chères à Iosseliani, et, forcément, un peu Bruno Coulais, en mieux, plus abstrait, plus mystérieux, plus évanescent. Et quand on regarde le film sans préjugés, avec son innocent jugé coupable de l’exposition et l’ellipse de sept ans qui la relie au deuxième acte. On se dit, quelle évidence, on a échappé au film de procès ou à la recherche du vrai coupable, dont le film n’a pas fait mystère (le notable du coin au sens propre comme figuré). Une évidence qu'on avait oublié, conditionnés que nous sommes par des films moyens, comme La Cinquième Victime de Lautner ou médiocres, qui ont substitué de plus balourdes évidences.
Ici, ce qui compte, c’est une espèce de flottement psychologique qui règne entre des personnages fréquemment pas tendres les uns envers les autres : hommes et femmes se lançant des menaces, annonçant la fatal désamour qui finira bien par apparaître, ne faisant pas mystère du caractère transactionnel de tous types de relations. Il n’y pas de repas gratuit et cependant, nous ne sommes pas dans une méchanceté systématique, style jeu de massacres dans le style du Repas des Fauves de Christian Jacques. Je ne pense pas que Grémillon ait eu en temps de commenter les tourments politiques de l’époque à travers son polar psychologique, mais évidemment il le fait.
Sens du cadrage impeccable de Grémillon, qui sort le film fréquemment de son réalisme par des plans plus mystérieux, une caméra calée près du mur la nuit alors que l’ambulance arrive, une contre-plongée à travers un oeil de boeuf quand le père espionne son fils à son insu, ces vues de la rade ou de Toulon à l’arrière-plan, arrière-plan qui est le devant puisque c’est là-bas que se dirige l’histoire. Chaudement recommandé.

Auteur:  Film Freak [ 05 Jan 2023, 17:45 ]
Sujet du message:  Re: L’Etrange Monsieur Victor (Jean Grémillon, 1938)

YOU DID NOT MAKE IT, VICTORR

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