Ce n'est pas faire injure à Les Fiancés de Glomdal que de dire qu'il s'agit d'un petit Dreyer. Petit parce que court, déjà (1h15 à tout casser), mais petit également dans ce qu'il raconte : ce n'est finalement que l'histoire d'un mariage impossible qui ne l'est pas vraiment (il s'agit juste de convaincre un père récalcitrant, le tout saupoudré d'une histoire de rivalité amoureuse sans poids), et on voit assez rapidement qu'il n'y a pas assez de matière pour un long métrage. Il faut donc qu'un film naisse de cette quasi-absence d'enjeux dramatiques, alors que la tentative de Dreyer d'en faire une fable morale chrétienne (le faiseur de paix est un curé, et le film s'achève sur un plan plastiquement magnifique mais lourdement signifiant de flèche d'église) ne parvient guère à en rehausser l'intérêt, malgré une péripétie finale très impressionnante mais longuette.
Et pourtant, l'ensemble reste hautement recommandable : d'abord parce que cette Norvège champêtre est fabuleusement photogénique (et encore plus vue par Dreyer), entre prairies, rivières, et montagnes en surplomb, mais aussi parce que Dreyer raconte la paysannerie de l'époque avec un regard quasiment documentaire : les vieilles maisons en bois, les outils de bric et de broc, les danses, la labeur dans les champs, etc. C'est vraiment là que le film s'incarne le plus, ce qui permet de créer un cadre fabuleux à ce que le film a de plus beau à raconter : la romance juvénile. Dreyer filme cet amour avec une grâce remarquable : mains qui se touchent, hésitations avant de quitter l'être aimé, montée du désir, baisers furtifs. C'est de toute beauté.
Un petit Dreyer restant évidemment toujours au-dessus du tout venant, ça reste donc largement recommandable.
4,5/6