Récemment j'ai pu voir L'Ange de Patrick Bokanowski, dans un DVD des éditions Re:Voir, qui ont un très bon catalogue. Il s'agît d'un classique du cinéma expérimental des années 80. Des oeuvres dont la critique a beaucoup parlé récemment, comme le fameux episode 8 de Twin Peaks, lui doivent assurément beaucoup. Difficile de parler rapidement du film, qui est à la hauteur de sa réputation.
Il est très intéressant de lire les explications de Bokanowski dans le livret, qui rejette fermement les interprétations ésotériques et mystiques que l'on pourrait en faire : le mystère de l'expression est pour lui plus profond que celui de l'interprétation - et c'est là une forme d'intransigeance matérialiste.
Bokanowski parle surtout de technique et de l'histoire du film mais assume aussi l'influence de la psychanalyse sur son travail. Difficile de parler du film, mais je crois qu'il tourne autour de l'idée que tout rapport sincère à la foi et au salut religieux (ou pas) nécessite un effort d'abstraction, dont le commencement peut se représenter esthétiquement.
Le film est structuré autour de la musique de Michèle Bokanowski, son épouse, et représente elle-même une œuvre à part entière. Quelle ne fut pas ma surprise d'entendre que dans le passage de la bibliothèque, elle a créé quelque-chose de préfigurant de mnière troubalnte "Different Trains" de Steve Reich, tout aussi vibrant mais plus indécis et expérimental, quelques années avant.
S'il y a des amateurs de Švankmajer sur ce forum, ce film pourrait les intéresser. L'angle esthétique est assez différent mais il y a quand-même une parenté technique et un rapport commun au freudisme (et à l'imaginaire libertin du 18ème, pris au sérieux, comme une attitude philosophique forte).