J'avais suivi le projet depuis 2012, étant tenu au courant de sa dénaturation progressive entre ce que j'imaginais être un film d'aventures amblinien malin et la comédie plus télévisuelle que c'est devenu. J'avais lu un scénario en 2017 qui souffrait de certains problèmes mais était, d'après mon avis de l'époque, meilleur que ce que j'ai vu ce matin.
J'ai conscience que le travail de Bob et Dan a été très largement dilué et qu'il ne reste presque rien d'eux dans le film actuel. C'est un mal pour un bien, parce qu'au moins j'ai pas besoin de prendre de pincettes.
On va évacuer le positif: le film a une certaine générosité et fais un effort pour créer un environnement vaguement ludique. Même si les meilleurs moments visuels sont de toute façon pompés sur Jean-Pierre Jeunet (déjà une inspiration de Nicolas Bary) au moins on perçoit de ci de là un effort dans certains cadres ou certaines (trop rares) ambiances lumineuses. Et sur le plan scénaristique, le film évite le foutage de gueule intégral en essayant de donner à chacun un arc (c'est quand même révélateur de l'état pitoyable de notre industrie que le fait que chaque personnage ait un arc soit un point positif...).
Pour le reste, je trouve ça presque intégralement raté. Déjà le héros est trop vieux. On a presque l'impression que l'acteur a été casté un an plus tôt mais que le tournage a été repoussé et qu'il a connu une poussée de croissance. Du coup au lieu d'être mignon et attachant, il fait pitié. On dirait une sorte de nerd autiste davantage que le petit futé trop mimi que j'imaginais. Quand il fait ses missions d'infiltration et tout ça, il est pathétique. Dur pour l'empathie.
Ensuite, dans ses deux premiers tiers le film est presque totalement dénué de tension. Toute la prise d'otage est traitée frontalement et mollement, dans un cabinet de pédiatre sur-éclairé (zéro atmosphère...). On est jamais pris aux tripes, même pas dans les moments de montage alterné. Tout est traité sans stress: Bérangère Krief négocie pour aller aux toilettes et s'autorise un monologue face au miroir pour faire le point. On ne sent aucune mise de pression. Idem lorsque Victor essaie de s'incruster via le faux plafond: même quand l'enfant se coince le pied, on n'y croit pas !
Le problème, c'est qu'on ne croit à rien dans ce film. Il n'y a pas de vraisemblance ni le moindre ancrage sociologique. Les créateurs (enfin, pas tous...
) semblent avoir oublié que dans E.T., Elliot c'est un vrai petit garçon dans le vrai monde avant de rentrer dans un univers invraisemblable. Ici, tout est hors-sol. On ne croit ni à ce gardien d'immeuble d'un autre temps, ni à l'immeuble et ses habitants disparates (totalement sous-exploités par rapport au script d'origine, apparemment), ni à ses braqueurs de bande-dessinée vides de toutes menaces. Y a que dans les brèves scènes avec les collégiennes qu'on sent un semblant de réalité, et encore ça reste surjoué.Pauvre en mise en scène (la tristesse du premier et du dernier plan, mouvements de grue dénués de sens), le projet essaie de compenser en name droppant des références 80s, mais elles sont tellement injustifiées et déconnectées de tout qu'elles ne riment à rien. Le pompon c'est ce logo "To Be Continued" en typo BTTF qui clôt le film sur... le générique de CAT'S EYE.
