De film en film, Cronenberg semble progresser vers un cinéma plus accessible. Pas encore tout à fait mainstream mais loin des cheaperies de ses débuts, Scanners, comme The Brood, prend une apparence plus classique sans pour autant perdre de sa personnalité.
Je pense que si je l'avais découvert à la même époque où j'ai découvert les Cameron ou les Verhoeven, j'aurais été à fond. Même si le Cronenberg est objectivement moins abouti que Terminator ou Robocop, il partage avec ces films une approche quelque peu comic book - c'est globalement le X-Men de Cronenberg, préfigurant les codes du super-héros qui allaient apparaître plus tard dans La Mouche - toutefois toujours ancrée dans l'horreur (sublime travail de Dick Smith, notamment sur le climax assez dingue) et avec ce fond politique sous-jacent (les personnages sont manipulés par ConSec, sorte de Weyland-Yutani ou d'OCP avant l'heure).
Le tout début hoquette un peu, comme si le film commençait trois ou quatre fois mais la mise en place est assez grisante et prometteuse, avec cet antagoniste instauré d'emblée comme surpuissant et jusqu'au moment où le héros est enrôlé pour infiltrer le réseau underground de scanners. Profitons-en pour dire à quel point il est regrettable que le protagoniste soit interprété par l'enfant caché de Michael Fassbender et Nicolas Bedos, incroyablement fade, surtout face à l'inénarrable Michael Ironside et l'imposant Patrick McGoohan.
Malheureusement, la mollesse de l'acteur se retrouve par moments dans le manque d'énergie qui caractérise la deuxième moitié du film. Cronenberg oublie qu'il n'est pas vraiment dans un film d'horreur et que la course effréné du personnage principal devrait revêtir un aspect plus nerveux et paranoïaque, en adéquation avec le propos. Une fois de plus, le pouvoir est vu comme une maladie à traiter, avant d'être pleinement embrassée, l'auteur revisitant dans un registre plus "action" les thématiques de son tout premier long, Stereo, notamment la télépathie comme extension du corps puis pénétration.
Il y a tout un tas d'idée dans le film qui en font une sorte de précurseur à pas mal de fleurons du genre qui ont suivi, jusqu'à Matrix, mais le traitement parfois trop rapide et sans réelle surprise dessert l'oeuvre. Il y a quelques années, Cronenberg flirtait avec l'idée de réaliser lui-même le remake de La Mouche mais c'est celui-ci qu'il devrait refaire. Je trouve toutefois que le cinéaste maîtrise de plus en plus son cinéma et j'ai hâte de découvrir Videodrome, le seul que je n'ai pas vu de ce que je pense être la meilleure période de sa filmographie, les années 80.
