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Une vie (Stephane Brizé - 2016)
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Auteur:  DPSR [ 07 Sep 2016, 12:47 ]
Sujet du message:  Une vie (Stephane Brizé - 2016)

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Normandie, 1819. A peine sortie du couvent où elle a fait ses études, Jeanne Le Perthuis des Vauds, jeune femme trop protégée et encore pleine des rêves de l’enfance, se marie avec Julien de Lamare. Très vite, il se révèle pingre, brutal et volage. Les illusions de Jeanne commencent alors peu à peu à s’envoler.

Ah Une vie, j'étais tombé dessus au bac français, à cette époque où l'on se demande pourquoi l'éducation nationale inflige aux élèves une telle torture, entre Madame Bovary et consorts. Puis le temps fait son oeuvre et les années aidant, on comprend mieux les vertus de ce classique des lettres. Passé un temps d'adaptation qui fait craindre que Brizé soit retombé dans un cinéma chichiteux façon Mademoiselle Chambon où ça susurre, ça chuchote et ça baguenaude avec la voix perpétuellement lunaire et interloquée de Judith Chemla, on saisit avec une évidence qui s'impose sa tentative de faire son Wuthering Heights d'Andrea Arnold à la française, toutes proportions de chef op gardées. Ainsi, il choisit de raconter l'existence de cette femme trompée par son mari et abusée par son fils uniquement entre les creux, où on passe plus de temps à arroser son potager ou à jouer aux devinettes qu'à sceller le sort de ses personnages, dont on se débarrasse comme guillotinés par un couperet au détour d'un plan sans équivoque, dynamitant l'académisme qui gronde par une dimension pathétique étourdissante. Dans sa propension à la suggestion, Une vie subjugue d'ironie sous son humilité et transcende un cinéaste qui ne nous avait jamais vraiment convaincu jusqu'alors par une vraie proposition de cinéma.
4/6

Auteur:  Arnotte [ 15 Sep 2016, 14:27 ]
Sujet du message:  Re: Une vie (Stephane Brizé - 2016)

Yes, assez surpris aussi. On met du temps à rentrer dedans, on craint une espèce de pastiche de Wuthering Heights et le poème lu par Judith Chemla au début laisse craindre le pire, mais on finit par se laisser emporter, happer par cette vie de malheurs et de mensonges, la vie de cette femme prisonnière de son époque. On approuve finalement sans réserve le format 3:4, et la narration hyper elliptique est quand même super efficace, aussi grâce au montage brillant. Rien à dire non plus sur les excellents acteurs. Au final j'ai été conquis par cette adaptation assez remarquable.

4-4,5/6

Auteur:  Jerónimo [ 30 Nov 2016, 09:59 ]
Sujet du message:  Re: Une vie (Stephane Brizé - 2016)

Curieuse trajectoire que celle de Stéphane Brizé. J’avais beaucoup aimé, à l’époque, Le Bleu des villes (avec un génial Antoine Chappey dont j’attendais vraiment qu’il explose dans un grand rôle), et j’avais lâché l’affaire après le pas très réussi Je ne suis pas là pour être aimé, tant ses films suivants semblaient vouloir parler de la vie mais avec avec peu d’ambition. La Loi du marché, surtout portée par un Vincent Lindon extraordinaire, faisait penser aux Dardenne, et bien que j’apprécie le film, il ne m’avait pas totalement convaincu. Je ne sentais pas la personnalité derrière le projet de mise en scène, je sentais les intentions d’à peu près partout.

Autant dire que sans l’avis d’Arnotte j’aurais passé mon chemin, et ça aurait été bien dommage. Alors clairement, le film s’inscrit dans la lignée du genre. Non pas que j’en connaisse tous les codes, mais il ne faut pas s’attendre à être trop surpris sur le fond. Mais sur la forme, comme le note DPSR, on est face à une vraie proposition de cinéma, et c’est assez réjouissant. Certes, le cinéaste use et abuse un peu de ses effets, le montage en flashback / souvenirs permanents peinant à la longue à donner de l’ampleur au récit, et le procédé de finir le son d’un dialogue / monologue sur le plan suivant devenant assez répétitif, et le film aurait sans doute gagné à être un chouille plus court (je conçois qu’on s’y emmerde franchement), mais la forme est quand très maîtrisée. Tout ce qui touche à le reconstitution de l’époque (les lettres, les jeux, le bois,…), la direction artistique, la photo, le cadrage, évidemment le montage, tout ça est cohérent tout le long du film, le mec a une vraie vision de ce qu’il veut et le fait avec un talent certain, c’est déjà un bel aboutissement. Il y a un tas de choses qui passent uniquement pas la mise en scène, ça fait plaisir de ne pas être devant un truc tout plat à ce niveau.

On peut trouver l’ambiance générale et les problématiques abordées petit-bourgeois (même petit-aristo pour être précis), mais le film est suffisamment sensible et délicat pour y trouver un propos plus « universel ». Au vu du passé « social » du cinéma de Brizé, je m’attendais à ce que le film bascule vers une sorte de Lady Chatterley, la revanche passant par l’adultère mais le scénario a l’intelligence de développer ce propos social en continuité avec la position des femmes à cette époque. Je parle de propos social comme si c’était une nécessité, mais dans l’absolu je suis pas forcément demandeur, et pour le coup Brizé arrive bien à l’équilibre entre destin personnel et trame de fond historique avec ses carcans et son oppression latente.

Voilà, c’est sorti le 23 novembre, ça va faire 8 entrées, mais, bien que ce soit un genre particulier qui ne plaira pas à tout le monde, je conseille.

4,5/6

PS: ouais Puck, je suis une gonzesse.

Auteur:  Lohmann [ 06 Déc 2016, 17:08 ]
Sujet du message:  Re: Une vie (Stephane Brizé - 2016)

Chemin inverse pour moi, je suis directement rentré dedans, agréablement charmé par la forme que prend le film qui rompt avec le standard (chiant) du film en costume à la Benoît Jacquot. Le format est non seulement adapté à son sujet, mais il créé une vraie proximité avec ses personnages. On sent que Brizé s'est également concentré sur le verbe (privilégiant le langage contemporain à la rigueur historique) et le montage - qui est pour moi l'un des atouts principal du film, avec ses entrelacements d'époques qui m'ont rappelé ce que Chabrol avait fait dans Violette Nozière, et l'idée que je trouve excellente ici d'utiliser des dialogues qui différent de ce que l'image nous montre de manière à densifier le personnage de Chemla.

Par contre j'ai pas tenu sur la longueur. A partir du moment où le fils prend de l'importance, j'ai commencé à ressentir une vraie lassitude
pas sûr qu'il y ait besoin de 4/5 scènes où elle reçoit un courrier lui extorquant de l'argent pour que l'on comprenne cette ultime trahison.
Sinon Finnegan Oldfield il tourne dans tous les films français? J'ai l'impression de ne voir que lui cette année.

4/6

Auteur:  Jerónimo [ 06 Déc 2016, 17:33 ]
Sujet du message:  Re: Une vie (Stephane Brizé - 2016)

Lohmann a écrit:
pas sûr qu'il y ait besoin de 4/5 scènes où elle reçoit un courrier lui extorquant de l'argent pour que l'on comprenne cette ultime trahison.


Du coup je suis pris d'un doute...
C'est quoi l'ultime trahison? Pour toi, le fils ne reviendra jamais?

Auteur:  Lohmann [ 06 Déc 2016, 17:37 ]
Sujet du message:  Re: Une vie (Stephane Brizé - 2016)

Jerónimo a écrit:
Lohmann a écrit:
pas sûr qu'il y ait besoin de 4/5 scènes où elle reçoit un courrier lui extorquant de l'argent pour que l'on comprenne cette ultime trahison.


Du coup je suis pris d'un doute...
C'est quoi l'ultime trahison? Pour toi, le fils ne reviendra jamais?

Je dis plus ultime trahison dans le sens où même son fils la manipule, il reviendra par contre probablement - comme son mari avait fait amende honorable, avec la sincérité que l'on sait

Auteur:  Jerónimo [ 06 Déc 2016, 22:55 ]
Sujet du message:  Re: Une vie (Stephane Brizé - 2016)

Ouais... je trouve la résolution,
qui passe par à une tierce personne,
plutôt réussie.

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