Quel improbable film.
Quel improbable choix.
Comme je disais l'autre jour donc, le mec débarque aux States et fait ça. L'histoire d'un flic qu'on transforme en cyborg. Et il s'appelle Roboflic quoi. Et de temps en temps, y a un extrait de sitcom à la Benny Hill ou une fausse pub ouvertement parodique.
En vrai, c'est un coup de génie, Starship Troopers avant l'heure, une satire grossière passée en contrebande dans un écrin en mode "le fascisme pour les nuls", avec sa dystopie reaganienne d'un futur moche et gris fait de bâtiments modernistes où les corporations ont plus de pouvoir que les politiciens, qui foirent leurs prises d'otages littérales.
La réussite tient dans la gestion du ton, véritable numéro d'équilibriste que Verhoeven entame ici et filera jusqu'à Elle. Par exemple, il exacerbe des marques de son cinéma comme la violence, poussée à l'extrême, qui peut se faire délibérément comique (cf. le mec déjà mort mille fois qui se fait encore mitrailler sur la maquette du Detroit du futur dans la version X) ou vraiment douloureuse (la "crucifixion" de Murphy, surtout dans la version X là aussi, avec ses cris de douleurs, sa souffrance).
Il a beau parsemer le film de gags, il filme la création de Robocop avec soin, délayant au max, ne montrant PAS la métamorphose, restant en vue subjective, créant une empathie inattendue simultanément avec du mystère...et cet éveil, quand il marche, toujours en vue subjective, et qu'on l'aperçoit furtivement dans un écran qui le filme.
Et rebelote au commissariat où la mise en scène se fait quasiment spielbergienne, favorisant le build-up avec le son des pas et en se focalisant sur les regards des gens dans le commissariat et cette silhouette derrière la vitre opaque.
Ces séquences-là sont étonnamment premier degré et c'est ce qui nous fait croire à ce perso qui, bah, marche comme un robot un peu ridicule quand même avec son costume de sentai upgradé, c'est ce qui fait que, même après avoir ri de son intervention face aux deux violeurs rigolards (#exacerbation again, d'ailleurs c'est le seul Verhoeven où le viol est interrompu), avec la balle tue-bite qui traverse la jupe puis la meuf qui court dans ses bras et se voit rétorquer un discours automatisé, et même s'il bouge comme ça et a cette allure-là quand il visite sa maison vide et se remémore sa famille, on est tout de même touchés.
Puis après t'as aussi Emil qui se transforme en Toxic Avenger et se fait liquéfier en mode WTF.
Le martyr de Murphy aux mains de la société, aussi dégueulasse que cet Emil mutant, et sa quête identitaire parviennent à incarner la satire et ce malgré une écriture relativement rudimentaire. Je crois que c'est notamment pour ça que je lui ai toujours préféré Total Recall.
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