New York, 1841. Solomon Northup, un jeune afro-américain, est kidnappé et réduit à travailler comme esclave dans des champs de coton en Louisiane. Son calvaire durera près de 12 ans.
Voilà donc le film qui fera passer McQueen de la confidentialité cinéphile à la pleine lumière, et il est par ailleurs assez passionnant de constater à quel point on retrouve beaucoup de la structure de ses deux précédents films, qui pouvaient également se voir comme des histoires d'esclavage (la prison de Hunger, l'addiction sexuelle de Shame), dans des conventions de scénario plus narratives, attachés à son personnage "based on a true story" qui a aussi valeur de témoin historique, vingt ans avant la guerre de sécession. Solomon Northup n'est en effet pas né esclave, c'était un homme libre qui a été kidnappé et mis en esclavage, qui a dû ravaler sa fierté et sa dignité pendant douze ans, baladé entre deux différents maîtres, un prêcheur baptiste compréhensif joué par Benedict Cumberbatch et un tyran alcoolique et violent interprété par Fassbender. McQueen a choisi de moins styliser son film qu'à l'accoutumée, même si on retrouve sa marque de fabrique dans sa manière de faire durer une scène de pendaison, ou son incroyable impact visuel avec une simple lettre en train de se consumer, avec une grande palette musicale orchestrée par Hans Zimmer et ses paysages comme recouverts par des branchages entravant toute liberté. Cela passe notamment par des scènes de lacération au fouet montrées dans leur plus simple brutalité, avec des mutilations jusqu'aux entrailles, mais tout à son honneur plus occupé par l'exposition de la vérité qu'à instrumentaliser l'horreur. Mais aussi par une négation de la personne par une destruction mentale permanente. La conclusion est sans doute un peu moins forte, avec Brad Pitt dans un tout petit rôle accessit comme une participation alors qu'il est co-producteur du film, mais bon encore une fois c'est une histoire vraie, mais c'est comme si le refus de mélodramatiser une destinée qui se passe de commentaires, se conformait aux carcans d'une issue oscar-friendly. En tout cas, je n'ai jamais entendu autant de spectateurs ravaler leurs sanglots à la sortie d'une salle de cinéma.
4/6