Lásky jedné plavovlásky en VO.
A Sruc sur Sazava, la population féminine de la gigantesque fabrique de chaussures est en surnombre. Le responsable culturel trouve une solution et fait implanter un cantonnement militaire à proximité pour animer les bals de la culture.
J'y allais en traînant les pieds, pour remplir mon quota Nouvelle vague trimestriel. Et puis je me suis fait cueillir comme une fleur. Le film a pourtant tout ce qu'il y a d'acide et de potentiellement cynique, et parvient à travers un scénario court et simplissime, souvent par détours intelligents d'ailleurs, à dézinguer un peu près tout ce que le pays peut avoir d'intolérable (de l'usine au contrôle de la jeunesse, en passant par la famille qui implose et les vies grises...). La plupart des personnages sont méprisables, ridicules, naïfs ou manipulateurs.
Et pourtant c'est d'une douceur dingue, c'est vraiment un film hyper précautionneux. Le tableau général est cruel, les gens sont cruels entre eux, mais Forman manie chacun avec une délicatesse infinie, avec une sorte de bonté et de compassion totalement inattendue dans un tel cadre. Et ce dès le début, avant même que l'histoire ne commence, quand un gradé vient demander à son supérieur, narquois, si on pourrait arrêter de faire la guerre 50 ans pour que les filles qui triment déjà 8h par jour aient au moins le bonheur d'avoir des hommes à aimer. Ce genre de chose qui n'est aucunement sympathique avec le pouvoir, mais qui prend déjà, très simplement, la forme d'une attention.
L'histoire d'amour illusoire est ce qui accroche forcément le plus (la fragilité de la fille, le sort réservé au fiancé, le jeune connard hyper-touchant), mais avec le recul ce qui frappe quand même c'est cet esprit de synthèse, le fait de raconter tellement de choses avec si peu de scènes et de péripéties - pas du tout dans une espèce de pose minimaliste et épurée, mais vraiment juste en sachant tellement bien agencer un petit nombre d'éléments. Je pense à la nuit d'amour, juste sublime, qui en dix minutes nous aura raconté les personnages d'un bout à l'autre. Ou au deuxième bal, plié en 4/5 plans distants, qui arrive peut-être encore mieux que le premier, et de manière plus énigmatique, à dresser le portrait de cette jeune génération.
Enfin voilà, je suis complètement sous le charme, et mis à part de très rares percées de comique potaches un peu malvenues, j'ai trouvé ça super beau.