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La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)
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Auteur:  wurzag [ 20 Juin 2011, 22:06 ]
Sujet du message:  La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

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(la jaquette moche qui sert à rien)

Dans l’immensité tragique de la plaine russe, une population misérable de paysans armés d’outils dérisoires, s’active au dur labeur de terre. La saison des labours est arrivée. Mais Marfa Lapkina n’a toujours pas de cheval pour sa charrue. En désespoir de cause, elle attelle sa pauvre vache, qui finit par tomber d’épuisement sous l’œil indifférent des autres journaliers. « Cette vie ne peut plus durer, hurle Marfa. Nous devons nous unir ». Un kolkhoze va naître ; et grandira, grâce à l’obstination de Marfa, malgré la méfiance des villageois et l’hostilité criminelle des paysans aisés, les koulaks.

Lorsqu'on parle d'Eisenstein, on cite immanquablement Le Cuirassé Potemkine, souvent Ivan le Terrible et parfois la Grève ou Alexandre Nevski. Pourquoi un intérêt moindre semble-il avoir été donné à la Ligne Générale ? L'absence de scènes réellement marquantes comme l'escalier du Cuirassé ou du combat sur le lac d'Alexandre Nevski (et pourtant) ? Le fait que le film ressemble plus à une chronique de l'évolution d'un petit village qu'une action ponctuelle comme la révolution d'Octobre ? Je n'en sais rien, mais je l'ai trouvé tout aussi intéressant que les trois précédents du bonhomme, dont il se rapproche bien entendu.

Ce qui m'a toujours fasciné chez Eisenstein, c'est le casting de tous ses films, la profondeur des regards, la dureté de toutes ces faces russes, le manichéisme émanant de chacune d'elles, qui permettent de déterminer d'un clin d’œil qui sont les gentils et les méchants. J'avais entendu dire dans une interview de la directrice de la Cinémathèque de Toulouse que Eisenstein errait la nuit dans les gares et les endroits pas forcément les mieux famés à la recherche de visages marqués par la vie, c'est plus que réussi et c'est ça (entre autre) qui donne tant de force à ses films je trouve.
La propagande est bien sûr toujours très présente, les intertitres se font de plus en plus dénonciateurs (même si ça vaut pas le plan final d'Alexandre Nevski :lol: ), la création du kolkhoze est prétexte à l'apologie du brave paysan russe, du progrès, du socialisme, face au passé révolu, à la lourdeur de la bureaucratie et aux traîtrises des koulaks.
Cet aspect mis de côté, le film est très fort, rempli de scènes splendides (l'écrémeuse, le concours de fauchage, le final bien sûr) et l'on constate qu'Eisenstein filme aussi bien la ville (comme dans la Saint-Petersbourg d'Octobre) que les espaces ruraux (certains instants m'ont rappelé la beauté des paysages du Days Of Heaven de Malick)

Bref, jamais personne n'aura aussi bien filmé des vaches, 5/6

Auteur:  Tom [ 21 Juin 2011, 01:31 ]
Sujet du message:  Re: La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

Question pour les connaisseurs, ça m'a toujours rendu curieux : idéologiquement il est où Eisenstein ? Il est sincèrement pro-régime ? Ou juste au début ? Ou pas du tout et il fait semblant ? Ou il s'en tape ?

Auteur:  wurzag [ 21 Juin 2011, 02:08 ]
Sujet du message:  Re: La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

Dites-moi si je me trompe, mais pour ses quatre premiers films il était, comme la plupart des intellectuels soviétiques, pour la révolution, pour le changement profond opéré par le socialisme. Par contre, après son long voyage à l'étranger, l'URSS stalinienne qu'il retrouve ne correspond plus du tout à ses idéaux, et ses différents projets sont abandonnés car soumis à la censure. Le pur produit de propagande qu'est Alexandre Nevski est donc beaucoup moins "franc" que ses précédents. Et Ivan le Terrible montre bien ses hésitations, avec une première partie conforme à l'idéal stalinien mais une partie II où le roi tombe dans la paranoïa, monte une police secrète... Cette descente aux enfers pouvait très bien être assimilée aux dérives du communisme de l'époque, et je ne pense pas qu'Eisenstein aurait osé réaliser cette deuxième partie s'il n'approuvait pas les idées et critiques politiques distillées par celle-ci (qui valurent d'ailleurs au film d'être censuré et interdit par Staline)

Auteur:  Tetsuo [ 21 Juin 2011, 10:22 ]
Sujet du message:  Re: La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

wurzag a écrit:
Cette descente aux enfers pouvait très bien être assimilée aux dérives du communisme de l'époque


Et elle le fut. Il devait y avoir une troisième partie qui n'a jamais vu le jour.
Les films d'Eisenstein sont clairement des films de propagande, y'a pas à chier. Mais je pense que dans le fond, il était bien plus passionné par ses petits soucis formels d'artiste égocentrique que par les problèmes de lutte ouvrière, qui lui servait surtout de "prétexte à".

Auteur:  Tom [ 21 Juin 2011, 12:52 ]
Sujet du message:  Re: La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

Y a gros article de Narboni dans le petit recueil "Théories du cinéma" sur ce film, assez violemment attaqué j'ai l'impression (même si je suis pas certain : lu certains passages en diagonales, de peur de me spoiler), dont il observe en tout cas la "monstruosité", et les possibilités d'aimer le film. De loin ca a l'air assez intéressant.

Auteur:  Tetsuo [ 21 Juin 2011, 13:43 ]
Sujet du message:  Re: La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

Je vais regarder ça, je l'ai ce bouquin je crois.

Auteur:  Lohmann [ 18 Oct 2016, 14:22 ]
Sujet du message:  Re: La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

Assez d'accord avec wurzag, je ne dirais pas que La Ligne générale est aussi fort que Potemkine, Octobre ou la Grève (probablement parce que l'on a d'un côté, en plus d'un exercice de style cinématographique saisissant un vrai fond historique, tandis que pour ce dernier on est pas loin d'un fantasmagorique paradis kolkhozien et que le propagande y est plus lourde), le film est, de part l'inventivité d’Eisenstein, une collection de scènes épiques:
wurzag a écrit:
Cet aspect mis de côté, le film est très fort, rempli de scènes splendides (l'écrémeuse, le concours de fauchage, le final bien sûr)

Autant la scène de l’écrémeuse est vraiment géniale (limite psychédélico-surréaliste), par contre les deux autres beaucoup moins je trouve (ce sont deux moments forts de l'aspect le plus propagandiste du film, le héros stakhanoviste et la puissance industrielle socialiste). Je leur préfère le prêche des prêtres orthodoxes pour que la pluie tombe (dans un baroque qui préfigure Alexandre Nevski), les gros plans sur le double menton de l'infâme (comme il se doit) propriétaire terrien ou la saillie du taureau (avec ses effets stroboscopiques).

Petit bémol, j'ai vu le DVD dont wurzag utilise la jaquette, le film n'y dure que 1h30 alors que la durée annoncée sur IMDb est de 2h...

4.5/6

Auteur:  wurzag [ 21 Oct 2016, 20:08 ]
Sujet du message:  Re: La Ligne Générale (Sergueï Eisenstein - 1929)

Bah 5 ans plus tard il ne m'en reste plus grand chose à part la scène de l'écrémage effectivement et puis des gros plans sur des visages étranges à la Eisenstein...

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