Distrait par deux policiers qui s'affairent autour de cadavres en bord de route, Gérard Huxley, un violoncelliste français en voyage aux Etats-Unis, perd soudainement le contrôle de sa voiture. Blessé, il est aussitôt hospitalisé. A son réveil, il fait la connaissance de Megan Denright, une jolie infirmière blonde qui prend soin de lui. Remis sur pied, elle l'invite alors à dîner.
Gérard Huxley ne tarde pas à rencontrer Dominique, sa soeur fragile, et son père grabataire. Souhaitant fuir leur petite ville provinciale, elles le persuadent de les emmener à Seattle.
Au petit matin est découvert le corps sans vie du père. Commence alors pour Gérard et les deux jeunes femmes une virée qui tourne rapidement au cauchemar.
Confirmation à la seconde vision que ce film est assez génial, j’ai du mal à comprendre comment il a pu autant passer inaperçu. Je l’ai découvert pour la simple raison que Mia Kirshner s’y trouve, et pourtant, à ma grande surprise, le film développe des choses vraiment intéressantes. Une manière assez singulière de rendre ses personnages intenses, obscurs et mystérieux. Le simple personnage de Jean Hughe Anglade tombe dans un univers qu’il ne comprend pas, et on adopte son point de vue tout le long du film. Une distance avec les réactions des deux autres personnages qui provoque une intensité assez forte liée à l’impossibilité du raccord. Le personnage fait face au dérèglement du monde sans pouvoir y remédier. Il est un musicien « strictement technique » qui va apprendre à jouer avec ses tripes, à « mettre des silences entre les notes ». Il est donc le raccord émotionnel du film, on suit son évolution face au monde et à lui-même. Les autres personnages demeurent des façades insondables (malgré une brève explication traitée de manière grotesque du fait de la distance du personnage de Anglade avec les évènements). La nature des personnages émet un doute constant sur leur finalité et leur devenir… c’est vraiment un film qui évite beaucoup de clichés, la sobriété de l’écriture et de la mise en scène vont renforcer ce film qui ne se contente pas d’être un simple thriller road movie comme je m’y attendais. Il y a clairement un beau dépassement des frontières du genre qui s’opère par l’intermédiaire du traitement émotionnel de Gregory Marquette et de son regard si particulier sur ses personnages. Le film est extrêmement décalée et jouissif, un premier degré souvent présent mais ça ne dérive jamais vers le risible.
Un exemple de dialogue que je trouve génial.
Les deux sœurs :
Megan (Connie Nielsen) : Ca fait 7 ans que j’ai pas pleuré. ça fait quoi déjà ?
Dominique : C’est Mouillé.
Megan : Ok, arrête la voiture
Elle sort de la voiture et va pleurer dans un champ.
Je trouve ça génial, une ironie découlant du fait que les personnages ne peuvent pas être totalement compris par Anglade et par le spectateur.
Bon après visuellement je trouve le film parfois sublime, il évite le piège du « ouais je vais faire un film Dark avec des gens déprimés de partout et une image crade qui va accompagner tout ça… on croira que je suis profond ». Le film est souvent très stylisé (même si il reste sobre) et ça s’articule parfaitement avec le traitement des personnage.
J’ai trouvé les trois acteurs géniaux, inutile de dire que Mia Kirshner remporte la palme en ce qui me concerne… avec ce rôle ambiguë de femme coincée dans un rôle d’enfant (ce qu’elle sait très bien faire, je n’imagine personne d’autre à sa place dans le film). Elle est juste sublime et confirme qu’elle est une des actrices les plus injustement peu utilisées. Connie Nielsen tient bien son rôle de femme forte et insondable allant jusqu’à contrôler l’aspect de ses émotions. Anglade est juste époustouflant dans le rôle de ce gars paumé qui regarde de partout autour de lui pour éviter d’avoir à comprendre.
Bref, c’est vraiment à voir. Rien de basique et consensuel là dedans. Un gros bémol pour la bo et des placements musicaux que j’ai pas compris ou qui sont raté.
Un film beau et simple. J’espère que des curieux iront voir.
5/6 (oui 4,5 sans Mia… Ca vaaaaaaa)
