J'avais lu cet été la nouvelle de Steve Martin, paru il y a longtemps en France sous le titre Mirabelle (nom de l'héroïne), et avait été surpris par la beauté du texte, la simplicité dans la présentation des personnages et surtout à quel point je me reconnaissais dans ces habitudes des personnages, cette mélancolie, leurs sentiments, leurs actions...Tout cela contrastant violemment avec le Steve Martin acteur de cinéma qui semble porter un masque depuis pour moi.
Auteur talentueux (pas mal de prix pour Shopgirl), Martin signait lui-même l'adaptation de son bouquin et se trouvait tout désigné pour jouer le rôle de Ray Porter, amant pygmalion d'une femme ordinaire et seule, merveilleuse pour celui qui prendrait le temps de faire attention à elle.
L'adaptation ne semblait pas de tout repos, tant les émotions des personnages, leurs intentions respectives dans une liaison, paraissait un calvaire à rendre à l'écran sans abuser de la voix off qui aurait plomber le récit. Martin et Tucker ont choisi de tenter le plus dur chemin, faire passer par les regards et la mise en scène tout ce qui faisait la beauté de l'histoire. Et c'est un échec inévitable pour qui a gouté du texte juste avant. Raccourcis, les personnages gagnent en mystère ce qu'ils perdent en subtilité.
La mise en scène d'Anand Tucker propose une approche de conte de fée au film et le sourire de Claire Danes accompagne volontiers le côté magique et tendre, tout en laissant une part belle à la romance, sensuelle et muette, entre les deux héros. Steve Martin n'a heureusement pas allégé son personnage, mais en a effacé le fond, ce qui rend son Ray abrupte et un trop confus. Troisième personnage de l'histoire, Jeremy (Jason Schwartzman), prend lui de l'ampleur par rapport au roman, et gagne du coup en épaisseur, ce qui pourrait être une bonne chose si on trouvait un réel intérêt à sa remise en place au coeur du récit...
C'est le lecteur déçu qui s'exprime à travers ses lignes. L'amour pour un livre vous fait constamment craindre la trahison et parfois si fine soit-elle, elle demeure présente et la désaffection reste présente tout au long du processus. Ce qu'il reste du roman tient dans quelques scènes magiques, où la "géniale" Claire Danes devient Mirabelle, et autour d'elle le film se construit soudain, par magie.
Tout y était et presque rien n'y reste.
4/6 tout de même, pour les acteurs, quelques scènes très touchantes et la musique.