Forum de FilmDeCulte
https://forum.plan-sequence.com/

Le Tableau volé (Pascal Bonitzer, 2023)
https://forum.plan-sequence.com/tableau-vole-pascal-bonitzer-2023-t35116.html
Page 1 sur 1

Auteur:  Vieux-Gontrand [ 22 Juin 2024, 19:51 ]
Sujet du message:  Le Tableau volé (Pascal Bonitzer, 2023)

André Masson est un commisseur-priseur en vue, aux allures de nouveau riche et au ton particulièrement cassant. Il doit faire face à Aurore, une stagiaire taciturne et passablement mythomane, mais son attitude face à elle révèle une forme de tact plus ou moins caché, le renvoyant à ses propres carapaces mondaines et professionnelles.
Dans le même temps, à Mulhouse (en fait plutôt du côté de Thann et Cernay), Martin Keller, un jeune ouvrier, emménage dans la maison qu'il a acheté avec sa mère en viager. Il a laissé le mobilier de l'ancien propriétaire, dont un tableau qui pourrait être les Tournesols fanés d'Egon Schiele, que l'on pensait perdu lors de l'Anschluss et des persécutions antisémites, et qui vaut une fortune.


Je ne connais pour ainsi dire pas Pascal Bonitzer comme réalisateur, et j'ai trouvé ce film plutôt bon, même si classique dans la qualité française. J'ai l'impression qu'il est plutôt atypique dans son oeuvre, relevant davantage de la chronique sociale que de la comédie. Les personnages sont certes hyper typés dès le début, mais le film a le bon goût de ne pas (trop) forcer les situations et de multiplier les twists psychologiques et explications de complexes psychologiques. Le moteur du film reste l'attitude morale de l'ouvrier, qui comprend vite la signification morale et politique de la spoliation, et se fixe un cap qu'il garde. Trop en dire risquerait d'émousser cette lucidité, d'être rattrapé par l'attitude attendue habituellement associée à la classe sociale. Mais le film a alors tendance à faire de cette rectitude morale un mystère, quelque-chose d'ésotérique, qui s'oppose certes au risque du populisme. Dans les meilleurs moments le film fait beaucoup penser à Laurent Cantet, ainsi dans la partie à Mulhouse, assez fine. Le film arrive à nouer plusieurs classes sociales dans une situation commune, mais avec l'ambiguïté liée au caractère indirect, passager et accidentel de cet échange : il est rendu possible par la transcendance irrépétable du tableau de Schiele, et un consensus sur la mémoire de la seconde guerre mondiale, que l'ouvrier a presque honte de comprendre. D'où une sourde inquiétude : les personnages sont intègres et justifiés, mais perdent alors toute extériorité. Le fossé entre le social et le politique n'est jamais comblé.
Tous ont une origine, mais le plus proche d'un projet commun est le cynisme d'Aurore
certes le mersonnage a une identité secrète à protéger
qui tourne celle-ci en dérision, s'inventant des drames familiaux alternatifs - la seule à se poser aussi la question de ce qui intéresse les autres plutôt que d'où ils viennent - un monde riche et inquiet où la la praxis ressemble au mensonge ou à la lubie d'un seul. Pas mal vu en fait.

L'intrigue et la dénouements sont un peu bâclés
qu'il faille à un commissaire-priseur de cet acabit l'email une ex-stagiaire pour subodorer une entente entre un expert qui dénigre l'oeuvre et l'estime à baisse et l'avocat d'un futur surenchérisseur est un peu gros
mais ce mcguffin tintinesque rend le film finalement sympathique et presque modeste.

3.5/6

Sympa aussi de voir Laurence Côte dans un bon rôle nuancé (et peut-être meilleure actrice qu'à l'époque)

Page 1 sur 1 Heures au format UTC + 1 heure
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
http://www.phpbb.com/