aka Des hommes d'honneur
Deux jeunes marines, Louden et Dawson, tuent accidentellement, au cours d'une action disciplinaire désignée "Code Rouge", un de leur leurs camarades, Santiago. C'est le lieutenant Daniel Kaffee qui est charger d'assurer leur défense lors de leur procès. Mais si Kaffee entame une défense de pure routine, sa jeune et pugnace adjointe, le lieutenant JoAnne Galoway, se rebiffe et l'oblige à instruire le dossier. Kaffee va devoir, pour découvrir la vérité sur cette affaire qui s'avère inquiétante, remonter jusqu'au sommet de la hiérarchie.
Comme je me faisais des films de procès ainsi que la filmo du jeune Cruise (et que je suis drogué à Aaron), j'ai eu envie de revoir ce film maintes fois vu et ne comptais pas poster un avis mais en constatant qu'il n'y avait pas de topic, je me suis dit qu'il fallait.
J'ai l'impression qu'on sous-cote aujourd'hui ce film comme faisant partie du tout-venant des thrillers juridiques '90s alors que c'est à des centaines de kilomètres au-dessus des Grisham plus ou moins vulgaires (il était même nommé à l'Oscar).
La mécanique de l'intrigue en soi est résolument classique mais l'écriture témoigne déjà de l'incroyable savoir-faire de Sorkin pour ne pas surécrire ses personnages (ex : les daddy issues du protagoniste, c'est 3-4 répliques seulement et ça en dit pourtant long) tout en réussissant à les rendre attachants et pertinents (la caractérisation de JoAnne et de Sam est parfaite en plus d'incarner toute l'ambivalence du film sur le corps militaire).
Oui parce que c'est aussi évidemment pour le scénariste une nouvelle (enfin sa première) étude de l'Amérique par l'un de ses aspects, érigeant ses idéaux (défendre ceux qui ne peuvent se défendre) tout en déplorant sa réalité (le fascisme, pour simplifier) et quelle meilleure arène pour le faire qu'un tribunal, où ce ne sont pas les balles qui remportent les victoires mais les mots.
Et quels mots. Les interrogatoires et plaidoiries sont parfaites, il n'y a pas que LE monologue final du Colonel Jessup, il y en a plein d'autres, moins flamboyants mais tout aussi efficaces. Et les échanges sont à l'avenant.
C'est d'ailleurs l'une des meilleures performances de Cruise, sans doute la meilleure dans la gamme "arrogant appelé à devenir humble", et le reste du casting déboîte (Nicholson évidemment mais aussi Sutherland royalement détestable, Bacon en faux antagoniste, Demi Moore en vulnérabilité, Pollak aussi bon dans le comic relief que l'indignation juive, mais aussi des apparitions de Noah Wyle et Cuba Gooding Jr.!).
Reiner fait un taf très classe (avoir Robert Richardson à la photo ça aide mais il y a de nombreuses idées très efficaces dans la mise en scène, dans l'évitement du champ-contre-champ pour illustrer la rhétorique des juristes) avec notamment l'idée du générique qui dit déjà tout (cette chorégraphie minutieuse qui témoigne d'un entraînement rigoureux, cette exécution parfaite et esthétique, impressionnante, mais filmée comme un corps anonymisé, mettant en avant la notion d'imitation, de mécanisation déshumanisante).
Tout simplement mon film de procès préféré (si l'on exclue JFK où le procès ne constitue que la dernière heure) et l'un des meilleurs scripts de Sorkin.