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La Prisonnière de Bordeaux (Patricia Mazuy, 2024)
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Auteur:  Lohmann [ 07 Juin 2024, 14:30 ]
Sujet du message:  La Prisonnière de Bordeaux (Patricia Mazuy, 2024)

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Alma, seule dans sa grande maison en ville, et Mina, jeune mère dans une lointaine banlieue, ont organisé leur vie autour de l’absence de leurs deux maris détenus au même endroit… A l’occasion d’un parloir, les deux femmes se rencontrent et s’engagent dans une amitié aussi improbable que tumultueuse…

Comme pour Guiraudie il est grandement temps que je m’attèle au reste de la cinématographie de Mazuy, que j'ai découvert tardivement avec Paul Sanchez est revenu mais dont je n'ai vu aucun des films qui précèdent. La Prisonnière de Bordeaux, beau titre aux réminiscences romanesques (Mazuy évoque La Princesse de Clèves, moi il me fait surtout penser à La Prisonnière de Proust) est probablement le plus doux de ses 3 derniers, avec une dimension mélodramatique absente des deux précédents, sans pour autant déroger à ce qui fait le fond de son cinéma. Un monde de femmes en prise avec une masculinité toxique que Mazuy va dans un premier temps éclipser du champ visuel, qu'ils soient hors cadre ou à distance du point de focalisation (belles idées de mise en scène qui démontrent que le film n'en manque pas), masculinité dont la première occurrence visible dans le film ne sera autorisée qu'une fois que le lien entre Mina et Alma sera solidement formé.

Que ce soit dans Bowling Saturne ou Paul Sanchez est revenu, les personnages masculins principaux souffraient, sinon de schizophrénie, au moins de double personnalité. Cette figure du double est reconduite ici au travers du couple Huppert/Herzi, que tout semble opposer mais que les circonstances vont rapprocher. Géniale idée que d'avoir associé ces deux actrices, avec tout ce que leur passé cinématographique charrie, des personnalités tellement opposées, la grande bourgeoise froide et cérébrale vs. la fille du peuple impulsive et charnelle (c'est Mazuy elle même qui utilise ce terme). D'ailleurs marrant de revoir Herzy dans un film de prison aussi rapidement après Borgo (même si elle est cette fois de l'autre côté du mur), quand Huppert semble elle tout droit issue du Elle de Verhoeven (moins manipulatrice et déjantée mais tout autant mythomane). Et le film est effectivement une sororité, celle de ces deux femmes qui ont besoin l'une de l'autre, que ce soit pour des considérations pratiques (un logement, un boulot) ou psychiques (rompre avec sa solitude), qui vont se souder et s'offrir l'une l'autre une certaine forme d'émancipation.

Mais ce qui fait la force particulière du film, c'est que son flanc social n'est jamais escamoté et pèse lourdement sur la destinée des deux héroïnes. Que Begaudeau soit crédité à l'écriture du scénario n'y est certainement pas étranger. L'opposition entre les milieux bourgeois et populaire, loin de n'être qu'un facile argument scénaristique, irrigue et conditionne la totalité des actions d'Huppert et Herzi. Loin de promettre une quelconque transgression, et c'est même là sa part la plus cruelle, le film n'aura de cesse de les ramener chacune à sa propre condition. De décloisonnement ici il n'y aura jamais, on peut s'entraider durant un court laps de temps, mais on est irrémédiablement ramené à sa condition sociale originelle. A l'une le tableau qui vaut quelques dizaines de milliers d'euros, à l'autre le reste de la collection. Et ce n'est pas cette fin (pas totalement satisfaisante) qui semble voir Mina et Alma sereines qui changera quoi que ce soit à cet état de fait.

Probablement pas le Mazuy que je préfère (j'aime les outrances et le caractère parfois grotesque de ses deux précédents, dimensions également présentes ici mais en sourdine) mais comme le Guiraudie un film qui n'aurait pas déparé en compétition officielle, surtout quand on voit la pauvreté de ce qu'était le contingent français cette année.

Auteur:  Karloff [ 08 Juin 2024, 17:51 ]
Sujet du message:  Re: La Prisonnière de Bordeaux (Patricia Mazuy, 2024)

Du mal à comprendre pourquoi Mazuy n'a pas la carte et Corsini si.... après le film repose beaucoup sur ses deux géniales actrices: Isabelle Huppert et Hafsia Herzi pour raconter une sororité empêchée par les conventions sociales et peu sur la mise en scène, ce qui explique peut-être cela...
Mais j'ai beaucoup aimé la petite musique du film, le coeur du film est très beau (moins aimé la fin... comme Hafsia d'ailleurs)

Auteur:  Lohmann [ 08 Juin 2024, 18:02 ]
Sujet du message:  Re: La Prisonnière de Bordeaux (Patricia Mazuy, 2024)

La mise en scène n'est jamais extravagante mais toujours juste, et elle contient je trouve de très belles idées.

Auteur:  Qui-Gon Jinn [ 08 Juin 2024, 18:10 ]
Sujet du message:  Re: La Prisonnière de Bordeaux (Patricia Mazuy, 2024)

Karloff a écrit:
Du mal à comprendre pourquoi Mazuy n'a pas la carte et Corsini si....
Mazuy fait des choses quand même bien barrées par rapport à Corsini je trouve.

Auteur:  Lohmann [ 08 Juin 2024, 18:21 ]
Sujet du message:  Re: La Prisonnière de Bordeaux (Patricia Mazuy, 2024)

Pour le coup celui-là est beaucoup plus sage.

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