En 2003, Raymond Depardon a obtenu l'autorisation exceptionnelle de faire entrer sa caméra au sein de la dixième chambre correctionnelle de Paris, dont il capte les audiences. Un documentaire au coeur de la justice française. Il plonge dans le quotidien d'un tribunal à travers douze affaires, graves ou moins graves, douze accusés, récidivistes ou aux prises pour la première fois avec la justice.
Mon premier Depardon et j'ai trouvé ça remarquable. Dispositif simple, le cinéaste filme 12 procès de correctionnelle, mais d'une efficacité terrible. Mise en scène minimaliste, pas d'effets tape à l'oeil, une vraie captation du réel mais dynamisée par le montage et une mise en scène sobre et d'une remarquable intelligence. Depardon a filmé plus de 80 procès pour en finalement garder que 12 qui vont de cas aussi simples que la conduite en état d'ivresse, la vente de marijuana ou le harcèlement. Cas humains assez variés et complémentaires, d'où l'intérêt du choix d'avoir filmé énormément de procès pour ensuite sélectionner les rushs et construire un film jamais redondant qui montre de multiples facettes de la justice.
Car si le film est passionnant c'est bien dans ce qu'il nous apprends et montre de la justice. Les 105 minutes filent comme l'éclair et la construction (3 cas à la suite puis résultats des délibérés en 2 minutes) rajoutent un petit côté feuilletonesque-suspense qui ne se vautre pas dans la "spectacularisation" du réel mais maintient l'intérêt constant de la part du spectateur. Evacuons tout de suite la petite réserve, alors ça aurait été passionnant de filmer les délibérés entre les juges pour statuer des condamnations, de voir ce qui se passe à ce moment mais évidemment le cinéaste n'avait pas l'autorisation et en filme que les séances publiques. Mais sinon tout le reste est génial sur ce que ça montre du fonctionnement du tribunal : les échanges verbaux entre la juge, les avocats et les accusés. Ca déconstruit tous les clichés qu'on peut avoir des tribunaux et donne une image complète et humaine de la justice.
Bref dans la catégorie captation du réel, on est clairement en face d'un grand film et même si la mise en scène semble discrète c'est un modèle d'intelligence dans le moindre de ses choix artistiques.
5/6
pour Battiston.
Marrant car juge, procureurs et avocats me semblent plutôt antipathiques : ce sont despersonnages qui jouent un jeu dont leurs interlocuteurs ne connaissent pas ou mé prisent ostensiblemet les règles, d'où l'impression d'un dialogue de sourds entre prévenus et membres du corps judiciaire. Devant la caméra de Depardon, ça donne de la bonne comédie humaine mais ça laisse souvent l'impression amère de voir que l'appareil judiciaire consiste en une mise en scène et un spectacle un peu ridicule, avec des principes valides mais impossibles à tenir et sans cesse dévoyés.