Mon premier Mel Brooks. Alors spontanément je suis un peu déçu, peut-être parce que je m'attendais à un ton du type ZAZ ou John Landis.
Du coup l'humour m' a semblé à la fois poussif et trop sophistiqué (donc déceptif et intéressant).
C'est que, comme le disait bien Sponge, il s'agit d'un vrai film expressionniste gothique, formellement super-soigné.
Bizarrement cela m'a fait penser à la démarche de Guy Maddin, assortie de plus d'ironie culturelle (le jeu sur Frankenstein qui est un nom juif mais pas juif, donc anglicisé, la Transylavie qui est germaique-nazie mais pas germanique non plus tout en restant un peu fasciste, etc... le film contient à la fois le fantasme et sa neutralisation - les personnages refusent eux-même la puissance qui leur est offerte, ils en ont peur à la place du spectateur, d'où leur médiocrité apparente - c'est au dessus du film d'horreur où la peur est censée de propager -ici les personnages se savent seuls) et de moins d'érotisme camp.
La scène de la résurrection de Frankenstein sur la plateforme qui monte au plafond est par exemple extrêmement puissante, émouvante, elle est sans doute plus forte que l'original (que je n'ai pas vu, car spontanément je n'en ai rien à foutre de Frankenstein, mais ce film me laisse comprendre qu'il y a peut-être une matière noble dedans : mission accomplished).
C'est le genre de scène que l'on voit dans Vaudou de Tourneur. Le mec ne remake pas, ne totalise pas non plus en se servant du surplomb du cynisme postmoderne, il vise à l'Aufhebung dialectique, l'ironie est le sens à la fois valorisé du point de vue esthétique et enclos dans les limites d'une époque défunte quant à son contenu.
En fait il ne s'agit pas pour Mel Brooks de subvertir un genre, mais de montrer ce qui dans l'oeuvre originelle, pouvait être intentionnelle ironique du point de vue du film, mais considéré à tort comme horrifique par le public. Le récit est opposé au mythe : on critique la crédulité, la fiction du premier degré du public historique de l'oeuvre, qui l'a ratée en se laissant fasciner par elle. C'est un truc un peu à la Adorno-Kracauer. Donc on s'emmerde un peu, mais aussi on réflechit sur un truc pas du tout con, même si on comprend dès le début où il mène.
L'absence de misogynie du film est bienvenue. Le personnage de Teri Garr a au départ tout pour être un prétexte érotique limite Benny Hill, mais a un vrai rôle complexe et riche. C'est pas les paires de nichons exhibiées puis congédiées par un geste brut de puritanisme phallo-centré de Landis, 10 ans plus tard, c'est quand-même un peu plus élégant sur ce plan.
4/6
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